J'aime.

Christophe Hulé

J'aime la mer, le sable, les rochers, les vagues, les filets qui sèchent, là où il reste encore des pécheurs.

J'aime les falaises, les embruns, les phares, et leurs gardiens, s'il en reste encore.

J'aime les bateaux, petits ou gros, la couleur des voiles et des coques, tous ceux qui partent où je n'oserais aller.

Les coquillages agrippés aux rochers ou sur la grève, enfin ceux-là sont morts.

Je n'aime pas les cimetières marins, ni les cimetières en général.

Les bars du port sont pleins à craquer d'anciens marins qui s'ennuient, de veuves d'anciens marins, de jeunes fiers-à-bras, qui rêvent de baleines blanches, là où il n'y a plus grand-chose à pécher, surtout depuis la trahison des Anglais.

Les multinationales, dans ce domaine comme dans tant d'autres, ont tué les petits pécheurs, ou les artisans, ou les entreprises familiales, ou, ou …

Jusqu'à ce que tous les petits ports, qu'on dit pittoresques, en Irlande ou un peu partout, deviennent des pièces de musée pour touristes désabusés, qui ne sont pas dupes.

Notre planète poussiéreuse, enfin c'est un détail, disons plutôt condamnée, n'a que faire de cette nostalgie qui n'appartient qu'à l'humain.


J'ai aimé les falaises, les embruns, les gaufres et les beignets, même l'accordéon, que je déteste, me manque aujourd'hui.

Enfin façon de parler, il ne reste que le néant, est-on vraiment surpris ?


J'aime ce que j'ai aimé jadis, quand j'étais en bas.

D'après ce que j'en sais, n'étant pas du sérail, il paraît que l'ici-bas n'est plus.


Imaginez un jour que l'horizon disparaisse.

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