L'argent...

Dominique Capo

Pensée

Il n'y a pas besoin de posséder beaucoup d'argent pour vivre heureux, épanoui, serein, détendu, en accord avec soi-même et avec les autres. Il n'y a pas besoin d'en accumuler plus que l'on ne pourra jamais dépenser dans toute vie pour se sentir en sécurité.  

D'ailleurs, je ne suis pas riche, et si je n'ai aucune morgue envers ceux qui en ont, je ne les envie pas non plus. Si je n'en n'ai pas beaucoup, je n'en n'ai aucune rancœur, il ne suscite en moi aucune concupiscence, je ne lui voue aucune haine, aucune fureur, aucune aversion. Je ne suis pas tenté d'en posséder davantage non plus. Il ne réveille aucun désir. Et si des pensées de cette sorte me traversaient un jours l'esprit, je me sentirai immédiatement honteux, humilié, sali, déshumanisé. Je me répugnerai moi-même, le respect et les valeurs que je porte en seraient altérés...

Ceux et celles qui croient que l'argent peut tout acheter, peut tout résoudre, peut nous libérer de nos démons intérieurs, de notre passé, de nos blessures, de nos faiblesses, ou de nos défauts se trompent lourdement. Au contraire, lorsque nous nous laissons dominer par lui, lorsque nous lui donnons une place trop importante dans notre existence, lorsqu'il nous fascine au point que toutes les valeurs qui sont les nôtres tournent autour de lui exclusivement - ou presque -, c'est lui qui devient notre maitre, et non le contraire.  

Il nous soumet, il fait de nous un esclave. Il devient une drogue aussi détestable, aussi méprisable, aussi brutale, aussi destructrice... que l'ensemble des narcotiques dont certains égarés ou désespérés dépendent. Il fait de nous son jouet, son valet, son subordonné. Jamais le contraire. C'est nous, et nous seul, qui lui avons offert cette autorité, cette aptitude, sur un plateau d'argent.

Nous nous sommes laissés domestiqué, assujetti, dompter, par lui, et non le contraire   Quand il devient la priorité, quand il devient ce que nous idolâtrons, quand il devient l'axe autour duquel nous nous construisons, quand nous n'en n'avons jamais assez, il est déjà trop tard : c'est qu'il a fait de nous un prisonnier - parfois volontaire, parfois non - ; c'est qu'il a fait de nous un aliéné, c'est qu'il a fait de nous un inférieur face à ce que nous considérons à tort être sa toute puissance. Il nous a domestiqué, nous sommes prêts à tous les reniements, à toutes les bassesses, à tuer si c'est nécessaire, pour qu'il continue à demeurer notre maitre.  

Il réveille en nous nos instincts les plus bas ; rarement les meilleurs. Car ce son ceux, justement, qui ne lui donnent pas autant de valeur, d'ascendant, que la grande majorité des gens lui accordent, qui s'en servent pour se libérer de ses contraintes. Qui l'utilisent à de charitables, de généreuses, de productives, de désintéressées, fins.

Et pour cela, il n'est pas utile d'être riche à millions ou à milliards. C'est dans notre regard, c'est dans notre appréciation, à son égard, que notre comportement vis-à-vis de lui que se dévoile.   C'est parce que nous sommes détaché des illusions, des faux-semblants, de la vanité, de l'orgueil, de l'égoïsme, ... dont il est le vecteur, que nous pouvons en user raisonnablement.

Sans qu'il nous écrase, sans qu'il nous étouffe, sans qu'il nous obsède, sans qu'il nous possède, tout le long de notre existence. Sans que, et peu importe que nous soyons aisé ou pauvre, il régisse qui nous sommes, ce que nous désirons faire ou être, sans qu'il nous tyrannise ou nous subjugue.  

Car, l'argent n'est qu'un outil, ni plus ni moins. Il n'est que cela, ne vous y trompez pas. Et celui qui dit que ce n'est pas vrai, qu'il est bien plus que cela, en a déjà fait son seigneur. Il est aveuglé par lui ; il l'a perverti ; il l'a avili. Et il est condamné à participer de son plein gré à la déliquescence de notre modèle de société. Il collabore aux fantasmagories et aux mensonges de notre civilisation sur le déclin...

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