Le rouge

Magali B.

ce bâton de couleur qu'on n'ose pas appliquer sur les lèvres...

J'ai toujours aimé le rouge à lèvres. Déjà parce que c'est beaucoup plus facile que de se maquiller les yeux, plus rapide aussi. Et puis des lèvres maquillées, ça donne le ton. C'est comme un accessoire.

Et parmi toutes les teintes,  il y a le rouge. Le vrai rouge. Celui qu'on n'ose pas au début. Parce que le vrai rouge il faut l'assumer. Le rouge, ce n'est pas pour les petites filles.

Le rouge c'est la couleur ultime on pourrait dire. Avec le rouge, on ne peut plus faire semblant. On ne peut plus prétendre qu'on se maquille "juste un peu". Il y a une dimension dans un rouge mat qu'il n'y a dans aucune autre couleur. Ce n'est pas pour rien qu'on passe des années à essayer des nacrés, des bruns chauds, des nudes, des gloss, des transparents, des roses beiges, des beiges rosés, des orangés, des violets et d'autres horreurs qui ne nous vont pas du tout et nous laissent un souvenir parfois drôle parfois moins de cette féminité recherchée. Pendant des années, en fait, on tourne autour du pot. On tourne autour de cette féminité sans bien la saisir. Et un jour, on se lance.

Certaines femmes ne le portent jamais, ce rouge là. Et pas parce que le rouge ça ne leur va pas, avec la quantité de rouges qui existent difficile de croire qu'on ne puisse pas trouver le sien.

Non l'excuse du rouge qui ne nous va pas, moi, je n'y crois pas. Je crois par contre à ce reflet de femme dans le miroir que l'on n'assume pas. Je crois au regard des hommes, à cette lueur imperceptible dans leurs yeux. Je crois aux regards que l'on ne parvient pas toujours à soutenir. Alors au lieu de détourner les yeux, on laisse le rouge au fond de son vanity. Pour un jour seulement, ou pour toujours.

Le rouge est au maquillage ce que les talons sont aux chaussures. Un détail fort, chargé de symbolique. Et qui change non seulement le regard des autres, mais aussi notre propre regard sur nous-mêmes. Dans ce reflet, là dans le miroir, quand on découvre, un jour sans s'y attendre, cette femme que l'on est.

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