L'amour mironton

violetta

L’amour mironton

Un couple. Un salon.

Elle : Chéri, tu as réparé la fuite du lavabo ?

Lui (marmonnant, en train de lire son journal) : Hum ? Non, pas encore.

Elle : Ca fait 8 jours que je te le demande ! Tu aurais pu trouver le temps, tout de même !

Lui (soupir)

Elle (s’asseyant sur l’accoudoir du fauteuil, lui passant le bras autour des épaules) : Ecoute mon chéri… Si tu répares cette fuite tout de suite, je te fais quelque chose que tu adores et que je ne t’ai pas fait depuis longtemps…

Lui (levant les yeux de son journal, un sourcil levé) : Tu ferais ça ?...

Elle (charmeuse) : Oui, bien sûr…

Lui (se levant) : Ah, mais c’est que ça change tout !

Elle (battant des mains) : Je me doutais que ça te ferait plaisir ! (minaudant) Je suis prête à faire cet effort.

Lui (un peu contrarié) : C’est si difficile pour toi ? Je préfère que ça te plaise aussi…

Elle : Mais si, ça me plaît ! Il faut juste que je m’y remette, c’est tout !

Lui : Ah ça, c’est vrai que ça fait longtemps !

Elle (soucieuse) : Tu as peur que je ne sache plus ?... (enjouée) Ecoute ! Je regarderai dans mon livre, tu sais, le livre que Maman m’a offert quand on s’est mariés !

Lui (interloqué) : Un livre ?... Ta mère ?...

Elle : Mais oui ! C’est très bien expliqué, il y a toutes les étapes en photo et des explications très claires. (Comme il reste bouche bée, elle le pousse avec entrain) : Allez mon chéri ! Vas-y. Pendant ce temps-là, je prépare tout. Et surtout, ne viens pas avant que je t’appelle !

Lui (émoustillé, pressant) : Tu ne vas pas changer d’avis, tu es sûre ?

Elle (la voix suave) : Fais-moi confiance, mon chéri, tu ne seras pas déçu… Allez, au boulot ! (elle le repousse)

Il se dirige vers la salle de bain en se frottant les mains, ravi, tandis qu’elle entre dans la cuisine. En chantonnant, elle met son tablier, ouvre son livre de cuisine et feuillette les pages :

Elle : Ah ! Voilà : Paupiettes de veau… Alors, il faut….gnagnagna… faites revenir…. gnagnagna… du thym… (s’exclamant brusquement à haute voix) : Ah ! Flûte !

Lui (voix en provenance d’une autre pièce) : Qu’est-ce qui se passe ?

Elle (haussant la voix pour se faire entendre) : Ils disent que c’est mieux avec des carottes et je n’en ai pas. Tu pourras t’en passer ? Ca devrait être bon quand même…

Lui (toujours depuis l’autre pièce, d’une voix hésitante, un peu perplexe) : Euh… Oui, sûrement… On s’en est toujours passé, d’ailleurs…

Rassurée et joyeuse, elle s’agite au milieu de ses casseroles.

Il a terminé sa réparation et revient dans le salon.

Lui : Ca y est, c’est fait. Chérie ? Où es-tu ?

Elle (à travers la porte fermée, comme une évidence) : Ben, dans la cuisine !!

Lui (en aparté) : La cuisine ?!... Après tout, si ça l’amuse… (à haute voix) Je peux venir ?...

Elle (affolée) : Attends un peu ! Juste une minute ! (elle ajuste son assaisonnement et claironne joyeusement) : Ca y est ! Tu peux entrer !

Hilare et impatient, il entre et s’arrête médusé en la voyant en tablier au milieu de ses casseroles.

Lui (bredouillant) : Mais, qu’est-ce que tu fais ?...

Elle (victorieuse, en soulevant le couvercle de sa marmite) : Des paupiettes de veau !

Lui (déçu, ébahi) : Mais… mais… mais…

Elle (navrée et volubile) : Oh mon Dieu ! Tu es déçu ! Tu aurais préféré une blanquette ! Mais je n’avais pas le temps, ça cuit trop longtemps, je ne voulais pas te faire languir…

Lui (avec douceur et patience) : Ne t’inquiète pas, c’est très bon les paupiettes… Et puis que dirais-tu… après le dîner ?... (il s’approche d’elle et l’enlace)

Elle (jetant les bras autour de son cou) : Oh ! Petit polisson !... (mais elle s’écarte de lui) Mais n’oublie pas ce qu’a dit le docteur !

Lui (un peu assommé, c’est vraiment la douche écossaise) : Le docteur ?

Elle (levant un doigt docte comme pour faire la leçon à un enfant) : Ne fais pas semblant de ne pas t’en souvenir ! Il t’a interdit de prendre du cognac après le repas, c’est très mauvais pour ton estomac.

Lui (au bord du découragement complet) : Mais écoute… Je…. mais je ne parlais pas de ça !

Elle (sincèrement étonnée, les bras ballants le long de son tablier) : Ah bon ?...

Lui (attendri, la prenant par la main) : Allez viens… Les paupiettes nous attendrons. J’ai d’autres projets dans l’immédiat…

Elle (résistant vaguement) : Venir où ça ?...

Lui (souriant) : Dans la chambre…

Elle (comprenant enfin) : Mais alors… depuis tout à l’heure, tu avais compris que… que je te disais que ?... qu’on allait ?...

Il approuve de hochements de tête, en souriant

Elle (confuse) : Mais qu’est-ce que tu as dû penser de moi !!

Lui : J’ai adoré… Allez, viens…

Elle (vaincue) : Attends… J’enlève mon tablier.

Lui : Non… Garde-le… Et puis après tout, on n’a qu’à rester dans la cuisine.

Elle (troublée et protestant pour la forme) : Oh ! Et elle tombe dans ses bras.

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Extrait du recueil "Ainsi va la vie" déposé à la SGDL

  • Joli échange de compréhension décalée! Mais, dites, pendant qu'ils... enfin qu'ils... Eh bé, les paupiettes vont refroidir... Bon, enfin ...

    · Il y a plus de 10 ans ·
    Oiseau... 300

    astrov

    • Les paupiettes réchauffées, c'est mieux que l'amour réchauffé, non ?...

      · Il y a plus de 10 ans ·
      Evelyne lagarde clio 6 redim

      violetta

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