Jamais le matin !

Ballet des avions dans le ciel, des puissances se jaugent. L'une soutient le tyran, l'autre protège… Mais que protège-t-elle donc cette puissance qui se pose en championne des libertés ? Ses intérêts, les intérêts de ses « puissants », rien d'autre... Au sol des gens meurent, innocents ou amalgamés à quelques croyances conditionnées, ils meurent ces hommes, femmes et enfants. Armes à la main, désespoir dans le cœur, haine dans les yeux, faim au ventre, terreur en l'esprit…

Qui protège les faibles ? Plus personne…. Les faibles d'orient ou d'occident qui n'ont pour eux que leur force de travail, leur niveau d'étude, d'éducation… Qu'ils meurent dans ces camps de réfugiés, ou privilégiés dans ces pays riches d'une dette colossale… A l'ouest, des possessions, toujours plus d'objets inutiles, de propriétaires avides de garder pour eux-seuls, et au soleil de l'est et ailleurs sur cette planète agonisant d'une exploitation échevelée, l'envie de rester en vie, élever ses enfants et le rêve sans fin de pouvoir posséder à son tour, de se rendre esclave d'un système qui ne dit pas son nom... Et ils se précipitent en vagues successives vers ces terres promises et pourtant épuisées.

Mais ne sommes-nous pas tous aveugles ? Aveuglés par notre envie d'avoir, ces avoirs qui nous font croire à une protection illusoire… Ne sommes-nous pas tous les otages, esclaves de ces puissants qui depuis toujours profitent de la faiblesse de ceux qui s'usent chaque jour à des travaux sans fin... hier dans les champs, hier et aujourd'hui sur des machines ou des écrans… Mais ne sommes-nous pas tous coupables : coupables d'accepter la soumission et l'affliction autant que ceux qui les infligent ?

Les champions sans peur et sans reproche ne sont plus, ont-ils jamais été ? Remplacés par ces saltimbanques du ballon rond ou du grand spectacle dans les salles sombres, ou d'autres copies pâlottes et sans envergure… Les défenseurs des libertés ne sont plus que légende consumée et consommée, assumée par l'offre et la demande, revisitée par le marché. Et cette idée de biens communs, comme s'appelait-elle déjà ? Oubliées les vertus d'un christianisme primitif, d'un communisme mort né, assassinés par l'esprit d'une humanité vénale et veule qui ne veut que conserver, jamais partager. Humanité qui contient dans ses mains ce qu'elle craint de détruire. Faire un pas dans l'inconnu la terrifie encore et toujours… Alors les vieux réflexes sont là et balaient d'un revers les tentations d'un autre chemin.

Gardons les yeux fixés sur la boussole de notre devenir, sur nos lendemains gris et sans saveur, poursuivons la route, le sillon tracé par le pas des générations qui nous ont précédés… Avaient-elles compris, avaient-elles admis ces âmes soumises que les révolutions ne se font pas dans le sang et la destruction, mais dans le cœur de chacun… jusqu'au point où la balance penchera du côté de la Vie.

« Ouais ben pour le moment, elle ne penche pas du bon côté la balance et pis c'est tout ! ».

Fin de la parenthèse dépressive et pseudo-philosophique, faudrait pas abuser des « idées », des fois que ça donne naissance à des réactions incontrôlées… Noté sur la porte du frigo, sur un post-it rose fluo : "n'ouvre pas le journal, abruti ! "

Heureusement, je viens de lire le nouveau texte d'Erge "Grain de peau". Merci à lui, et j'ai à nouveau l'optimisme frétillant...

Brein Milliner

Publié sur le blog :

https://despointssurlesi.wordpress.com/2015/09/19/jamais-le-matin/