Le bonheur en conserve
Jo Todaro
Oui j'y suis arrivé, je suis bien installé
Parmi les grands des grands avec mon lotissement
Ma cheminée, mes voisins, mon gazon, mon jardin
Ma BM, ma maison, ma dinde et mes marrons
De l'argent, du boulot, deux enfants presque beaux
Une fille et un garçon, pas jolie, un peu con
Je suis bien dans ce monde, j'ai une femme presque blonde
Aux sourcils épilés et au sourire soldé
Dis, t'en veux du bonheur, des paquets en couleur
Des trésors en écrins, juste au pied du sapin
Des cadeaux déballés, aussi vite oubliés
Sentiments à l'escompte, apanage des archontes
Je bouffe mes privilèges, chaussures noires, veste beige
Une boussole au poignet, des jantes larges et chromées
Assise à mes côtés, les épaules dénudées
Marylin au rabais, brandie comme un trophée
Mais moi je peux tout faire avec mes comptes bancaires
Mes emprunts contractés et mes cartes dorées
Des séjours à la neige, des faveurs en cortèges
Des vacances au soleil, du plaisir en bouteille
Toujours en mode charter, je sais trop bien y faire
Ma vie all inclusive, pas d'autre alternative
Ma femme si maquillée aux lèvres botoxées
Aux deux seins oubliés, bientôt siliconés
Je voulais juste vivre, je n'voulais pas survivre
Je n'ai jamais rêvé un jour que l'on me serve
Ces émotions congelées, ce bonheur en conserve
Je voulais juste vivre, je n'voulais pas survivre
Mais j'ai tout oublié des lumières du destin
Qui a tout dévoré, tous les feux sont éteints
Je suis le grand patron de la consommation
Le divin pharaon, l'homme aux rêves en carton
J'ai rien lu, tout compris, j'ai tout vu, réussi
J'ai gagné le gros lot, revendu mon cerveau
J'ai acheté le bonheur, on n'est pas des chômeurs
Négocié des actions et qu'elles soient bonnes ou non
Quelques obligations, portefeuille en béton
Je brasse comme un sultan, et le vent et l'argent
Accrochée à mes basques, cachée derrière son masque
Une femme en plastique, météore des cliniques
Une starlette grise que l'argent a soumise
Une putain fidèle, mais que ma vie est belle !
Et pour rien, non de non, je ne l'échangerais
Contre un peu d'émotion, contre un cœur qui battrait
Contre ce premier soir où nous avions juré
En croisant nos yeux noirs, d'essayer d'exister
Merci à toi d'avoir pris le temps de lire mes textes. Et merci, merci, merci pour te commentaires.
· Il y a presque 9 ans ·Jo Todaro
Chouette ! j'aime beaucoup ton texte et l'idée qui s'en dégage ! Merci Jo.
· Il y a presque 9 ans ·nombredor75