Inspirations

herve--2

C’est pas marrant à dire

Mais lire me fait chier

Il faudrait m’en nourrir

Si je veux perdurer

Oui je suis un accroc

Au français et aux mots

Mais lire je trouve ca chiant

Et pourtant… et pourtant…

 

Je n’ai pas lu Rimbaud

Mais écouté Brassens

Qui chante par monts, par vaux

Tout ce manque de bon sens

Le sourire bien en coin

Placé sous sa moustache

La guitare bien en main

Une si jolie Kalash

Fredonnant ses rafales

Dans un bon vieux français

Des histoires peu banales

De bourgeois, de curés

Et tant de choses encore

Et tant de choses encore

« Je ne fais pourtant de tort à personne,

En suivant mon chemin de petit bonhomme. 
Mais les braves gens n'aiment pas que,

L'on suive une autre route qu'eux, 
Non les braves gens n'aiment pas que,

L'on suive une autre route qu'eux, 
Tout le monde médit de moi,

 Sauf les muets, ça va de soi… » (1)

 

Je n’ai pas lu Baudelaire

Mais écouté Renaud

Nous chantant la misère

Avec des mots d’argot

En prenant sous son aile

Les gens les plus petits

De ce monde cruel

Le tout en poésie

Personnage énervant

Plus souvent énervé

Par tous nos dirigeants

Tous c’qui peut écraser

Et tant de choses encore

Et tant de choses encore

« Tu dis que si les élections
Ca changeait vraiment la vie,
Y'a un bout d'temps, mon colon,
Qu'voter ça s'rait interdit!                              
Ben si l'école ça rendait
Les hommes libres et égaux,
L'gouvernement décid'rait
Qu'c'est pas bon pour les marmots !
Si tu penses un peu comme moi
Alors dit : "Halte à tout"
Et maint'nant, Papa,
C'est quand qu'on va où ? » (2)

 

J’ n’ai pas lu Aragon

Mais écouté Ferrat

Qui dit dans ses chansons

Ce qu’il pense de l’état

De l’argent de l’humain

De ces absurdités

Pour le monde de demain

Le tout dans un français

Clair, net et très précis

Abordable par tous

Avec des mélodies

Reconnaissables et douces

Et tant de choses encore

Et tant de choses encore

« On parle de vous sans cesse
De vos opinions
Vos voitures vos maîtresses
Vos clubs en renom
Vous avez pour vous la presse
La télévision
Vous vous dites la jeunesse
Pauvres petits c...
Vous vous dites la jeunesse
Pauvres petits cons » (3)

 

Je n’ai pas lu Verlaine

Mais j’ai écouté Brel

Qui vit son chant sur scène

Même dans la gestuel

Une plume magistrale

Sitôt qu’il a le la

Décrivant en détail

Des vieux ou ces gens-là

Inventeur d’expressions

A la fois pleines d’humour

De sens ou d’émotion

En y allant sans détour

Et tant de choses encore

Et tant de choses encore

« Et quand vers minuit passaient les notaires
Qui sortaient de l'hôtel des "Trois Faisans"
On leur montrait notre cul et nos bonnes manières
En leur chantant

Les bourgeois c'est comme les cochons
Plus ça devient vieux plus ça devient bête
Les bourgeois c'est comme les cochons
Plus ça devient vieux plus ça devient c... » (4)

 

C’est pas marrant à dire

Mais lire me fait chier

Il faudrait m’en nourrir

Si je veux perdurer

Oui  je suis un accroc

Au français et aux mots

Mais lire je trouve ca chiant

Et pourtant… et pourtant…

 

Pourtant vous comprendrez

Que je m’inspire ailleurs

C’est impossible chez

Les actuels chanteurs

Les artistes d’hier

M’apportent tant et tant

Que voulez-vous y faire ?

Moi, lire je trouve ca chiant

Et tant de choses encore

Et tant de choses encore

 


(1) Georges Brassens, « La Mauvaise réputation », 1952.

(2) Renaud Séchan, « C’est Quand Qu’on va où ? », 1994.

(3) Jean Ferrat, « Pauvres Petits C… », 1968.

(4) Jacques Brel, « Les Bourgeois », 1962.

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