La lolita qui est en moi

dechainons-nous

Fin juin 75 j'ai commencé un job d'été, le temps ne sera pas aussi chaud que celui qui viendra l'année suivante mais la température est des plus clémentes et m'a incitée à sortir robes courtes et débardeurs.

Après le travail (j'en suis à mon troisième jour) l'équipe "suivi des sinistres" du cabinet de gestion immobilière m'invite à me joindre à eux pour prendre un verre.

 Dans le quartier très chic de la bourse, à leur contact je mesure mieux la frontière entre mes idées d'étudiantes emplies de révolutions à mener, de jeune fille découvrant le jeu de la séduction et un monde plus pragmatique se plaisant à se perdre dans les délires cinématographiques du moment, Emmanuelle et histoire d'O étant leurs principales sources de jouvence pour alimenter leur soif d'imaginaire.
Dans le groupe les garçons ne sont pas les seuls à ferrailler sur le sujet, les deux filles qui nous accompagnent ne cessent d'aguicher verbalement et d'émoustiller les hommes qui se plaisent à se vautrer dans ces provocations libertines.

En cette fin d'après midi la gare de Lyon a déjà un air de vacance, la foule de banlieusard se pressant vers les quais est moins dense que d'habitude. J'ai la satisfaction de voir que mon train est déjà à quai, j'ai toujours eu horreur de me mêler à la foule pour attendre l'arrivée de celui-ci.

Depuis toute petite je connais ces michelines gris acier, on y grimpait en courant avec mes frères et sœurs quand nos parents nous emmenaient pour faire les vitrines de Noël. Les banquettes vertes caca d'oie montées sur de gros ressorts qui vous font sautiller pendant tout le trajet et qu'on avait plaisir à amplifier le mouvement sous le regard désapprobateur de notre mère et le sourire bienveillant du père.

Le wagon n'est pas encore rempli, et j'ai un large choix pour m'asseoir, je me décide pour m'installer à côté d'une fenêtre entre ouverte et dans le sens de la marche. Sur la banquette juste en face de moi un homme, un quinquagénaire semble crouler sous le poids de ses ennuis et est assoupi. Je m'assois légèrement en biais tournée vers l'allée pour éviter que mes genoux ne touchent les siens.


Sur le quai le contrôleur siffle pour annoncer le départ imminent, quelques adeptes du just in time se hissent dans la rame contents d'avoir optimisé leur précieux temps.

Un jeune homme certainement étudiant si je me fie à la sacoche qu'il porte sous le bras vient s'asseoir à l' extrémité de la banquette en face la mienne. Le train quitte la gare et se faufile sur les interminables aiguillages en direction de la banlieue sud. Le bruit de roulement du train intensifié par la fenêtre ouverte s'ajoute aux secousses se répercutant dans les ressorts du siège, m'assourdit et je ne tarde pas à fermer les yeux et à goûter la fraîcheur de l'air dans mes cheveux.

Les trépidations continues m'ont fait glisser doucement sur le siège faisant remonter ma robe sur les cuisses, je m'imaginais dans une position impudique entrain d'offrir un spectacle indigne d'une jeune fille de bonne famille, je sentais monter en moi un plaisir d'exhibitionnisme que je n'avais jamais éprouvé, était ce les conversations avec mes collègues qui m'avaient émoustillée ou une libération de la femme qui s'épanouissait en moi ? J'ouvrais les yeux pour voir l'image du tableau qui se dessinait.

De l'autre côté de l'allée tout était tranquille, en face de moi le quinqua n'avait pas bougé d'un pouce, l'étudiant plongea son regard sur ses pieds, ses pommettes avaient rosi, plusieurs fois je recommencais et le même scénario se reproduisit, je n'avais aucune idée de ce qu'il voyait de moi. Profitant des secousses répétitives provoquées par le passage sur les raccordements des rails je relâchais les muscles de mes jambes les laissants suivre le balancement du train.

J'arrivais à ma destination, bien avant que le train ne ralentisse je me levais et allais attendre l'arrivée en gare devant la porte, un peu gênée me demandant ce qui m'avait pris. Le train ralentissait et s'alignait le long des quais, le jeune homme c'était approché lui aussi de la sortie.

Il avait l'air aussi mal à l'aise que moi, mais certainement poussé par une force mystérieuse il s'approcha près de moi et me dit à voix basse: " votre petite culotte blanche est très jolie, j'aimerais que vous me la donniez en souvenir ". Il n'y avait plus aucun doute sur le champ de vision qu'il avait eu, sans même le regarder je sentis mon visage s'empourprer, très gênée je suis descendue et m'éloignait rapidement.

Bien souvent après cette histoire, je me suis imaginée passant fébrilement la main sous ma robe et me déhanchant pour offrir mon trophée à ce jeune homme dont j'ai oublié le visage.

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