JESSIE . Chapitre 23

Jp Scriblerus

Résumé des chapitres précédents : Jessie macère sa vengeance après voir été quitté par Sébastien. Sébastien est revenu vers Charlène qui nous a fait entrer dans l'intimité de sa famille adoptive.

Chapitre 23

On n'a qu'une vie, Charles Villepou, pensez-y !

   Tentation - Homosexualité - Onanisme - Religion 

   Battre le fer tant qu'il est chaud, Jessie s'y tint. Elle connaissait les habitudes de Charles Villepou et alla le surprendre dès ce lundi retour de ce week-end calamiteux au " Café Rouge " où il prenait cet apéritif qu'elle lui savait prohibé par Arlette Villepou.

    Il y avait du monde mais par chance il était seul à sa table dans un recoin de la salle.

   -   Bonjour monsieur Villepou.

   -  Ah.. ah, ah … C'est vous Jessie !

  -   Je peux m'asseoir ?

  -  Je vous en prie, quelle surprise, mais si c'est un bon vent qui vous amène ...

  - Un bon vent qui m'amène ? le vent de la colère monsieur Villepou ! d'après vous il ne s'est rien passé ce week-end ! Alzheimer ou la mémoire courte ? …

   Regardez la tête que vous avez, regardez la mienne, nous en portons les stigmates.

     Elle s'installa devant lui.

  -  Si sans doute mais c'est la vie, une dispute, une mauvaise passe, chacun de nous a vécu ou vivra selon son âge et au-delà ce genre d'avatar... J'espère que Sébastien et vous allez reprendre pied malgré les sacs poubelles que ma femme et moi avons récupérés. Ceci étant ma femme est dans tous ses états.

  -  Ah votre femme est dans tous ses états, et les miens, moi je n'ai pas à être dans tous mes états après que votre fils a voulu me lâcher, m'a lâchée pour faire un break ! je m'en souviendrai de ce week-end.

 -   Faire un break est légitime et ce n'est pas vous lâcher Jessie.

 -  Déjà cette séance a précipité mes ragnagnas.

 -  J'en suis navré pour vous Jessie, mais ça arrive toujours tôt ou tard dans le mois.

  - Ben dame, c'est vrai qu'un homme c'est toujours mieux informé sur la chose qu'une femme ! dites monsieur Villepou les yeux dans les yeux, votre fils il a une nana dans sa vie ? Elle s'appelle... putain... Il me l'a dit son nom ! Il me l'a avoué lorsqu'il est venu m'apporter, il a failli, m'apporter ses croissant samedi matin, elle s'appelle, oui c'est ça … Ah et puis merde …

   " Charlène ! " avait failli prononcer Charles Villepou. Oui Charlène... pris dans les rets de la réthorique subtile de Jessie. Il se retint de justesse quand il comprit qu'elle n'en savait rien et que peut-être même elle ne savait pas que Sébastien avait une amie, qu'elle n'en savait rien du tout, qu'elle bluffait.

   Il poursuivit: " Je n'en sais rien, il n'a été question que des sacs poubelles que vous lui aviez jetés, et que sa mère a fait mettre dans notre cave. … "

   En cet instant les yeux de Charles Villepou glissèrent sur la pointe des seins de Jessie qui transparaissaient à travers le tissu du t-shirt, laissant voir le dessin des aréoles brunes que la dentelle légère du soutien-gorge n'estompait pas.

     Jessie sourit et lui sourit. Villepou mordait à ses appâts.

   -   N'aimeriez-vous pas goûter à d'autres sources qu'aux sources flétries et taries d'Arlette, dit Jessie. Je ne vous déplais pas, je le sens, je le sais, l'autre jour chez vous c'est Arlette d'ailleurs qui a mis les pieds dans le plat lorsque vous m'avez lorgnée, vous et votre fils grossièrement.

   Vous vous rappelez lorsqu'elle s'est ramenée avec le balai et le ramasse-bourrier.

   Villepou rougit.

  -   Ne rougissez pas Charles, c'est humain, tenez Charles si cela vous chante tenez, voici mon mail, elle sortit un bloc de post-its de son sac, y écrivit son adresse de messagerie, détacha le post-it et le lui tendit.

  -  Sébastien ne veut pas de moi, je sais et il en aura d'autres, mais vous à part Arlette, qui aurez-vous d'autres à votre âge, on n'a qu'une vie, pensez-y .

   Charles Villepou observa Jessie. Il n'appréciait pas qu'elle le manipulât ainsi, qu'elle imaginât qu'il voulût goûter à d'autres sources et qu'elle évoquât les appâts flétrissants et tarissants d'Arlette après laquelle il avait certes tant d'aigreurs mais qui malgré tout était sa femme. Quelle grossièreté. Et puis essayer de le circonvenir ainsi ...

   Il lui fallait absolument réagir en sa qualité de mari fidèle dont la femme est bafouée par des insultes scabreuses, en sa qualité de père dont le fils avait couché avec cette fille et qui envisageait de se marier avec elle. Et puis il était catholique pratiquant, communiant, et cette fille le savait puisqu'elle les accompagnait même à la messe, il ne pouvait lui laisser croire l'ombre d'un instant qu'il pouvait être sensible à ces provocations et susceptible d'y succomber, même s'il convenait de quelques faiblesses à son encontre, mais un homme est un homme.

   Non il n'était pas de ces pervers de son âge qu'il avait vus sur Internet se masturbant, montrant leurs culs.

   Jessie devait suivre le cours de ses pensées car elle lui sortit soudain :

   -  Ben si mon vieux t'es comme les autres t'en fait partie, t'aime le cul !

   -  Jessie ! -

  -   Y' a plus de Jessie qui compte ma poule.

      Elle s'était levée et s'apprêtait à partir. Bon dieu c'est vrai qu'il en rêvait de la croupe de Jessie. Et lorsque ces pensées lui prenaient la tête, Arlette Sébastien et Dieu lui étaient à des années-lumière. Il brûlait de toucher...

  -  Jessie, reprenez-vous ! et puis nous avions de multiples points à voir, le voyage à Antalaya, les fiançailles...

  -   Ben dame mon chou mais c'est bien sûr.

   Elle s'éloigna. La raie profonde de ses fesses redondantes allait jusqu'à aspirer son jean. Elle se retourna, elle rit, Charles Villepou la mâtait, elle était sûre qu'elle le prendrait en flagrant délit de regard concupiscent.

    Elle lui fit une moue d'amour avec ses lèvres, un clin d'oeil, mit le doigt sur le bord de ses lèvres et lui souffla un baiser. C'est une garce ! pensa Villepou.

   Elle savait que le fruit désormais était mûr, qu'il ne lui restait plus maintenant qu'à secouer un peu le cocotier pour que Villepou père lui tombât dans les bras, la queue bandante.

   Oh ! le creux de ces fesses qui aspirait son jean !. Il savait qu'il ne résisterait pas. Toute sa vie, toute sa vie, il avait résisté aux tentations de la chair que la religion dénonçait comme un péché mortel si l'on y succombait. Adolescent il avait découvert le sexe avec ses cousines en jouant au docteur, puis l'homosexualité sans qu'il sache que c'était l'homosexualité, avec ses camarades de plages des bords de la Loire.

   Dans le même temps il se livrait à des excursions solitaires sur son radeau, abordait sur les îles du fleuve, s'abritant sous les saules pour s'adonner, pleinement nu, couché sur un sable doré, fin et chaud, à des plaisirs onanistes dont il se repentait, dont il se confessait. Puis il recommençait rapidement tant étaient bons les préliminaires de la tentation et délicieuse la montée de cette exaltation divine au sein d'une nature sauvage et complice lui semblait-il.

   Il avait le plaisir panthéiste.

   Dans sa vie de couple il s'était inscrit dans un fidélité naturelle, qui pour lui allait de soi et il ne voyait dans ses galanteries discrètes et naturelles avec ses collègues de travail aucun mal. Il n'était mû par aucune arrière-pensée maligne. Ce n'est qu'au mitan du lit de sa vie professionnelle que surgirent les premières tentations d'infidélités dont il n'eut pas lui même l'initiative. Les femmes vinrent vers lui sans qu'il ait pensé même vouloir susciter leurs sentiments, mais cela était encore une autre histoire.

   Aujourd'hui, le point terminal de son existence certes encore potentiellement éloigné mais désormais sensible, le caractère de sa femme, et l'évolution des moeurs précipitée par les effets d'internet, son oisiveté pré-retraitale impactaient et infléchissaient sa rigidité morale, la sapaient et il levait le pied, lâchait les brides, larguait les amarres et libérait ses instincts.

   Ce soir-là en rentrant chez lui il passa devant la chapelle des Franciscains dont la porte était encore grande ouverte, et il savait que cette porte n'était pas seulement ouverte mais lui était ouverte et l'invitait, le pressait à entrer.

    Viens, entre, ne dis rien, je n'exige rien, rentre, agenouille-toi, dis-moi ou ne me dis-pas, apaise-toi, mais entre, s'insinuait une voix.

    Il est des invitations que l'on ne doit pas refuser. Mais Charles Villepou passa outre. Dieu ne se vexe pas mais ne s'obstine pas, tant pis à celui qui n'a pas su le reconnaître en cette porte ouverte. Charles Villepou passa outre, tête baissée, une fois de plus. Après tout, il se racontait des histoires de bonnes femmes, il croyait à l'histoire de Bernadette Soubirou, il se faisait un film.

   La porte de la chapelle était ouverte, un point c'est tout ! Pourquoi l'aurait-elle été pour lui alors que le franciscain qui l'ouvrait, l'ouvrait pour toutes les bonnes âmes. Une porte était faite pour être ouverte et fermée, d'ailleurs lorsque passant devant la porte de la Chapelle, la porte était fermée considérait-il qu'elle lui était fermée ? non ! pas une seule fois il ne l'avait pensé.

   C'était son psychisme qui était détraqué. Dans un contexte de culpabilité permanent il développait son psychodrame. Pourtant cette porte ouverte le hantait. Et il s'enferrait.

   Charles Villepou déclina donc l'invitation subliminale, de manière fuyante, et ce faisant il méprisait son hôte et reniait le Christ pour s'aller tôt ou tard jeter dans les griffes de Lucifer, l'Ange déchu, c'est à dire dans les bras de Jessie.

    Charles Villepou paradoxalement croyait confusément au Diable. Il ne savait pas que Dieu avait besoin du Diable. Charles Villepou n'avait plus de relations intimes avec Arlette depuis deux ou trois ans, peut-être davantage, et il ne vivait plus le sexe qu'à travers des échanges virtuels, des errances sur les sites appropriés du net, sapant, minant, faisant exploser littéralement tous les principes moraux qui l'avaient fondé depuis toujours.

   Il souhaitait la réconciliation de Jessie et de Sébastien qui le maintiendrait sur les rails, car il avait compris que son comportement passif avait signifié à Jessie qu'il souscrivait implicitement à son invitation. Mais les portes de l'enfer lui étaient désormais ouvertes.

   " A vôtre âge qu'espérez-vous, je suis là, et on n'a qu'une vie pensez-y ! " lui avait dit Jessie. " On n'a qu'une vie ".

   Charles Villepou, lui, savait qu'il n'avait plus, qu'il ne détenait plus de sa vie qu'une piètre peau de chagrin, un lambeau, une chiure.

    Une chiure.                                              

                                                  µµµ

29042013

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A Suivre

     Quand Jessie fait son autocritique.

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