La messe des affamés

Corvus Corax

Ou la courte histoire des prières interdites



  Parfois des affamés, poussés par la famine, 

  Viennent parmi les joncs pour venir y goûter

  Quelques morceaux des anges, mais leurs yeux dégoûtés 

  Montrent à l'humanité que toute chair divine


  A trop de pourritures et de vers nécrophages.

  Mais moi, doux amoureux des carcasses sublimes,

  Je hume, lèche et caresse, ô si merveilleux crime,

  Toutes ces peaux putrides que j'aime à la rage. 



  J'en inspire les douces exhalaisons,

  Parfums si forts qui brûlent ma raison.

  Puis ma langue roule sur ses blessures,


  J'en aspire les eaux de ma luxure.

  Enfin mes doigts, enivrés de malice,

  Viennent à mes lèvres apporter des délices.


  Mes dents ravis de cette orgie,

  S'endorment alors dans ma bouche.

  

  Et mon esprit quitte sa couche

  Pour une noire liturgie :


 

 "   Saint pêcheur, soit en paix,

  Les anges sont tombés 

  Dans des marais épais

  Et y ont succombé.


  Une tombe de fange

  Pour les plumes du ciel,

  Une épitaphe étrange :

  "Qui fut fort est de fiel" 

 

   Ainsi soit-il

   Âmes infertiles "

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