Journée habituelle dans le métro

Il est de ces obligations pour lesquelles je m'incline

Sans nier le sacrifice, la pénibilité

Quand les trajets s'imposent à ma réalité

Descendre ces quelques marches est un impératif

Pour traverser la ville où je ne sais conduire

Abandonner la surface, enterrer mes repères

C'est aujourd'hui banal, même écologique

Je croise tant de visages dont les âges diffèrent

Et pour qui ces voyages sont teintés d'ordinaire

Pourtant se pourrait-il qu'avant cette habitude

Avant que ne s'affiche cette drôle d'indifférence

Ces gens aient ressenti ce manque de servitude, ce malaise qui me hante ?

Se sont-ils abonnés aux absences de sourires

Au bruit monotone des rails qui résonne ?

Peut-être existe-t-il un temps d'adaptation, une passe difficile

Et plusieurs navigos avant que ne s'apaise ma crainte du métro ?

Une autre pensée m'effleure tandis qu'une main se tend

Vers le premier support sauvegardant l'équilibre

Les doigts noueux s'agrippent même si les jambes vacillent

Le regard est posé comme endurci au vide, au manque de compassion

Alors mes yeux l'invitent à échanger nos places, à briser les tabous

L'excès de tolérance

Mais les mains se resserrent autour de la barre métallique

Sa voix murmure des mots un peu comme des excuses

« Je descends au prochain, ne vous inquiétez pas »

Peu m'importe de savoir combien de minutes encore

J'insiste, je la persuade, il faut qu'elle vienne s'assoir

« C'est comme ça tous les jours ! J'ai l'habitude vous savez ! »

Moi pas encore et sa réponse me fait mal.