La vie est belle.(1)

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Nous avions les cerises sur le gâteau, les pêches dans le Melba. Nous attendions avec impatience la chantilly sur la Split.

Betty adorait les desserts, et comme selon l'expression, elle 's'en foutait plein la lampe' quand on allait chez Marcus.

Marcus avait racheté le fond d'une ancienne station essence sur le bord de la nationale, et l'avait transformée selon les dires du village, 'en pompe à fric'.

Marcus attendait les beaux jours pour mettre son petit business en route, car durant l'hiver et selon lui, il aurait fallu vendre de la crêpe bien épaisse pour faire tourner la boutique sous la neige, et que la crêpe c'était pas trop son style.

Marcus avait transformé la station Fina, en cabane à glaces pour touristes. Les anciennes publicités de compagnies pétrolières annonçant '2 litres d'huile achetés, le 3ème offert' avaient été remplacées par '2 boules sur le cornet, la 3ème dans ton porte-monnaie'.

Marcus profitait des gens de passage comme du soleil dans une météo incertaine : il ouvrait en terrasse coûte que coûte ses parasols, et tapissait d'optimisme les gros nuages qui stationnaient sur sa boutique :

« - Tiens, on dirait qu'il va faire soleil aujourd'hui ! disait-il à ceux qui se tâtaient encore entre une simple ou une double sous la pluie.

- Vous croyez ?

- J'en suis sûr ! J'ai les frigos qui s'accélèrent ! »

Marcus avait le don de convaincre. Sa nonchalance acquise et son optimisme sur la vie en général, faisaient de lui un être pour qui un train aurait pu passer dessus sans trop faire de la bouillasse d'équidé: il semblait bâtit comme de la pierre et sentait bon la rassurance.

A La Dépêche du Midi venue l'interviewer pour remplir ses pages « Quoi de neuf près de chez vous cet été», il concluait l'article par « Avant, les gens ils venaient ici en bagnole pour faire le plein sans trop savoir ou aller en vacances... et maintenant ils viennent de par le monde pour manger mes boules ! Elle est pas belle la vie ? ».

Marcus avait obtenu un sacré petit bonus de la transition écologique : autant dire que sa boutique ne lui avait pas coûté un poil de couilles.

« Quand j'ai dit au Maire que j'allais faire des 2 vieilles pompes sur la 4 voies un engagement citoyen, il a tout de suite dit oui au projet et m'a obtenu un paquet d'aides... autant d'aides que pour fabriquer une Mégane ! » et d'ajouter « On se demande où ils le mettent le moteur chez Renault, hein ? »

Marcus vendait à la boule, ce que d'autres vendaient au poids :

« Glacier, c'est quand même un métier où tu vends au kilo un truc qui pèse 3 fois rien ! Quand on pense que dans une boule il y a un minimum de 50 % d'air... faudrait être vraiment con pour pas la trouver belle ! »

« Qui ça ? » demanda Betty.

« Ben la vie ! »


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