Le Ballon ou Comment Savoir ?
achlydes
Le Ballon
ou
Comment Savoir ?
Des cieux d'où j'assiste à la scène que puis-je comprendre à ce que je vois ? Comment savoir si ce que je déduis de ce que je vois est juste ou pas ? Comment savoir s'il ne s'agit pas de simples spéculations ? De pures spéculations nées d'une imagination trop fertile. Comment savoir si mes filtres de perceptions ne tendent pas à me rendre logiques ce qui ne l'est peut-être pas ?
Comment savoir si je ne suis pas le jouet du hasard ? Si au travers de ce qu'il me présente, ne me soumet-il pas à une réflexion qui n'a pas lieu d'être ? Ces trois personnes sont-elles à proximités par hasard ? Ou est-ce volontairement qu'elles le sont ? Ces trois personnes se connaissent-elles ? Sont-elles liées ? Le fait de les voir toutes trois à proximité ne veut pas dire qu'elles soient proches d'une manière ou d'une autre ? Peut-être que l'une demande à son chemin à cette autre que le hasard à placé sur son chemin ?
Cette petite fille, si c'en est une, courre-t-elle après ce ballon rouge ? Fuit-elle les deux autres personnes. Et dans ce cas que fuirait-elle ? Des arrangements secrets concernant son existence ? Un bonheur dont la conscience de la perte lui laisse par avance un gout amer dans la bouche. Et pour se prévenir de cette amertume, ne prend-t-elle pas les devants en fuyant ce bonheur avant d'y prendre gout ? Mais cela n'est que pure spéculation. Peut-être ne fuit-elle pas ? Peut-être rejoint-elle quelqu'un qui est hors de porter de mon regard ?
Cette petite fille atteindra-t-elle jamais son but ? Rattrapera-t-elle jamais cette balle rouge ? Ces femmes, aussi concernées soient-elles, vont-elles couper dans son élan la course de cet enfant ? Toute une foule de questions m'assaille. Tant et tant de questions auxquelles je n'ai pas de réponses. Simplement des suppositions. Mais comment être sur de ce que je pense de ce que je vois.
D'ailleurs, mes yeux, sont-ils les alliés ou les ennemis de ma raison. Je ne sais. Mais je dois me montrer honnête. Je ne dois pas incriminer seulement mes yeux pour les errements possibles de ma raison. Ils ne sont pas les seuls qui l'agitent. Mon intuition, elle aussi, l'agite. Cette intuition toujours si prompt à ressentir ce que mes yeux ne peuvent pas voir. A démasquer les présences faisant tout pour rester invisibles. Cette intuition, mon intuition, m'entraine au-delà des limites que le commun des mortels n'osent pas franchir.
Ce bouquet de branches, est-il un simple bouquet de branches ? Mon esprit oscille entre le oui et le non. Mais si j'opte pour le non. Dois-je croire ce que je perçois et m'en inquiéter. Ne devrais-je pas plutôt calmer mon imagination débordante. Et ainsi par la même occasion apaiser mes peurs.
Mais si ce que je perçois est réel, que dois-je en penser ? Dois-je m'inquiéter ou pas ? De toutes les réflexions qui peuvent naitre de mes appréciations, laquelle ou lesquelles sont justes ? Comment distinguer la vérité des illusions ? Comment savoir si j'ai tort ou raison sur les intentions de cet autre ? Comment savoir ? En m'adressant à lui directement ? Mais s'il souhaite se jouer de moi, ne ferait-il pas semblant de ne pas être et ainsi me convaincre du pouvoir de mon imagination débordante. Et ainsi convaincu, espère-t-il me voir partir pour pouvoir agir à sa guise. Comment savoir ?
Même s'il répond à mes sollicitations n'essayera-t-il pas d'endormir ma méfiance par des paroles trompeuses ? Comment savoir ? Mais ai-je vraiment besoin de savoir ? Ne devrais-je pas plutôt continuer mon chemin, mon vol et laisser s'accomplir ce qui doit être ?
Ce bouquet de branches, dans lequel je vois un esprit de la nature, s'il existe vraiment, comment connaître ses véritables intentions ? Est-il bon ? Est-il mauvais ? N'attend-t-il pas avec fourberie le bon moment ? Le moment où la prudence le protègerait de toutes représailles. Ce moment propice guetté de son œil avide où ces deux femmes auraient un instant d'inattention. Instant qui lui offrirait la possibilité d'engloutir de sa bouche l'enfant. Mais si le bien guide ses intentions, ne veille-t-il pas de ses yeux l'enfant qu'il protège avec son souffle.
Comment choisir entre ces deux éventualités ? En interrogeant cet esprit de la nature. Mais en l'importunant, en le détournant de sa mission, est-ce que je ne risque pas d'exposer cet enfant aux dangers dont il veut le protéger ?
Mais soudain, je crois comprendre. Ou bien est-ce ma folie qui m'entraine encore plus loin dans la déraison ? Soudain, je vois ou je crois voir un autre être à proximité de cet enfant. Bon ou mauvais, je ne saurais le dire. Dois-je me fier à son apparence, tout de sombre, pour tenter de le définir ? Dois-je m'arrêter à son apparence ? Ou aller au-delà pour tenter de découvrir ses desseins ? Reposer mon jugement uniquement sur son apparence serait injuste. Mais ce que je vois ne laisse augurer rien de bon. Comment ne pas m'inquiéter face à cet œil lumineux fixant l'enfant. A ces espèces de tentacules lancées à sa poursuite pour s'en saisir et l'emporter dans le monde des ténèbres.
Précédemment, j'ai cru que l'être de la nature fixait les deux femmes. Maintenant, je vois où se porte réellement son regard. Il fixe. Tient en garde l'être des ombres. Lui intime l'ordre de ne pas se saisir de sa proie. De retenir ses tentacules. De les ranger. Deux adversaires se font face. Leurs regards se font face. Se toisent. Tentent d'intimider l'autre. Dans leurs regards brillent le désir de remporter la victoire. De cette victoire dépendra la vie ou plutôt l'âme de cet enfant. Aux ténèbres ou à la lumière, elle se sera vouée.
Est-ce que j'assiste à une bataille entre la Lumière et les Ténèbres ? Les Ténèbres se précipitant sur cet enfant. La Lumière tentant de le protéger. A n'en pas douter, un combat se déroulait sous mes yeux. Une bataille, qui n'était peut être pas la première et qui ne serait certainement pas la dernière, avait lieu. Une bataille pour la possession d'un enfant qui se perpétuerait au-delà de son enfance et qui ne prendrait fin qu'à son dernier souffle.
Mais pourquoi les considérer comme des adversaires ? Peut-être le vice guide-t-il leurs actes ? Et que contrairement à ce que je crois comprendre de ce que je crois voir, ces deux êtres ne sont pas des ennemis. Mais des alliés. Des alliés unis pour la réalisation d'un noir dessein. S'emparer à coup sûr de cet enfant en jouant avec sa peur et ses espoirs. Il est tellement plus facile de tromper quelqu'un avec un faux réconfort lorsque la peur vous court après.
Mais j'ai l'impression que je m'égare de plus en plus. Je dois me ressaisir. A trop réfléchir, je perds le sens du commun et j'imagine des théories de plus en plus fumeuses qui m'éloignent davantage de la réalité. Ces deux êtres ne sont peut-être ni des adversaires, ni des alliés. Ils sont peut-être, tout simplement, des amis imaginaires. Deux amis nés de la solitude de l'enfant, jouant tout en veillant sur lui en sus et place des deux femmes qui préfèrent discuter entre elles.
Mais je continue à m'égarer. Je dois vraiment me ressaisir. Prendre conscience et accepter que tout ce que je vois n'est que le fruit d'une imagination dérangée. Une folie dont je ne serais pas conscient. Mais le fou est-il conscient qu'il est fou ? Trop de questions. Je devrais vraiment arrêter de ne poser toutes ces questions.
Mais me suis-je poser les bonnes questions ? Et ai-je trouver les bonnes réponses ? Je ne le saurai jamais. Sauf si je l'imagine. Et si je considère le fruit de mon imagination comme étant la réalité. Alors ce sera la réalité. Même si ce n'est pas la réalité. Pour moi ce sera la réalité. Et mon imagination me permet d'entrevoir toutes sortes de possibilités de réalités. Toutes sortes de futurs possibles. Autant de futurs possibles que me le permettra mon imagination. Imagination qui se laissera influencer par toutes les interprétations possibles de tout ce qu'elle croit être la réalité. Une infinité de futurs possibles pour une infinité d'interprétations du présent.
Mais ce que je vois n'est qu'une partie d'une vision. D'un ensemble de pièces d'un puzzle dont les autres pièces échappent à ma connaissance. Comment savoir si ce que je crois être est vrai ? Comment être sur que mon propre esprit ne m'induit pas en erreur tout en étant persuadé que je suis dans le vrai ? Rien n'est certitude. Tout est incertitude.