la bataille des dix mots

campaspe

A l'occasion de la semaine de la langue française et de la francophonie, il a été proposé d'illustrer dix mots en moins de 1000 caractère. Voici nos propositions .

Vingt cinq secondes

Il s'était arrêté devant le haut et lourd portail qui, largement ouvert, donnait accès à une allée de gravier blanc au bout de laquelle une vaste villa coloniale était à peine visible. Les lumières du salon de réception n'étaient que lumerottes qui perçaient à peine la nuit. Il drachait, les grosses gouttes  ressemblaient à une poudrerie hivernale lorsqu'elles tombaient dans la lueur de prétentieux réverbères. L'adolescent devinait tous ces champagnés, méprisables occidentaux en tenues de soirée, femmes aux visages chafouins outrageusement maquillées, qui devaient déambuler coupe de champagne ou tasse de ristrette en main. Le dépanneur de son quartier n'avait pas posé de question lorsqu'il lui avait demandé ce matin un sac de 5 kilos de clous et une bonbonne de gaz. Ce fada, vigousse, l'avait même aidé à bien les caler dans son tap-tap. Il régla le retardateur sur vingt cinq secondes et s'engagea à fond de première dans l'allée. 

Signature

Emile rigolait en  sortant du dépanneur du coin, un calendos coulant et odorant dans la poche. «Ah j'suis pas habillé pour ! Pas d'cravate ! Band'de cons !» A l'intérieur du chaix les champagnés, notables et pique-assiette, se disputaient canapés, verres de vin ou ristrette en gobelets plastique. Le mariage entre Mercurial et TrustAndWine Indonesia allait être scellé. Pour l'occasion ce fada de Charrieux, propriétaire vigousse et rusé, avait fait sortir un tap-tap ramené d'Haiti on ne sait quand ni comment et l'avait fait décorer à l'indienne. Il voulait parapher le contrat au côté du vénérable PDG asiatique, assis tous deux à l'arrière de cet improbable véhicule… «Va voir le lien avec l'Indonésie. Connard ».  Il drachait et le ciel noir annonçait une belle poudrerie pour dans pas longtemps. Émile, chafouin,  s'appliqua à tartiner la banquette avec son fromage moulé à la louche. Les lumerottes du triporteur clignotèrent à cet instant, semblant lui faire un clin d'œil complice.

L'accident

Marie était furieuse contre ces champagnés complètement  fadas qui décrètent des itinéraires sans réfléchir. Résultat : il avait draché pendant deux jours d'affilée, puis neigé, rendant les accotements instables et la route glissante. Pas surprenant  que dans la descente le tap-tap se soit embourbé !  Le chauffeur et les passagers essayèrent de le dégager. Mais que pouvaient faire deux femmes et un homme, même vigousse ? Prenant son mal en patience, Marie retourna à  sa place, s'installa confortablement et, pour se réchauffer, vida dans son ristrette la mignonnette de rhum achetée chez le dépanneur. Soudain, un petit personnage portant une lumerotte,  habillé d'un justaucorps vert, à la coiffure touffue et à l'air chafouin  apparut dans la pénombre. Un appel et des dizaines d'autres lutins sortirent  de cette poudrerie ! Marie ne sut jamais comment le car était reparti, et se demanda longtemps  si elle avait rêvé ou si le ristrette parfumé pouvait expliquer cette aventure.

Vacances

Cela faisait deux jours qu'il drachait et seule, assise à sa fenêtre, Eva sirotait mélancoliquement son ristrette : elle serait bien partie quelques jours au ski, mais aucun de ses amis ne pouvait l'accompagner : Luc le dépanneur ouvrait sa boutique toutes les nuits. Franck, le chauffeur de tap-tap était tout le temps en déplacement, Louis, le champagné au visage chafouin réservait  ses soirées pour des réceptions. Elle rêvait d'un  grand gaillard vigousse avec lequel elle pourrait dévaler les pistes en pleine poudrerie et diner le soir près de la cheminée. Soudain une lumerotte s'alluma dans son esprit : elle allait partir seule. Ce serait bien le diable si elle ne trouvait pas son bonheur sur place ! Cette idée un peu fada la remit de bonne humeur et elle alla préparer sa valise.


  • Ah ! Il était bien un peu fada ce dépanneur-là, mais pour sûr, lorsqu'il avait ouvert les portes de son tap-tap, sa caverne aux trésors, toutes les femmes des champagnés accouraient. Et pendant que leurs maris buvaient la ristrette, elles ne se souciaient guère qu'il drachait pourtant assez fortement ma foi, pour crotter leurs jupons, qu'elles relevaient sur leurs genoux, laissant voir qui, des dentelles, qui des rubans coquins.
    Le dépanneur bien vigousse heureusement, était obligé de freiner leur entrain afin d'éviter d' être submergé.
    Ces dames avaient laissé bien en arrière leurs visages trop chafoins de l'après-midi. E c'était à qui se disputerait le grand miroir mis à disposition pour essayer maints colifichets, maintes crèmes, et autres poudres pour leur teint.
    Et ce fut, bientôt, la grande poudrerie sous la lumerotte bien faible de la carriole du fada.

    · Il y a plus de 8 ans ·
    Louve blanche

    Louve

    • Le concours est terminé depuis bien longtemps mais j'ai eu beaucoup de plaisir à caser ces mots.

      · Il y a plus de 8 ans ·
      Louve blanche

      Louve

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