L'eau sale.

jireoparadi

Les concombres, lavés dans une eau moyennement claire, étaient ensuite ouverts en quatre et copieusement poivrés...

Je revois,

J'entends,

Je ressens encore la chaleur de ce compartiment, une vingtaine les uns sur les autres, les cris des vendeurs ambulants, bananes et bassines de concombres ou plateau de thé sur l'épaule, un soldat ou un officier peut-être, son bâton de maréchal à la main, tentant de dormir en nous imposant son officielle présence.

 

Depuis plusieurs semaines j'entrais et je sortais d'un train, Caroline m'accompagnait, nous consultions avec passion un guide de voyage avant-gardiste.

En route vers une ville frontière à l'ouest du pays dans lequel notre mission s'opérait, j'imaginais alors participer à Quelque Chose de grand... 

 

Nous  voyagions depuis 17 heures,

43° à l'ombre,

4 heures encore avant d'atteindre J…

On crevait de soif.

 

Cris, arrêt, chaleur toujours, fumée, départ, mendiants, voyageurs fatigués, vendeurs infatigables dans le couloir…

Les concombres, lavés dans une eau moyennement claire, étaient ensuite ouverts en quatre et copieusement poivrés avant de nous être tendus par une main gracieuse.

Qui a déjà eu soif  connait ces moments de combat, mémoires de principes hygiénistes et regards de passion pour une bassine d'eau sale.

 

J'aime avoir soif,

Et chaud aussi,

Longtemps…

 

Puis,

D'épuisement peut-être.

Ou par grâce,… Quoi d'autre ?

Céder,

Enfin…

 

… Et tendre la main vers un morceau de concombre poivré.

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