Le culte de l'hygiénisme
Jean Claude Blanc
Le culte de l'hygiénisme
Une tranche de saucisson, morceau de chèvreton
Par-dessus un canon, on est tous des champions
Chanson de corps de garde, dont jamais on se lasse
Mais si ça vaut pas cher, alors ça débarrasse
Ainsi de me goinfrer, ne donnerais pas ma place
On n'est pas des mauviettes, malgré rien dans la tête
On aime faire la fête, même sans laisser de restes
Pour nous Gargantua est un petit joueur
On lèche dans les assiettes, la moindre trace de beurre
Pas des cuisses de gazelles, qu'ont rien dans la gamelle
Au régime suis rebelle, je fouille même les poubelles
Le culte de l'hygiénisme, suis pas sous son emprise
Dégustant à loisirs des tas de friandises
La mode est à la diète, se privent les midinettes
De produits frelatés, sur la gueule elles s'en jettent
Se tartinant la peau, de pommades et de crèmes
Pour faire maigrir leurs fesses, elles s'en donnent la peine
Sirènes végétaliennes, ne bouffent que des algues
Emotives craintives, n'aiment pas que ça saigne,
Pour conquérir les plages, se barbouillent le visage
Tellement peinturlurées, elles voudraient qu'on les plaigne
Aux défilés de mode, squelettes dans leur robe
On leur compte les côtes, leur poitrine se dérobe
Etant un mec sobre, je préfère les grosses
De chair bien garnies, qui aiment faire la noce
Se baladent toujours, dans le sac, quelques pommes
Pour se faire remarquer, nouvelles gastronomes
Détestent les viandards, ceux qui puent le pinard
Fréquenter des ringards, c'est pas vraiment leur genre
Pâle sourire caché sous kilos de peinture
Précocement ridées, déjà vieilles créatures
A force de s'enfiler, des fleurs d'herbes fanées
Ressemblent à des mémés, mais en plus desséchées
Pour elles leur idéal, n'est pas séduire les mâles
Elles s'en foutent pas mal, de leurs sexes qui régalent
Se mirent devant la glace, en se voilant la face
Juste un instant d'extase, sont en état de grâce
Je suis une denrée rare, issu de mon terroir
Un jouisseur notoire, mais sans aucune gloire
M'empiffre de pâté, bien sûr arrosé
A mon bide ça lui plait, quand il est fin replet
Dimanche on fait ripaille, foldingues de boustifailles
On tue la grosse caille, à vomir nos entrailles
Tout barbouiller de gras, mais ça nous suffit pas
Pour profiter la vie, demain on remet ça
Le culte de l'hygiénisme, leçon de sectarisme
On va pas s'y risquer, pas notre religion
Comme dirait François, râblé notre organisme…
Digère sans se faire prier, le lard du cochon
Alors dames graciles, vous qui un rien n'habille
Ça ne fait pas grossir, reprenez donc du boudin
Régalez-vous enfin, faites pas les difficiles
Avec l'avantage vous faire enfler les seins
Plaisanterie campagnarde, on est tous camarades
Devant une potée avec un peu de moutarde
On chante des paillardes, sauçant le jus qui pisse
C'est le petit Jésus, qu'on avale sans supplice
Mais le cholestérol, lui nous en fait de drôles
Dès lors nous interdit les rasades de gnole
On l'ignore ce malin, pas besoin de médecin
On a encore le foie, qu'agit en clandestin
Je vous plains les pimbêches, les plus que moins revêches
Ça vous met en colère, d'être au régime sec
Par manque d'abstinence, je vous avoue je pèche
C'est tellement délicieux, de se gaver le bec
Inlassable bâfreur, demain repars en chasse
Pour un jambon d'Auvergne, salé, entrelardé
Fais honneur à la graisse, du maigre je m'en passe
Minettes faméliques, vous êtes mes invitées
Péquenot de pure souche, vous mets l'eau à la bouche
Pour une ration survie, par contre, je suis farouche
Sinon je mange de tout, ce qui vient de la ferme
Jamais grève de la faim, mon ventre n'est pas en berne
Avec prédilection, fromage aux artisons
Bidoche faisandée, au frais dans le charnier
Pour compléter l'assiette, décor de cornichons
Et sans en abuser, une louche de Beaujolais
Mais je n'ai pas la toque, du chef maitre queue
Pour l'art culinaire, consulte pas le bréviaire
Cuisinant pour moi-même, je fais ce que je veux
Alors folles d'hygiénisme, êtes pour moi une énigme
Jolies comme vous êtes, y'a bon les parties fines
D'humer ces bons fumets, vous deviendrez coquines JC Blanc sept 2019 (pour F. Rabelais)
Trop drôle ! Justement, hier j'ai vu un petit reportage sur les algues que ces demoiselles ne se contentaient pas de manger (après tout, ça ne peut pas faire de mal) mais s'en tartinaient également le visage. Elles verront bien, d'ici quelques années si cela a fonctionné....
· Il y a environ 5 ans ·Louve