JESSIE . Chapitre 37

Jp Scriblerus

Résumé des chap. précédents : Sébastien Villepou a rompu avec Jessie. Jessie couche avec le père de Sébastien. Sébastien ne sait rien, essaie de se réconcilier avec Jessie. Il est de retour à Paris

Chapitre 37

   Un dimanche à se foutre par la fenêtre.

   Sébastien ce dimanche-là flemmarda et déprima au lit.

   Mais il avait décidé d'aller frapper à la porte de Charlène sur les coups de midi.

   A celle-ci il avait dit : " Je ne sais plus où j'en suis donne-moi un peu de temps encore." A celle-là il avait dit : " J'ai besoin de faire un break ". Celle-là avait dit : " Je crois que je t'aimais un peu.". Celle-ci lui avait dit : " Je ne veux plus être l'amie Ricorée, l'amie qui te veut du bien."

   C'est con un homme. Quelque soit son âge, oui c'est con un homme. Ceux qui l'ont conçu, Dieu ou personne, ont commis des erreurs dans leurs calculs. L'équilibre physique, mental, moral du navigateur au long cours qu'est l'homme n'a pas été suffisamment modélisé, éprouvé, assuré, sécurisé.

   Sous son drap Sébastien bat encore la campagne. Il se souvient de la lecture intrusive qu'il a pu effectuer dernièrement de quelques pages du journal intime que son père tient chaque soir après le dîner et qu'il laisse traîner tout en s'insurgeant s'il croit déceler quelque manipulation de l'entourage.

Extrait du journal de Charles Villepou, le père ;

    " A trente, trente cinq ans l'homme a encore peur aujourd'hui de s'engager, alors il se disperse, se cherche, sort couvert et fricote avec les unes et les autres, puis bonjour, bonsoir, l'on se marie, se pacse, ou copule sans certification légale, l'on se sépare puis l'on remet ça, le mythe de Sisyphe de l'amour.

    Puis lorsque l'on parvient à la cinquantaine revient le désir de goûter de nouveau à d'autres sources, et c'est là où l'homme et la femme peuvent dévisser complètement, explorant les nouveaux gouffres de la néo-sentimentalité ou se vautrant dans le stupre des nouveaux territoires de la sexualité.

     Ils veulent être liés par un lien ou par un autre, découvrir, connaître, vivre ce qu'ils ont lu, entrevu, mais pas vécu et qui frustrés, ont fait lever en eux des désirs nouveaux, improbables avec des partenaires inattendus, inespérés, qui partagent leurs fantasmes avec la même avidité curieuse, désirs jusque là réprimés.

      Ils veulent dans une illusion démente que leurs corps altérés soient de nouveau reconnus, agréés, labélisés, pour être partenaires à part entière de jeux auxquels ils vont êtres initiés, qu'ils vont découvrir dans leurs déclinaisons de passifs ou d'actifs, de dominants ou ou dominés.

   Les femmes qu'ils ont eues ou, d'une part, n'ont pas empli leurs attentes, ou d'autre part, se sont refusées à s'abaisser à la dépravation des jeux sexuels qu'elles n'attribuent qu'aux pervers qu'elles se refusent d'être.

   Les femmes sont d'abord amoureuses, et l'amour pour elles n'est pas la déviance sexuelle.

   Oui mais, l'une avait de beaux yeux, l'autre des seins d'enfer, mais celle-ci a une petite bouche et celle-là a des jambes, certes, mais courtes au mieux, torses au pire, celle-ci a les fesses qui lui tombent dans le creux des genoux, celle-là a la voix aigrelette, une intelligence primaire, le discours cafouilleux, la propreté douteuse, le parfum nauséeux...

     Alors L'homme qui lui se croit parfait passe sa vie en quête de la femme faite perfection, une perfection qui incarne tous ses idéaux féminins, corps et âme, mais la plupart du temps quand le livre de sa vie se referme malgré lui, l'on ne peut y lire qu'une histoire incomplète, très rarement achevée ou l'histoire d'une vie ratée, l'histoire d'une quête permanente en quête jusqu'au dernier souffle, l'histoire de la femme jamais trouvée, l'histoire d'une vie ratée.

     L'homme veut toutes les femmes, le must en une seule mais il ne la trouve pas, il ne trouve pas sa Meryl Streep aux grandes jambes harmonieuses au galbe confondant, aux lèvres pulpeuses, au nez aquilin, au regard de braise, profondément fidèle, dévouée, soumise, rieuse, intuitive, espiègle, élégante, cultivée, délicate, discrète, qui ne se prend pas la tête et ne la lui prend pas, et qui sait s'offrir sans manière, impudique, et sans tabou, vicieuse même. Il ne la trouve pas et la cherchant encore il se fait la main sur trente-six femmes qui ne seront que des brouillons, des essais à la Montaigne, pour conclure sur une femme qu'il fera sienne, las de chercher, et l'âge aidant.

    Il l'engrosse, il l'enfante, et elle deviendra une vieille aux seins flasques, au ventre mou, une femme douloureusement abîmée peut-être même, aux reproches constants, au dos douloureux mais qui repasse toujours ses chemises et pantalons. "

     Sont-ce les désillusions de son père ou une réflexion générale

    ... Mais lui Sébastien il n'a que vingt cinq ans... Je les soûle Jessie et Charlène avec mes interrogations, mes doutes, et si je partais tout seul en Turquie ? je pourrais aussi me rendre chez Décathlon, m'acheter une paire de chaussures de marche, un sac à dos, une tente Quechua et faire le chemin de Saint-Jacques de Compostelle, ou rester à Paris, d'ailleurs il faut que j'y trouve un logement plus spacieux.

     Midi passa, Sébastien était toujours dans son lit. Il n'ira pas frapper à la porte de Charlène ce dimanche. Il ne se lèvera pas aujourd'hui. Il s'endormit de nouveau dans l'après midi. Le téléphone sonna au moins à trois reprises. Qu'ils aillent se faire foutre.

     D'ailleurs ce fut un dimanche à se foutre par la fenêtre. Ce dimanche-là les stores du studio de Sébastien Villepou demeurèrent fermés toute la journée.

                                                       µµµ

090521013

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