Le jeu de la Vie
redstars
Écriture automatique/délire
C'est un long, immense et rude plateau de jeu parsemé de flèches blanches. Il semble infini, on peine à discerner ses contours. Avec des cases, de différentes couleurs : toutes ont une utilité, toutes vont modifier le cours de votre vie.
Je regarde autour de moi et je ne comprends plus rien.
Tous cette gens sur le plateau, qui jettent le dé, avancent en courbant le dos selon les flèches et le chemin qu'ils veulent prendre dans ce labyrinthe.
Certains traînent presque les pieds. D'autres semblent plus énergiques et dynamiques. Ils font des paris sur celui qui aura la meilleure case, le meilleur chemin – car oui, il y en a plusieurs. Tous ne mènent pas au même dessein. A la même destinée. Mais passés le trois quarts du jeu, vous le savez, car c'est tacite, qu'il ne vous reste plus beaucoup de cases. Alors vous jetez le dé en fermant les yeux. Un, trois, six ? De combien de cases suis-je prêt de la mort ?
Les règles du jeu sont et faciles et compliquées. Disons que le but est d'arriver serein sur son lit de mort, pour pouvoir dire : j'ai eu un bon jeu, je m'en suis bien sorti. Puis fermer les yeux, pour toujours.
Certains filent droit, sûrs d'eux et selon le chiffre du dé, d'autres tournent en rond sans même s'en apercevoir. Il a des cases qui offrent, d'autres qui reprennent. Des cases qui changent un pan de votre vie, d'autres qui chamboulent tout. C'est le dé qui choisi, qui roule et roule avant de donner son verdict. Et vous ne pouvez pas refuser ce que révélera la case sous vos pieds.
Et puis, il y a nous.
Ceux qui n'ont pas voulu suivre la flèche, ceux dont la perte a conduit hors du plateau. Les cinglés, les pestiférés, les anarchistes et autres cas sociaux. Nous ne sommes pas beaucoup, mais nos pions sont tous écorchés, cassés par endroits, abimés.
Certains parviennent à se faire réparer et s'accorder une autorisation pour retourner sur le plateau, d'autres, comme moi, regardent le ballet des avancées de loin.
Je regarde les gens tomber sur les cases « travail », « chien », « mariage », « enfant », « maladie » ou encore « maison ». Tous, quels que soient les chemins choisis, obtiendront les mêmes choses. Tous finiront mariés, avec le crédit de la maison, les deux mioches et le labrador. C'est rare, quelqu'un sur ce plateau doré, qui ne reçoive pas une vie semblable à ses congénères. Tout a été calculé pour que personne ne devienne marginal ou différent. Les marginaux et les différents, ils sont avec moi, hors du plateau doré.
Un matin ou un soir, j'étais sur le coin du plateau, et ne me demandez pas pourquoi - peut-être était-ce la routine - j'ai sauté dans les hautes herbes entourant les contours du jeu. J'ai couru, couru à perdre haleine. C'était tellement agréable, cette nature en laquelle m'enfuir. L'herbe sous mes pieds. Enfin, m'enfuir… ils m'ont vite rattrapée pour m'enfermer avec les autres inaptes ou inadaptés. Nous autres, malades ou assistés, sommes reclus derrière des murs très hauts, des murs très blancs.
Depuis les petits hublots, regarder les autres sur le plateau avancer vers une vie terne et identique. Ne pas même les envier, non. J'en veux pas de « maison », de « mariage », « d'enfant ».
Je ne veux pas d'une vie tracée d'avance, je ne veux pas de cases et de dés pour régenter ma vie.
J'ai prévu de m'enfuir. Traverser les hautes herbes jusqu'à trouver un autre monde. Je ne sais pas vous, mais moi, je ne compte pas faire de vieux os ici.
Alors, qui est-ce qui vient avec moi ?
Très original ce plateau de jeu ! C'est vrai que nous suivons tous, ou presque, le même chemin. Mais ceux qui suivent une autre route, sont- ils plus heureux à la fin ? Et je réponds à ma question : ils ne se sont pas ennuyés, incrustés dans la routine au moins ! Bravo pour ce texte !
· Il y a plus de 8 ans ·Louve
Merci :)
· Il y a plus de 8 ans ·redstars
Pour "Jumanji" ? :-)
· Il y a plus de 8 ans ·Aurélien Loste
Qui sait !
· Il y a plus de 8 ans ·redstars