J'ai ouvert une cage

J'ai ouvert une cage où sommeillait un ange,

Et dans vos yeux, je le vois, que cela vous dérange.

Vous l'aviez apprivoisée, anesthésiant sa force,

Comme un chêne usé dont on saigne l'écorce.

Peureux, craintifs, fainéants ou monarques,

Je vous blâme, ce soir, et vous fais cette remarque

Maintenant qu'elle s'envole, vous semblez la voir,

Aveugles que vous êtes, prêts à la décevoir,

Encore, égoïstes et lâches sans le percevoir.

Je m'accuse, à raison, de croire en ses rêves,

De pousser son coeur asservis à rompre ses fers.

Capable de me ternir, de mentir et de faire

Mille et un sacrifices, me corrompre sans trêves,

Pour peu qu'à la fin, elle croit en ses rêves.

Traitez-moi de salaud, sans valeur et sans foi,

Pire encore, crachez donc : « manipulateur » !

Mais les lètes sont dociles sauf pour les dictateurs

Il suffit d'un leader et en une seule fois

Nous soulèverons vos vies, fades et moroses

Tandis que sans répit je protégerai ma rose.

J'ai ouvert une cage où fleurissait un lys,

A la vie bien trop sage, aux pensées bien trop lisses.

Pucelle du désir, de l'amour, de la vie

Alors qu'en son pollen sommeillait une envie.

Eclore de merveille, ambitieuse et fertile,

Connaître le goût des mots, la couleur de l'esprit

Qu'il lui manquait tant et je me suis pris

A aimer la voir germer, tandis que puérile

Face au changement vous souhaitiez la freiner.

J'ai ouvert, trop curieux, une boîte de pandore.

J'y ai vu briller un songe aux cheveux d'or,

Tandis que les autres n'y voyaient que leur bonheur.

Osez sacrifier le quart de ce que je quitte à cette heure,

Alors vous pourrez insulter jusqu'à mon honneur.

Osez feindre, intéressés, de croire en ses pouvoirs.

Alors vous regretterez d'encore la décevoir.

J'ai ouvert une cage où sommeillait un ange,

Je lui ai donné des ailes, elle devient un archange.

Demain elle sera Icare ou phœnix, à votre convenance.

Brûlez son existence ou acceptez sa renaissance.