LE MONDE DE DEMAIN

Jean Marc Houze

Un monde imaginaire ou réel ? L'avenir sera-t-il bleu ou noir ? Ou peut-être les deux en même temps !Devrons nous nous battre contre nous même pour vivre ? L'avenir nous le dira

Nous sommes en 2961 et le 14 janvier. Aujourd'hui c'est mon anniversaire et je fête ma millième année sur cette terre. Enfin ,c'est une façon de dire, car en fait je suis mort il y a quelques centaines d'années de cela, mais mon esprit est toujours sur ce monde qui était le mien. Je ne sais pas ce que je fais ici, mais, pour une raison que j'ignore encore aujourd'hui, j'erre sur la France d'une ville à l'autre sans but précis. Je suis le spectateur impuissant d'événements qui m'entourent, car il m'est impossible d'interréagir sur les vivants.


De ma naissance à ma mort à l'âge de 82 ans, j'ai vécu d'innombrables changements technologiques dans ma vie que je ne suis pas vraiment surpris de voir le monde dans lequel ma descendance vie aujourd'hui. Il est loin le temps où j'étais fou de joie lorsque mes parents avaient acheté notre première télévision. À cette époque, il n'existait que trois chaines de télé et en noir et blanc. C'était une espèce de gros cube avec trois boutons tournants; un pour le volume, un second pour les chaines et le troisième pour le contraste et la luminosité.


Jusqu'à mon dernier souffle, le progrès n'a cessé d'évoluer. De mon gros cube en noir et blanc il n'en restait rien que des souvenirs lointains. Avant de fermer les yeux pour la dernière fois, j'ai eu le temps de connaître les écrans plats, les ordinateurs portables et même les téléphones portables avec télé intégrée, internet, caméra appareil photo, etc.


Les PC avaient pris une place importante dans la vie d'un écolier et le mot ardoise devait être inconnu des élèves d'aujourd'hui. Comme tout le monde, j'étais heureux d'acquérir une nouveauté qui allait me faciliter la vie, mais j'étais loin d'imaginer où toutes ces créations allaient nous mener dans les années futures. Si les chercheurs du monde entier avaient pu lire l'avenir, peut-être auraient-ils mis un frein à leurs inventions, mais comme on le sait, l'argent est le point faible de l'être humain.


Aujourd'hui, le 14 janvier 2961, pour mon anniversaire, j'avais décidé de me promener au-dessus de Paris où la tour Eiffel pointait toujours son nez vers le ciel. Je flânais dans le ciel à quelques dizaines de milliers de mètres lorsque j'entrepris ma descente vers ce pays qui m'avait abrité durant ma vie humaine. La France avait bien changé elle aussi, car ses contours n'étaient plus les mêmes que ceux dont j'avais connu. Toute la côte avait été rognée par la mer à cause de la fonte des glaces et tous les pays avaient été touchés.


Le visage de Paris avait évolué. Il y avait des buildings un peu partout, mais seulement les étages supérieurs au dixième étaient occupés. En dessous, l'oxygène s'était raréfié donc inhabitable.


Il n'y avait plus de magasins, plus d'entreprises, plus de salles de spectacles ou de brasseries. En dessous d'une certaine hauteur, Paris, comme les autres villes du monde, n'était supportable qu'avec un masque à oxygène. Cette ville lumière n'était plus encombrée par les automobilistes, car seuls les véhicules électriques munis d'une bonbonne d'O2 circulaient. On avait goulûment dévoré toutes nos ressources naturelles au prix du progrès.


Et les humains me diriez-vous ? Eux, ils sont toujours là. Enfin ceux qui ont survécu ! On a d'abord cru à une pandémie lorsque les animaux ont commencé à mourir, puis ce fut le tour de l'espèce humaine de succomber mystérieusement avant que l'on comprenne que le manque d'oxygène était responsable du massacre. Heureusement, des architectes avaient eu l'ingéniosité de construire des villes souterraines à plusieurs centaines de mètres de la surface avec un système de pointe de renouvellement d'air. Au début, ce projet n'avait pour but que de créer des habitations supplémentaires pour loger une surpopulation grandissante. Mais aujourd'hui, cela devenait vital.


Ce monde souterrain était formidablement étudié. Ce qui existait en surface avait été recopié à la perfection en sous-sol. Certes, il y avait un soleil artificiel, mais cela permettait aux arbres de pousser de même qu'à la verdure. Les hauts plafonds étaient recouverts d'immenses panneaux représentant un ciel ensoleillé le jour ou étoilé la nuit. La faune morte en surface avait survécu en sous-sol. Des commerces en tous genres fleurissaient et le peuple souterrain côtoyait le monde de la surface comme si tout cela était naturel. Les scientifiques, eux, s'arrachaient les cheveux pour redonner à cette terre sa valeur d'origine si toute fois cela était encore possible.


La communication avait évolué elle aussi et l'on avait plus besoin de porter un objet à son oreille pour appeler quelqu'un. Il suffisait de prononcer son nom à haute voix suivi d'un code pour qu'un hologramme apparaisse dans la pièce, juste au-dessus d'une plaque cylindrique électronique. Les enfants n'allaient plus à l'école, mais suivaient les cours chez eux via ce système révolutionnaire. Les déplacements étaient tous électriques pour les longs trajets, car en France comme ailleurs, il existait des centaines de villes de ce genre. Elles étaient reliées entre elles par des galeries dont seuls des tubes de transport emmenaient les voyageurs d'un endroit à un autre.


J'allais, comme souvent, voir mes arrières, arrières, arrières, arrière, arrière..., disons ma descendance pour être plus rapide, qui vivait au 44 rue de la renaissance. Il s'appelait Nolan et lorsque je fis irruption dans sa chambre, il était là, en train de jouer avec un de ses camarades résidant dans une autre ville voisine. Il avait un pistolet laser dans la main droite et sur le nez une paire de lunettes nouvelle génération qui lui permettait de se transporter virtuellement dans une autre dimension.


Je restais avec lui un long moment à le regarder jouer, espérant qu'il m'aperçoit, mais il n'était pas possible de communiquer, ce monde n'était plus le mien. Lorsque sa mère l'appela pour le dîner, il posa ses lunettes et son pistolet sur son lit et se dirigea vers la porte où je me trouvais, puis me traversa. Sur le seuil, il s'arrêta, regarda derrière lui, comme s'il avait senti ma présence, passa sa main sur son front puis continua son chemin vers la salle à manger.


Je décidai alors de le laisser tranquille et retourna flâner dans les airs, là où était ma place, attendant de connaître ma nouvelle destination, si tout au moins j'en avais une. Il ne me restait plus qu'à me laisser bercer par les vents en regardant cette petite boule d'un gris bleu qui tournoyait toujours autour du soleil jusqu'à ma prochaine descente sur cette terre dans une dizaine d'années peut-être...



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