JESSIE . Chapitre 26
Jp Scriblerus
Chapitre 26
Un tour dans le crâne de Charles Villepou.
La reprise avait été terrible cet même lundi 9 mai pour Charles Villepou chef du bureau des grands évènements de la ville, et à ce titre chargé de l'organisation des grands manifestations qui s'y déroulaient.
Il avait à présider dès quatorze heures trente une réunion relative à une manifestation majeure. Ce n'était pas une tête pensante qu'il avait, c'était un pavé nantais qui en faisait office.
L'apéritif, l'apparition inopinée de Jessie au café Rouge, les propos de Jessie, ses fesses, ses seins, ses insomnies dernières, l'invitation au péché que suggérait l'adresse mail que Jessie lui avait transmise le brutalisaient, l'achevaient.
De retour au bureau vers treize heure trente il versa dans son verre crado son flacon d'Actimel. Ses vacances à Cannes prévues en Août avec Arlette étaient mal parties. Jessie revint le happer, il ne pouvait pas imaginer, pas croire encore ... elle ne pouvait pas lui avoir fait cette proposition de coucher avec lui, lui le père de Sébastien, ce Sébastien son fils, dont les fiançailles se préparaient avec cette fille qui va avec eux le dimanche à la messe, qui allait se marier l'année prochaine.
Ce " Tenez Charles si cela vous chante, voici mon mail. " l'obsédait. " Oui il lui enverrait un mail et il lui fixerait un nouveau rendez-vous.
Mais alors il se reprendrait, évacuerait tout semblant de faiblesse, la chapitrerait, il lui redirait que l'éclat de ce week-end n'avait rien d'alarmant, ce n'était que l'étincelle résultant d'un frottement entre deux caractères forts dont aucun n'accepte que l'autre le cannibalise et altère son autonomie, certes l'amour, mais l'amour... oui c'est ça un nouveau rendez-vous pour recaler les choses ..." En réalité Charles Villepou lucide, considérait qu'à la réflexion Sébastien et Jessie étaient deux caractères immatures.
Chrystelle Malenlevé, La secrétaire de Charles Villepou entra dans le bureau, monsieur Villepou tout le monde est là pour la réunion.... Il fallait qu'il envoie ce mail dès aujourd'hui, il ne songerait, il se le devait, qu'à défendre son fils et à favoriser un retour à la normale, Arlette et lui passeraient leurs trois semaines à Cannes comme prévu en août, Jessie et Sébastien s'abandonneraient aux clairs de lune de la riviera turque autour d'Antalya, et en septembre on lèverait en leur honneur une coupe pour sanctifier leurs fiançailles.
Charles Villepou, fort de cet optimisme contraint, rejoignit, la salle de réunion, soulagé, les dossiers sous le bras, mais la lassitude dans le creux des genoux. Non, ce mail, pas aujourd'hui, il réfléchirait, il laisserait passer la nuit et lui enverrait un mail dès demain matin en arrivant au bureau. Et ces fesses qui l'obsédaient... ce jean qui lui collait aux fesses...
" Bonjour Jessie. Comme suite à notre échange d'hier midi et aux nombreux points restant en suspens entre Sébastien et vous et bien qu'étant indirectement concerné j'estime qu'il serait souhaitable que nous nous rencontriions dans un nouveau tête-à-tête hors de tout contexte susceptible de vous mettre la pression.
Le café Rouge n'est pas discret, je vous propose le Loch'Ness rue Kervégan, à dix-huit heures. Je vous laisse le choix du jour hormis le vendredi. Ch V. "
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Ils se retrouvèrent à l'heure dite au Loch' Ness.
Jessie lut le mail, haussa les épaules: " Quel con ! " et répondit : " Ok ce jeudi à dix-huit heures au Loch' Ness, Jessie."
- Jessie que prendrez-vous ?
- Un grand crème.
- Alors je prendrai un grand crème.
Jessie ricana. C'est quand même niais un homme. Un vol de canards passa sur le fleuve.
- Un crème à dix-huit heures quand vous allez embrasser Arlette elle va vous dire avec son humour subtil tiens c'est nouveau ! tu prends ton petit-déjeûner le soir avant dîner maintenant, ça va donner un goût à ton potage au vermicelle.
- Vous avez beaucoup d'imagination dit Charles Villepou.
- C'est vous et Arlette qui m'avez tout raconté de vos manières, de vos manies et je vous ai vus vivre un peu, allez monsieur Charles de quoi voulez-vous me parler, surtout pas de Sébastien, vous voulez me rencontrer dans mon alcôve, ce ne peut-être que ça je savais que vous y viendriez …
- D'abord de Sébastien.
- Ah non pas de Sébastien, du tout ! sinon je pars... ce qui est dit est dit, ce qui est fait est fait, ce qui est rompu est rompu …
Elle se leva .
- Vous ne m'avez pas comprise, je ne suis pas une racommodeuse ... pour moi les mots ne dépassent jamais la pensée, simplement pour info pratique, je n'ai pas encore prévenu mes parents de la rupture.
Charles Villepou saisit l'interstice.
- Il y a justement le voyage en Turquie ce serait peut-être l'occasion …
- L'occasion de quoi rugit sourdement Jessie, voyant Villepou venir et anticipant, ... de me redonner une nouvelle chance avec Sébastien c'est non non et re-non, bon dieu ! allez-vous le comprendre !.
Elle se radoucit.
- D'ailleurs tenez, si Sébastien - ah je vomis ce prénom maintenant ! - ne l'a pas encore annulé, c'est vous qui devriez partir avec moi et peut-être qu'avec vous Charles ce serait le début de quelque chose comme ils disent dans l'amour est dans le pré.
Allez Charles ne soyez plus faux-cul, c'est mon cul et mes nichons, ma chatte qui vous intéressent ! vous voudriez en tâter ! Alors on couche quand ?
Charles Villepou encaissa, fit le dos rond sous les provocations et cette mise en demeure outrancières, il se cala dans le fauteuil en osier bleu, se raidit, se redressa, cette fois il devait réagir, lui demander de prendre la porte. Jessie l'observait, la bête était atteinte mais pas encore soumise, il allait être à elle, elle passa sa langue sur le revers de sa lèvre supérieure à la manière de Robert Lyle Knepper dans Prison Break.
Une fois encore c'est à peine si elle avait un soutien-gorge sous son t-shirt. Jessie assaillait Charles Villepou. Elle ne se retenait pas, elle se lâchait, forçait le trait, menait l'assaut, passait à l'acte. Allons détends-toi ! ça ne te démange pas, là présentement ? ne réponds pas je sais que tu es en érection.
- Mais nous n'allons pas en rester là, à nous regarder dans le blanc des yeux. Je suis à toi quand tu veux. Pour toi ce sera chez moi. Même si tu le souhaites dès maintenant, on y va...
Charles Villepou se cramponnait. Jessie s'amusait, renchérissait :
- Je sais qu'il est trop tard, Arlette attend son petit chéri retour du boulot, allez respire, je te libère, vas-y, va rejoindre ton acariâtre, ta marâtre, envoie-moi un mail, le matin pour le soir, ne tarde pas trop quand même. Mais tu ne viens que si tu as mon accusé de réception te signifiant que je suis libre. Je peux ne pas être seule. J'ai envie de toi, rien que de te le dire je mouille.
Charles Villepou jeta un regard effaré autour de lui, la sueur perlait sur son front. Elle avait le verbe clair et très audible. Chacun semblait affairé à sa table, mais il faut se méfier des visages dormants. Elle s'était levée, accrocha son sac à son épaule. Au comptoir, l'hôtesse essuyait consciencieusement les verres et les tasses de café.
- Vous n'avez pas fini votre café.
- Finissez-le vous y sentirez le goût de mes lèvres, à plus.
Une expression que Villepou abhorrait.
Elle s'éloigna revint sur ses pas, s'appuya à la table, se pencha vers Villepou lui flanquant presque le gouffre vertigineux de ses seins sous le nez - c'est vrai il était en érection - j'avais oublié de vous dire ...
- Oui ? ce sera cinquante euros
- Quoi ?.. Pour vous, la passe ce sera cinquante euros. Elle baissa le ton.
- Oui Charles je serai ta pute, ni Sébastien ni Arlette n'en sauront rien, c'est le prix à payer pour la sérénité de Sébastien et de ton couple.
Elle s'éloigna de nouveau. Elle devient folle cette fille pensa Charles Villepou qui était abasourdi, secoué. Il s'essuya le front, quelle garce ! et il était convaincu que la serveuse au bar malgré son air indifférent et lointain qui lavait ses verres et ses tasses n'avait pas loupé une bribe de l'échange.
S'il tombait dans les rets de cette fille là il devenait la version moderne du monsieur Hulot de la Cousine Bette dans Balzac... et Ruy Blas... " Je descends, je descends et jamais ne m'arrête, une voix me dit marche et l'abîme est profond et de stupre et de vice je le vois glauque au fond."
Cette fièvre qui se levait, ce flux brûlant qui l'envahissait, ce flot de désirs qui allait rompre la digue de ses principes consolidés toute sa vie durant à partir des matériaux les plus pertinents, les plus nobles, l'éducation, la formation, l'exemple, la religion, Dieu, l'hostie dominicale … sapés par la bouche, la langue, les seins, les fesses de Jessie ! ?.
Il fallait absolument qu'il rencontrât le père Patrice, l'un des prêtres de la paroisse qui les connaissait tous: lui, Arlette, Charles, Sébastien, Jessie.
Toute la bande quoi ! Le rencontrer ou succomber d'abord ?
µµµ
052013 .
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A SUIVRE
Dilemne
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