La Question

Pierre Scanzano

voir ou revoir si la vie est un palier ou des marches à monter ou à descendre il ne manquent que les portes les verrous l'oeil de boeuf la targette la gâche rouillée un lieu d'avilissement  de retraite  un rectangle de ronces  de doigts  un lieu de vipères  d'écume sans bouches mais ce qui m'intrigue c'est l'avant du posthume  et l'après de l'avant du posthume presque le pendant n'est qu'un corps ou lune comme fruit mûr et inaccessible sinon la migraine de feuilles agitées par un noir désir de convulsion ou procrastination  la mort est blanche...

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mourir ou ne pas mourir c'est la question ce qui ne fait que confirmer le questionnement étant acquis qu'il n'est pas qu'une question de vie ou de mort où est-elle confinée ma mort? la vie de ma mort ? celle du corps préside la chair autrement dit de quoi de qui d'où et pourquoi mort? mystère et boule de gomme! la vision traître  les signes avant coureur de la recherche systématique d'un point fixe à la vie et d'un point nouveau à la mort... nous nous posons la question et celle-ci bien entendu en engendre d'autres... la réponse n'est jamais plus que la vitrification originelle   amenant à la question subliminale du confinement réel...

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ce que j'écris c'est sous la contrainte du corps sous le joug de sa majesté oeil mis devant le fait accompli de la mémoire soumis aux soubresauts du silence la cannelure tiède du silence mains et pieds liés dos au sens en face de l'irréel mais je suis arrivé à l'instant où la plénitude se résume à la trace du corps toujours en manque ce corps! de quelque chose qui est à l'origine de l'évasement du manque de quelque chose qui a manqué depuis le début quand enfin on le touche des doigts il y a ce goût d'improbable  et d'inachevé...

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où allons-nous ainsi désoeuvrés de source sans le vieux réflexe d'aller-retour oblitéré peut-être c'est aussi bien de retourner chez soi après y avoir manqué toute la vie alors sans y être réceptionnés comme des rois on sera bien reçu nourris blanchis passés au tamis du temps on passera entre les gouttes de la vérité un chez soi fictif et c'est un fait réel incompréhensible mais plausible  la question que je me pose n'a aucun fond ni de parois la question est comment se la poser sans faire de vagues suivies de tsunamis atroces féroces  je sais c'est l'insensibilité le manque de lucidité la mort lente des sens le laisser-aller doux...

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l'étreinte du sang m'indispose sa familiarité me débecte je veux l'indifférence les nuisances de l'amour liquéfient mon énergie cristallisent mon action je deviens lymphatique illuminé le taillis du sang abritait mon double maintenant je lorgne dans les souvenirs les reproduis à l'identique ma sécurité avant-tout dénué nu j'avance face au monde inconnu qui m'attend de pied ferme la question est l'éphéméride cruelle...  m'en sortir...  le hic c'est la gagne ou l'espoir...

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