J'aimerais le lui faire lire

ernestin-frenelius

Nouvelle version de ce texte que je vais slamer. J'ai hésité à ôter les indications notées entre parenthèses. Bien sûr, elles ne figurent pas sur le cahier qu'a lu la jeune fille. Elle, elle a tout vu

Le 28 septembre 2015, à minuit et quelques, dans le tram qui me ramenait chez moi j'ai écrit :

(Stylo en main) Cela fait bien longtemps que je n'ai pas ainsi écrit dans ce cahier

(Je baisse le stylo et tourne les yeux vers elle) Il y a une fille assise un peu plus loin sur ma droite

J'ai l'impression qu'elle a peur que je l'aborde (Fou rire)

(Arrête de rire et relève le stylo)Je l'écris

Juste avant de le faire, dans un ample et beau mouvement (Le faire), j'ai envoyé mon stylo valser entre elle (la regarder) et moi au milieu de la travée (Le regarder)

(Me relever et prendre sa posture main sur les cuisses pour me regarder) Et j'ai du ramper à ses pieds pour le ramasser

(reprendre le stylo en main et écrire) Je me demande ce qu'elle en a pensé

 

J'aimerai le lui faire lire

Je ne sais pas si j'oserai (baisser le stylo et tourner les yeux vers elle)

Elle tripote…

(Reprendre le stylo) Non, si j'écris ça, je n'oserai pas le lui faire lire

Je viens de relire ce que j'ai écrit et j'hésite (Baisser le stylo et tourner les yeux vers elle)

(Le reprendre et écrire) Si seulement elle faisait quelque chose que j'arriverai à bien écrire ça m'aiderait

Autre chose que faire cliqueter ce truc entre ses doigts

Ça m'intrigue et ça m'énerve un peu

Je la regarder un peu

Mais n'ose pas plus

J'ai l'impression de la gêner

Alors - ça je l'ai écrit le lendemain, en fin d'après midi, installé à la terrasse du café, Les savons d'Hélène :

 Je me suis franchement tourné vers elle et me suis assis sur le siège à ma droite pour me rapprocher d'elle, je lui ai dit bonsoir et, en lui tendant mon cahier, je lui ai proposé de lire ce que je venais d'écrire. Je l'ai regardé lire, au bout de trois ou quatre lignes, elle a souri, puis elle a ri, comme ça, simplement, et elle a continué à lire comme ça jusqu'au bout. Puis, sans lâcher le cahier des yeux, elle m'a dit que c'était très vrai ce que j'avais écrit et que c'était même un peu troublant que j'ai deviné si justement et que j'ai réussi à l'écrire aussi simplement. Surtout qu'elle avait eu peur que je l'aborde, parce que c'était vrai que, quand j'étais monté, je l'avais regardé un peu insistamment et que je comprenais bien que forcément les filles, dans ces situations là, elle se méfie un peu, enfin elle pense à ça. J'avais eu bien envie de lui dire ce que j'en pensais et que c'était peut-être l'une des raisons pour lesquelles j'écrivais. Mais comme elle m'avait posé la question je lui avais plutôt, en deux mots, plutôt sérieusement expliqué pourquoi et comment j'écrivais comme ça et pour illustrer j'avais commencé à lui dire mon poème Authentique et célèbre :  

 

« Je suis monté au dernier moment

Me suis installé

Ai sorti mon stylo et mon cahier

Le tram a démarré

J'ai commencé à écrire

Le premier arrêt est annoncé

Nous tournons lentement

Doux bruit de roulements

Le tram s'arrête

Les portes s'ouvrent

 

Première fournée de voyageurs

Jolie fille qui passe

Gazelle maussade

Jeune homme sûr de lui la suit

Chasseur sans peur

Un enfant babille et rit

Un rayon de soleil illumine ma page

J'écris dessus

Ligne droite

Le tram accélère

Ronronne

Puis on entend : Prochaine station Baggersee

 

Une fille en jupe verte s'apprête à descendre

Je l'écris

Le tram s'arrête

Relève la tête

La jupe verte s'en est allée ses jambes avec

 

Deuxième fournée de voyageurs

Mais personne ne s'installe à mes cotés

Je prends trop de place avec ma jambe croisée

Sur laquelle repose mon cahier 

Je me demande comment ce serait si je devenais célèbre avec mon poème

 

Et là je vois

 

Une fille blonde, lunettes en étailles,  calon haut et tollant  tentelles ...»

 

Je m'étais planté et je l'avais mal dit 

« Ça s'était pendant la journée en été ! » elle m'a dit

 

Ça m'avait fait plaisir, elle avait quand même compris, et elle avait l'air contente, gaie et en confiance avec moi. Comme le tram était arrivé au terminus on s'était tout les deux levé et comme on se dirigeait vers la porte pour descendre, elle m'avait encore dit qu'elle était belle ma manière d'écrire que je devais avoir un espèce de don et qu'il fallait que je continue et…on est descendu et …Bon… Et bien… Il ne me reste .... qu'à continuer ! Eh ben oui... oui... Elle m'a dit au revoir et elle est partie. Il ne me reste qu'à…

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