La fille aux lucioles

Sandra Lisabois

« Nous arrivons dans la Forêt Noire ».

A l’évocation de ce nom, Manuel sortit de sa rêverie et porta ses yeux vers le paysage qui déroulait ses lignes derrière la vitre de la fenêtre. Le véhicule filait à grande vitesse, et pourtant les collines escarpées surplombées d’épicéas semblaient figées dans le lointain, comme si elles annonçaient qu’elles resteraient là quoiqu’il arrive. Comme à chaque fois qu’il voyait cette étrange silhouette, son cœur se serra et il dû respirer profondément pour calmer la tension qui se manifestait soudain. Cette angoisse était ancrée en lui, sans qu’il ne puisse rien y changer. Chacun avait peur de cette forêt et cela lui paraissait logique de la redouter, même s’il ne s’était jamais rien passé d’extraordinaire lors de ses différentes traversées.

A côté de lui, sa mère poussa un soupir et jeta un coup d’œil vers son mari, l’air également inquiet.

« Je suppose que nous allons bientôt nous arrêter. On ne doit plus être loin du routier maintenant… 

- Oui. Il faudrait vraiment qu’on arrive un jour ou l’autre à solutionner ce problème de batterie. »

Le silence retomba dans la cabine, entrecoupé des ronronnements du moteur qui peinait à grimper les premières pentes du massif. L’autoroute avait allègrement taillé son chemin dans le gneiss et formait une immense balafre qui s’étirait d’Est en Ouest, contournant par d’amples virages les endroits les plus pentus. C’était l’une des autoroutes les plus longues du royaume, qui en comptait pourtant plusieurs centaines, mais même sa position stratégique n’en faisait pas une voie très empruntée : elle était réputée trop contraignante. Elle apparaissait démesurée dans le paysage, et Manuel ne comprenait pas qu’elle fût aussi large pour accueillir si peu de circulation. Son père croyait savoir qu’elle avait été construite en des temps plus prospères où de nombreux véhicules l’empruntaient quotidiennement, mais cela devait remonter à très longtemps.

Les moteurs commençaient à fatiguer sérieusement et certaines voitures du convoi peinaient même à avancer lorsque le relais routier apparut à l’horizon. Signalé par une bâtisse austère reléguée dans un coin à l’aplomb des pentes de la montagne, il s’agissait avant tout d’un espace défriché assez large pour accueillir une trentaine de véhicules. Il se prolongeait vers le Nord par une lisière arborée assez clairsemée qui annonçait la présence de la forêt quelques dizaines de mètres plus loin. A ce qu’il savait, il était impossible d’y accéder, car de puissantes clôtures délimitaient strictement l’emprise de l’autoroute, comme pour empêcher toute intrusion. Manuel s’était toujours demandé qui les grilles étaient censées protéger.

Une dizaine de bornes électriques attendait patiemment sur l’esplanade que quelqu’un vienne se brancher, ce que firent immédiatement les premiers véhicules du cortège. Maurice engagea son camion à la suite et, voyant qu’il ferait partie du dernier tour de charge, éteignit le moteur.

En soupirant, Manuel arracha sa ceinture et suivit ses parents qui se dirigeaient déjà vers le relais. Les ordres, ils le savaient, étaient de se restaurer et de satisfaire ses besoins de manière à ce qu’ils puissent repartir dès que le dernier véhicule serait en état de fonctionner. Pour la suite, ils ne s’arrêteraient que quelques minutes avant d’entrer en France, histoire de se préparer et d’arriver en faisant bonne figure. Il avait déjà hâte de repartir et de se soustraire à cette forêt.

« Prend de la ritanelle, on va en avoir besoin », lui souffla Maurice. Manuel fit une grimace et contourna le poids lourd, dont la partie intermédiaire entre la cabine et la réserve servait d’immense frigo. Cuisinier, Maurice s’était déplacé avec tout son matériel, qui se décomposait en trois grandes familles : les gamelles et ustensiles, les ingrédients et les accommodants.

Maurice était incontestablement le meilleur cuisinier du monde. Il faisait les pâtes mieux que personne, savait cuire, pétrir, glacer, mijoter, piler, mouler depuis qu’il était né et pouvait créer toute sorte de plats avec autant d’ingrédients que la nature et la technique avaient pu concevoir. Il accommodait les viandes, les volailles, les insectes et même les fruits de mer avec les légumes et les fleurs du jardin, ou encore des écorces qu’il faisait macérer avant de les transformer en feuilletés. Il pouvait sublimer les restes les plus médiocres par de savants mélanges de saveurs. Il avait été le premier à tenter les plats minéraux à base de coquilles et de poudre de roche, et le seul à arriver à un résultat sinon agréable au palais, au moinsmangeable. Mieux encore, certains de ses plats avaient de telles vertus qu’ils étaient préconisés en cas de douleurs et de contractions abdominales, ainsi que pour lutter contre certains types de migraines. Sa réputation n’était plus à faire, ce qui lui avait valu d’être embauché aux commandes des cuisines du roi lui-même, lui assurant une subsistance certaine.

Seulement, l’excellence imposait l’exigence, et Maurice avait développé un goût si aigu qu’il ne pouvait plus se satisfaire de manger comme monsieur-tout-le-monde. Il devait apporter sa touche personnelle à chaque repas, sans quoi il se sentait invariablement mécontent, quand il ne tombait pas carrément malade. La ritanelle constituait son mélange secret, palliant à toute déconvenue ; elle lui permettait de composer avec des repas qu’il n’avait pas lui-même préparé, donnant selon les dosages différents arômes qui embaumaient l’air.

Du coin de l’œil, le roi Thierry regardait l’agitation du camp et se satisfaisait de voir que tout allait pour le mieux. La Forêt Noire n’avait pas l’air d’avoir entamé le moral des troupes, même s’il supposait que ses gens faisaient de leur mieux pour cacher leur appréhension, habitués depuis qu’ils étaient mômes à craindre cette mystérieuse chaîne rocheuse. En effet, la forêt souffrait d’une affreuse réputation et de nombreuses légendes courraient sur elle. Les histoires de disparition, de brigands, de vols et de viols, avérées, s’enrichissaient de la présence de monstres et d’une sourde magie qui ne pouvait être contrôlée. A en croire les discussions des gens du coin et des voyageurs qui colportaient ces nouvelles dans tout le royaume, des créatures étranges y avaient élu domicile et entendaient y rester tranquille. Thierry ne pouvait dire quelle part de vérité contenaient ces racontars. Ce qu’il savait, il le tenait de son père, qui le tenait lui-même du sien, et c’était finalement assez peu, des témoignages d’un temps où le roi en place avait cessé de vouloir soumettre le massif à son contrôle. Il savait en outre que cette forêt avait autrefois été habitée par l’homme. Des routes qui la sillonnaient, seule subsistait l’autoroute A666, entretenue autant que faire se peut pour permettre la traversée du massif rhénan. Des incidents, souvent des bizarreries à vrai dire, arrivaient de temps à autre pendant les traversées et ajoutaient au mythe. Personne ne comprenait les règles étranges qui régissaient ce monde, et il était parfois dur de s’y plier. Thierry réfléchissait de plus en plus à prendre les choses en main, mais cela devrait attendre qu’il en ait le temps et l’énergie.

Il regarda en direction des voitures, vit que la deuxième série venait d’être branchée. Il pesta entre ses dents, enrageant de perdre son temps si inutilement. A chaque voyage, dans un sens ou dans l’autre, quel que soit le nombre de véhicules, leur état, leur chargement ou le nombre de pièces de rechanges, les batteries du cortège rendaient l’âme. Toujours au même endroit. Toujours la même panne. Toujours… Comme si la forêt avait voulu stopper là toute intrusion en son sein. De nombreuses explications avaient été avancées, de la part des géologues, des physiciens, et même des philosophes, mais aucune n’avait pu conduire à une solution efficace. Malgré les ingénieux systèmes mis en oeuvre, les batteries continuaient de tomber en panne les unes après les autres. Rien ne fonctionnait, hormis installer des chargeurs en nombre suffisant et prier pour qu’il n’arrive rien de fâcheux.

Thierry rejoignit sa femme, la belle Lisbeth de Moscova. Assise à une table expressément érigée pour elle, la reine prenait son repas. Il s’installa à côté d’elle en lui souriant. Fruit d’une alliance fortuite commandée par son père, leur mariage n’avait rien de malheureux, et Thierry se basait sur cet état de fait pour commander à son tour une union qui l’arrangeait : celle de son fils Luc avec Alix de Lille, héritière des anciennes provinces de France et de Normandie. Les tractations étaient bien engagées, mais la mère de la riche princesse avait fait valoir la candidature d’un autre courtisan, venant des îles du Nord. Il était vite apparu nécessaire de se rendre directement sur place – sans précipitation, pour ne pas paraître désespéré, mais sans retenue, pour ne pas donner l’impression que la fille était un second choix. La susceptibilité des rois était décidément bien mal placée.

C’est ainsi qu’il avait tout préparé, en accord avec son épouse qui approuvait son choix. Lisbeth devait se rendre en villégiature dans un petit village de France, en compagnie de sa mère, une femme que le roi trouvait inutile et insolente. A Beaufou, le beau gratin de la bourgeoisie française serait présent et il s’agissait de les impressionner de la meilleure des manières, de sorte que leur réputation parvienne aux oreilles des parents d’Alix. Le prince Luc accompagnerait la reine sur la route des vacances, prêt à parer à une éventuelle agression, jouant le rôle de prince servant. Arrivé à bon port, il pourrait alors poursuivre son chemin jusqu’en Bretagne, où des villageois dotés d’une grande force résistaient depuis toujours aux forces armées, alliés des hommes des îles du Nord. En les battant, il ferait d’une pierre deux coups : il décrédibiliserait son rival tout en prouvant sa valeur.

Lorsqu’il en avait parlé à ses conseillers, le plan avait apparu à la fois trop réducteur et très ambitieux. Pour eux, porter son attention sur un aussi petit royaume quand on était aussi puissant était une perte de temps et un gâchis de matière première – et de fait, il devait reconnaître que son unique rejeton ne pourrait pas se marier plus d’une fois. En outre, espérer gagner une guerre perdue depuis toujours relevait d’une utopie et pourrait très rapidement s’avérer catastrophique si le prince héritier venait à y perdre la vie.

En réalité, ce mariage était la seule alliance que le roi Thierry pouvait envisager : empêtré dans des conflits à l’Est, il lui fallait la main d’Alix, l’allégeance de son père et les richesses de ses terres. Il avait tout anticipé, prévoyant le moindre détail, prêt à élaborer une nouvelle stratégie en cas de faille, décidé à rebondir en cas d’échec. Néanmoins, il ne s’estimait pas à l’abri d’un imprévu et restait vigilant à tout signe de dérapage.

Dans le relais, la salle était comble mais les discussions étaient peu enjouées. Chacun s’occupait de mâcher ce qu’il avait récupéré dans les conteneurs prévus pour le repas et déglutissait tant bien que mal, Maurice le premier. Même la ritanelle n’avait pas beaucoup d’effet ce jour-là, et il sursauta quand l’intendant Geoffrey lui tapota sur l’épaule. Tout de noir vêtu, comme à l’accoutumée, l’homme avait toujours eu un air d’oiseau de mauvais augure qui amusait et perturbait Manuel tout à la fois.

« Maurice, ça va être à ton tour ».

« Ok, j’y vais ». Maurice avala la dernière bouchée de son sandwich, s’essuya prestement la bouche avec la main et se dirigea vers la sortie, les clefs déjà en main. Il ne laissait jamais le soin à quiconque, à part Mathilde et Manuel, de toucher à son camion, il craignait trop que quelqu’un vienne en douce lui substituer ses précieux trésors.

Rassasiée, Mathilde sourit devant son fils qui engloutissait bouchée sur bouchée. A vingt ans, le garçon ressemblait comme deux gouttes d’eau à son père, arborant la même tignasse brune et le même nez aquilin. Seuls, ses yeux avaient pris la couleur claire de sa mère, changeant de teinte selon le temps et l’humeur du jeune homme. Sa présence avait la même valeur rassurante pour Mathilde, et elle ressentait actuellement un fort besoin d’apaisement. Se levant, Manuel prit leurs trois couverts et entreprit d’aller les rincer, prenant à la volée deux fruits qu’il mit dans sa poche. Mathilde le regarda s’éloigner, remarquant une nouvelle fois à quel point sa stature et sa démarche tenaient de celles de son père. Elle sentit une bouffée d’amour l’envahir, qu’elle réprima du mieux qu’elle put. Son regard rencontra celui de Blanche, la femme du couturier. Se levant à son tour, elle la rejoignit et entama la discussion, en attendant que le temps soit venu de repartir.

A l’appel de l’intendant, Manuel et Mathilde coururent vers le camion, contents de repartir. L’atmosphère de la Forêt leur semblait maintenant plus que pesante et ils avaient hâte de prendre l’air.

« Maurice, vite, on part ! »

Mathilde contourna la cabine, attrapa la portière. Celle-ci resta bloquée.

 « C’est fermé ? 

- Eh maman, regarde, c’est bizarre, le camion est encore branché. »

Le sourire de Mathilde s’éteignit soudain.

« S’il ne se dépêche pas, on va avoir des problèmes », souffla-t-elle.

En effet, les voitures commençaient à se mettre en ordre de marche. La limousine du roi et de la reine enchaînait manœuvre sur manœuvre, peinant à tourner. Mal à l’aise, Manuel vit l’intendant se diriger dans leur direction d’un pas pressé. Son air sévère ne présageait rien de bon.

« Que fait Maurice ?

- Il… Il est sûrement aux toilettes, ou parti vérifier quelque chose, tenta Manuel.

- Il devrait être là. Il connaît les ordres.

- Geoffrey, il va arriver, c’est l’histoire d’une minute ou deux. Tu le connais, il déteste cet endroit autant que nous. S’il n’est pas là, c’est qu’il y a une bonne raison. Laisse-lui le temps de revenir, de toute façon, que veux-tu y faire ? »

Mathilde essayait d’adopter une voix rassurante pour gagner du temps mais elle commençait à s’inquiéter.

« Il risque l’amende pour ça.

- Et il le sait. De toute façon, on n’a pas les clefs. »

L’intendant se pencha et tenta de ranger les câbles qui maintenaient le camion lié à la borne dans une pochette attenante au réservoir. Manuel fit un pas en arrière en regardant autour de lui.

« Je vais voir si je le trouve, il ne devrait pas être loin. »

En effet, l’espace alloué au relais routier était étroit et les nombreuses voitures présentes sur le parc de stationnement ne laissaient guère de place pour se perdre. Cependant, il avait beau regarder en tout sens, il ne percevait pas la silhouette de son père et n’aurait même pas pu dire dans quelle direction il était parti. Il se dirigea vers les bois, franchit les premiers arbres et se heurta rapidement à une clôture qui semblait être là depuis des siècles tant elle était en mauvais état. Il l’inspecta brièvement, nota les trous qui parsemaient le grillage. Ils devaient constituer un passage privilégié pour la faune mais un homme n’aurait pas pu franchir cette limite, pas sans le vouloir en tout cas.

Il perçut du bruit derrière lui, se retourna, vit un attroupement autour du camion et de sa mère. Des appels se firent entendre - « Maurice ! Maurice ! » - des voix d’hommes et de femmes tout à la fois, mêlant colère et supplications. Le groupe se disloqua peu à peu, certains se dirigeant vers le bâtiment du relais routier, d’autres vers la forêt ou même l’autoroute, tandis que les derniers restaient sur place. Sa mère le rejoignit d’un pas rapide. Dès qu’elle fut à ses côtés, Manuel put voir qu’elle tremblait, mais il n’aurait pas su dire si c’était à cause de la honte que cette situation lui causait, de sa colère retenue ou de l’inquiétude qu’elle pouvait éprouver. Peut-être tout cela à la fois.

« Je ne le vois pas partir seul vers la forêt. Il n’aurait pas été aussi imprudent, pas ici et pas maintenant en tout cas.

- Maman, calme-toi. Il y a sans doute une bonne explication et il nous la fournira quand il reviendra ?

- S’il se sort de cette situation. Le roi est venu voir ce qu’il se passait.

- Ca craint vraiment alors. »

Mathilde se pinça le nez, stressée et agacée. Elle ne savait plus quoi penser. Dix minutes s’étaient déjà écoulées et c’était trop, beaucoup trop pour aller simplement se soulager contre un buisson.

« Mais il est où, bon sang ? Maurice ? »

Elle se remit à marcher, longeant la clôture qui bifurquait pour s’éloigner du routier. Manuel la suivit sans mot dire, se demandant ce qui avait bien pu se passer. Il commençait sérieusement à prendre peur, et entendre sa mère appeler son père d’une voix stridente sans que celui-ci ne daigne se montrer ne le rassurait pas du tout. Il envisageait plusieurs raisons à cette disparition, mais aucune ne semblait rationnelle, partant du fait qu’on se trouvait au relais routier de l’A666. Une fugue sous la pression du travail, une désertion familiale, un accès de colère, une perte de connaissance, un accident… tout cela n’avait aucun sens sans voiture, sans dispute, sans corps inconscient étendu sur le bitume. Pour lui, seule la proximité de la Forêt Noire pouvait expliquer quelque chose, mais quoi ? un enlèvement ? un meurtre ? Pourquoi ? Par qui ? Pouvait-il simplement avoir disparu, se volatiliser comme cela sans crier gare ? Pouvait-on le retrouver ou fallait-il juste rebrousser chemin, comme on avait coutume de le dire, en espérant le voir réapparaître un jour ?

Il commença à trottiner devant Mathilde, prenant de l’avance. Très vite, alors qu’il pénétrait sous le couvert clairsemé des arbres, il se rendit compte que les cris s’étaient estompés, ce qui ne lui semblait pas naturel au regard de la faible distance qu’il avait parcouru. Alors qu’il se retournait vers sa mère pour lui faire part de son observation, son œil fut attiré par une ouverture dans la clôture. Il l’atteignit en deux pas et scruta la forêt qui prenait véritablement naissance au-delà.

« Tu ne vas pas y aller tout de même ? entendit-il frémir sa mère dans son dos.

- Je regarde… je pourrais peut-être juste jeter un coup d’œil…

- Tu es fou ! Et s’il t’arrive quelque chose ?

- Je ne sais pas si on a vraiment le choix, maman. Il faut bien qu’on le retrouve.

- Mais si tu disparais toi aussi ? »

Manuel contempla la brèche devant lui, hésitant sur la marche à suivre. Un regard en arrière, sur l’agitation du relais et les gesticulations du roi, le convainquit de faire au plus vite, et il s’avança vers la forêt d’un pas incertain, tandis que Mathilde restait en arrière. L’obscurité ambiante lui fit plisser les yeux, et il dut s’arrêter le temps de s’habituer à cette nouvelle luminosité. Focalisant son regard par terre, il vit des traces de pas, très peu marquées. Deux personnes, éventuellement trois, s’étaient dirigées vers la forêt depuis cette même brèche qu’il avait franchie quelques secondes plus tôt. Continuant son chemin, il s’arrêta de nouveau au bout de quelques dizaines de mètres, figé. A ses pieds, le sachet de ritanelle de son père gisait au milieu de débris de verre à la couleur indéfinie et mouvante. Il le ramassa lentement et, le retournant, vit qu’il était tâché de sang.

Il ferma les yeux, glacé, la peur au ventre, craignant de comprendre, et c’est alors qu’il entendit un cri affreux, inhumain. La forêt et les pierres autour de lui se mirent à trembler, comme si elles entraient en résonance avec le son guttural. Le cri était proche, bien trop proche. Il se mit à courir droit devant lui.


SYNOPSIS

Maurice Gaudin, le cuisinier du roi, sa femme Mathilde et leur fils Manuel font partie du cortège royal qui se dirige vers la France. Lors de l’arrêt obligatoire au relais routier de la Forêt Noire, au bord de l’autoroute 666, Maurice disparaît. Manuel se lance à sa recherche.

Effrayé par un cri inhumain, Manuel s’enfuit dans la forêt. Perdu, il cherche à retrouver la piste de Maurice et découvre ce faisant la Forêt Noire et ses illusions. Ses pas le conduisent à une jeune fille, Aurore, qui s’avère prête à l’aider dans ses recherches. Le conduisant à travers des chemins détournés, elle le ramène sur l’autoroute où elle lui fausse compagnie.

Au relais, chacun s’impatiente et va de sa propre hypothèse sur la disparition de Maurice. Les recherches s’organisent sous la pression du roi qui, sans le cuisinier, voit ses plans de mariage s’écrouler. Le convoi finit par repartir et quelques hommes, dont le prince, sont laissés en arrière pour tâcher de le retrouver.

Manuel décide de reprendre ses pérégrinations dans la forêt plutôt que de remonter au relais. Il retombe rapidement sur l’endroit où il a rencontré Aurore et se rend compte qu’elle l’a manipulé depuis le début. Il parvient cependant à suivre une sente conduisant à un manoir en ruines, dans lequel il finit par être pris au piège.

Manuel désespère de pouvoir se tirer du traquenard dans lequel il s’est mis. Alors qu’il perd espoir, Aurore réapparaît. Prise de remords devant la tournure que prennent les événements, elle se décide à l’aider.

Aurore conduit Manuel, méfiant, jusqu’à une maison camouflée dans la forêt. Manuel y retrouve son père en compagnie d’un vieillard. Les deux hommes sont au chevet d’un jeune garçon.

Manuel tient enfin l’explication de la disparition de son père et, ensemble, ils tentent de trouver un remède pour guérir le garçon. Alors qu’ils mettent en œuvre leur idée, le prince Luc et ses soldats arrivent, guidés par les indices que Manuel a délibérément laissés derrière lui.

Lorsqu’il apprend la raison pour laquelle le cortège a pris du retard, le prince Luc perd patience et exige de repartir immédiatement, en dépit de la nuit qui commence à tomber. L’insistance et l’insolence du vieillard conduisent à son lynchage et sa maison est incendiée. Le prince repart en le laissant pour mort, emmenant Aurore prisonnière.

Conduite dans la limousine du prince, les choses se gâtent pour Aurore. Alors que le groupe repart, une créature de pierre percute l’immense véhicule et tire la jeune fille d’affaire, blessant grièvement Luc. Seuls Manuel et Maurice sont témoins de ce qui se passe. Manuel décide de repartir une nouvelle fois dans la forêt et finit par comprendre les raisons de cet enchaînement improbable des événements.

Sur l’autoroute, Manuel et son père tentent d’échafauder une histoire crédible qui pourrait expliquer la disparition du cuisinier et l’état du prince, et éventuellement sauver le mariage entre Luc et Alix. Ils souhaitent protéger la Forêt Noire et ses occupants de la colère du roi et du prince.

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