Le démasquer

Elle le sentait sensible et doux.

Elle ne savait pas comment lui faire passer le message. Alors un jour, elle lui avait envoyé un texto, un échange s'en était suivi. Comme il était curieux ou tout simplement poli, il avait voulu savoir sa réponse.

Et à la fin de son SMS, elle n'avait pas pu s'empêcher de signifier clairement qu'elle l'avait en tête.

Il lui avait répondu quelques heures plus tard en lui disant de ne pas penser.

Cela avait eu l'effet d'une douche froide au réveil. Stimulant, mais glaçant.

Elle avait écarté toute chance de pouvoir le revoir, mis à part pour lui donner un petit présent, afin de le remercier d'un bon moment passé auparavant, auquel il l'avait invitée. Elle voulait marquer sa reconnaissance.

Alors à force de SMS échangés pour trouver un créneau qui permette à leurs agendas de se croiser, elle se rendit chez lui comme il lui avait demandé.

Il l'invita en fait à déjeuner. Chez lui.

Elle put découvrir son intimité en toute simplicité. Savourer son charme, observer sa façon de préparer à manger, voir où il habitait.

Elle se demandait quelles étaient ses activités préférées en dehors de son travail qui devait lui prendre beaucoup de temps.

Elle avait l'impression de beaucoup parler et de ne pas réussir à le percer à jour. A la manière d'un chat que l'on aimerait amadouer, mais qui se montre un peu farouche avant de vous demander plus de câlins.

Peut-être faudrait-il quelques jours, semaines, mois ou même années avant de savoir ce qu'il pensait, ce qu'il ressentait, ce dont il avait envie.

Il l'embrassa à plusieurs reprises en lui saisissant gentiment et fermement les épaules pour lui dire bonjour quand elle arriva, pour la remercier de son présent et pour la saluer quand elle partit.

Elle aurait voulu se lover au creux de ces bras, découvrir leur texture, leur douceur. Poser son visage près de son cou, ou sur son torse. Elle n'avait pas osé. Elle ne savait pas ce qu'il pensait. Elle préférait rester sur la défensive

Elle avait été touchée par sa spontanéité et sa gentillesse. Elle avait l'impression d'être en contact avec quelqu'un de bon, d'attentif et d'amusant. Quel bien cela lui faisait ! Elle appréciait la complicité qui naissait de chacun de leurs échanges. Elle se sentait en confiance, dans une atmosphère bienveillante et naturelle.

Elle entretenait malgré elle des pensées ou fantasmes à son sujet. Quand elle entra dans son intérieur, elle fut surprise par la nudité du lieu. Si elle avait dû investir un tel espace, elle l'aurait vraiment investi !

Elle lui parlait beaucoup de plantes, et ils échangèrent sur leurs parcours respectifs...

Que tirer de cette expérience ? Elle sortit de cette scène d'impro un peu déboussolée, mais sûre d'elle. Pas tout à fait dans le même état d'esprit qu'en y entrant, en tremblant un peu. Elle essayait d'être en contact avec elle-même, de ne pas se perdre de vue. Elle d'abord. Mais elle n'osait pas franchir de cap. Trop tôt ? Elle avait l'impression d'être pressée d'un côté, mais de le désirer profondément, proche d'elle.

Pour l'instant, peut-être que seules leurs pensées ou leurs songes jonglaient sur un autre plan. Un rapprochement est susceptible d'arriver. Ou pas.

Il la considérait peut-être simplement comme une copine. Rien de plus. Des copains sont complices. Alors elle voulait se contrôler, tout maîtriser, et ne pas trop se laisser aller à ses pensées qui empêchent de voir ce qui est devant soi...