Juste être moi
Lev Hamels
Le réveil sonne, et je suis un peu dans le coaltar. Je soupire et me force à sortir de la moiteur chaude de mon lit. En baillant, je vais dans la cuisine, et prépare mollement un bol de céréales et un thé. Je mange paresseusement en regardant mon téléphone. Quelques photos de soirée me font sourire, et me rappellent pourquoi j'ai aussi mal au crâne. C'est ça, les vendredis matins d'un étudiant. Je laisse mon thé, encore trop chaud, sur la table pour aller me doucher. Face au miroir, je regarde un instant mes cheveux bruns ébouriffés, les marques d'oreiller sur ma joue et les brûlures de clope sur mon vieux T-shirt des Rolling Stones. Je l'enlève rapidement, ainsi que mon caleçon, et entre dans la cabine de douche. L'eau chaude semble purifier mon esprits des relents d'alcools et baisers oublieux en même temps que mon corps. La santeur poivrée de mon shampooing achève de me sortir de la torpeur. Après m'être séché, j'enfile ce maillot trop serré dont je n'aurais bientôt plus besoin. Par dessus, une chemise rouge, un pull gris sombre, que j'associe à un jean classique, un peu délavé. Devant le miroir, je me souris, me tire la langue, me montre les dents, adopte différentes grimaces. J'ai l'air plutôt pas mal. Je retourne dans la cuisine pour prendre mon thé, et me rends sur le balcon. Je roule tranquillement une clope, et la fume rêveusement en regardant les passants en bas, fantasmant de me sentir à ma place dans ce monde aussi naturellement qu'eux. J'ai souvent eu cette impression d'être anormal, que ce monde ne voulait pas de moi. Enfin, je commence doucement à m'assumer, et cesser de faire semblant d'être quelqu'un d'autre. J'écrase ma cigarette et prends une gorgée de thé. J'aime la sensation chaude et claire de celui-ci dans ma bouche après la fumée du tabac. Je jette un oeil à ma montre. Il est temps que je me prépare à partir. J'attrappe du bout du bras mon sac que je jette sur mon dos, et ce bouquin anglais qui me donne cet air de gars cultivé, paraît-il. J'aime juste m'isoler du monde dans le bus en me téléportant dans un monde différent. J'arrive à la fac, les couloirs grouillent de ceux qui arrivent juste, ceux qui repartent, ceux qui vont vers une autre classe. Une fille de ma promo vient vers moi pour me faire la bise.
"Salut Emma ! Tu vas bien ?"
Très réussi ce trait d'intimisme quotidien, à poursuivre
· Il y a presque 6 ans ·scribleruss
Il y a de forte chance que notre "Emma" soit le sujet d'autres nouvelles ;)
· Il y a presque 6 ans ·Lev Hamels
Curieuse, cette nouvelle. Un très long paragraphe, qu'il faut lire, je suppose, d'un seul trait, puis juste une question, comme en suspens, On attend la suite... Mais de suite il n'y a pas et on réalise alors que l'intérêt du texte, c'est justement ce long paragraphe quel'on avait à peine survolé. On le relit alors, et cette petite tranche de vie anodine se met à résonner avec des choses que l'on a, nous aussi, vécues. J'aime beaucoup.
· Il y a presque 6 ans ·Serge Boisse
Merci beaucoup ! C'est exactement ce que je voulais rendre : Des détails anodins qui, mis ensembles, révèlent le sens du texte
· Il y a presque 6 ans ·Lev Hamels