Le croc top

     Haaaa. Depuis le temps qu'un bon vieux débat politique n'avait pas agité notre gérontocratie au pouvoir, gavés de petits fours. C'est qu'ils ont la digestion lourde. Mais là, c'était intenable, ils n'en pouvaient plus. Tous les problèmes de Cerfaland étant résolus, il était temps de s'occuper des moeurs de notre jeunesse décadente. Comprenez, notre pays étant au plein emploi, formé aux technologies du futur, plus personne ne dormant dans la rue, il était temps de s'attaquer à un problème hautement important: le crop top.

     Alors, pour ceux qui vivent dans une grotte dans le Larzac, qu'est ce donc ce vêtement qui fait frémir notre sphère politique, au point que le freluquet se sente obligé de donner son avis dessus? Le crop top est un t-shirt court nous venant tout droit des USA, laissant le ventre dénudé, et datant des années 1890. Le groupe little egypt le porta lors d'une représentation à Chicago. Puis dans les années 30/40, il fut utilisé comme vêtement de plage, la quantité de tissu étant limité à cause de la guerre. Il se popularise dans les années 60 lors de la révolution sexuelle, puis enfin dans les années 80 ( souvenez vous, à l'époque, on pouvait fumer à la télé, s'insulter et montrer des corps nus avant minuit le premier samedi du mois). Les hommes footballeurs américains, qui arrachaient le bas de leur t-shirt pour l'entrainement, en cas de forte châleur, pour le confort et le film flashdance le mettant à l'honneur. Ce standard a été repris par la majorité des jeunes, comme un symbole de liberté. La mode disparut peu à peu, avant d'être remise au goût du jour dans les années 90 par Madonna et les Spice girls. Il revient vers 2010, toujours par les artistes, tel que Rihanna, Miley Cyrus. Bref, vous avez compris l'idée, il a toujours été là, et n'est pas nouveau.

     Qu'est ce qui pousse donc l'auguste personne qui nous dirige tel un troupeau de moutons, a en demandé son interdiction et a appelé à une tenue décente? Alors très simplement, déjà les résultats de son mandat, sa politique illisible, et le fait qu'aucun des problèmes gangrenant la France depuis longtemps n'a été résolus, voire se sont empirés. Donc, comme toujours dans ce genre de cas, il faut envoyer du choc, montrer qui est le boss, en lorgnant toujours du côté du RN ( quoi? Vous avez cru avoir plus de libertés? Vous n'y pensez pas bande d'irresponsables). Et quoi de mieux que de s'attaquer aux tenues de nos adolescentes, sachant qu'avec tout ce la France regorge de rétrogrades et de grenouilles de bénitier, il y aura un écho certain.

     Ensuite, les adolescents sont une cible facile, ils ne votent pas, contrairement aux vieux qui se déplacent à chaque fois. Donc autant soigner ses clients. Et enfin, les femmes sont la cible évidente. Comme expliqué dans une précédente chronique, avec la culture du viol bien ancré, elles ne sont que de vilaines tentatrices, et le pauvre homme, ne pouvant retenir ses instincts bestiaux, se jettent dessus au moindre morceau de peau apparaissant. 

     Il est quand même déplorable de voir qu'avec une Ministre chargé de l'égalité homme femme, on en soit encore à imposer les tenues vestimentaires. Déplorable pour les femmes, car après des années de lutte acharnée pour leurs droits, c'est par le terrain de la Loi que l'on compte les restreindre de leur liberté. Déplorable pour l'image des hommes également, qui ne seraient que des primates sans cervelle, et juste guidés par leur queue. Rappelons juste que l'indécence se trouve dans le regard de la personne ou dans ses paroles, et non de sa tenue. Le côté ultra sécuritaire visant à protéger les femmes est très malsain, car il les prive de libertés essentielles ( sortir seule, s'apprêter, se maquiller etc) alors qu'à aucun moment n'est envisagé que cela puisse être l'éducation des garçons qui serait à revoir. De plus, lors d'un viol, la tenue n'est majoritairement pas la raison de celui-ci mais simplement le fait de l'alcool ou de détraqués.

     Alors, il serait peut être temps que nos dirigeants s'attaquent aux vrais problèmes, et pas uniquement en surface avec des petits coups de menton, ou en restreignant les libertés des uns ou des autres.