Les deux mondes - chapitre 1

oreline

Sur Marcia

 Mashfer

Je m’appelle Mashfer. J’éprouve un certain plaisir à pouvoir dire que tous les habitants de Marcia connaissent mon nom. Marcia est une planète constituée, tout comme la Terre, de continents et d’océans. Ces deux planètes se ressemblent. La différence la plus notable est que Marcia est un monde doté de magie. Des êtres peuvent se métamorphoser, d’autres peuvent devenir invisibles, d’autres encore peuvent jouer avec les lois de la gravité.

Je suis différent des autres habitants de Marcia. Je m’en suis rendu compte très tôt. Mes parents, du plus loin que viennent mes souvenirs, avaient nourri tout d’abord quelques inquiétudes devant mes différences puis avaient tenté de cacher cette espèce de tare. Tous les soirs, les habitants de Marcia sont pris de sommeil et vont se coucher. Moi, pour ma part, je n’ai jamais ressenti de fatigue et de ma vie, je n’ai jamais dormi. J’aurai pu m’avouer heureux de profiter de tous mes jours et de toutes mes nuits mais je savais qu’une fois endormis, les habitants de Marcia se réveillaient quelques secondes plus tard sur Terre dans d’autres corps identiques à ceux qu’ils venaient de quitter sur Marcia. Ainsi, ils laissaient leur corps se reposer tandis qu’ils vivaient une autre vie sur Terre. Tous les gens sur Terre vivent une vie sur Marcia et vice versa, moi à l’exception. Peu de gens ont conscience de vivre deux vies. Seuls certains chanceux s’en souviennent. On dit qu’ils ont le pouvoir de survoyance. Ces personnes sont très rares et très recherchés car ils peuvent interagir plus facilement sur les deux mondes.

J’ai longtemps été jaloux des autres. Je ne comprenais pas pourquoi j’étais exclu de la Terre, pourquoi je ne pouvais pas vivre deux vies comme les autres ? Ce fut très certainement une des raisons qui m’a poussé à créer mon empire, un empire totalement dédié au Mal. Je voulais posséder Marcia et par le biais de survoyants qui étaient acquis à ma cause, je voulais que mon pouvoir s’étende jusque sur Terre.

Pour ce faire, il fallait que j’éduque mes hommes. Je construisis donc une école du Mal. Toutes les disciplines qui me semblaient indispensables à leur enseignement y étaient dispensées. Peu de gens malheureusement venaient de leur propre chef et aucun enfant ne naissait dans mon empire : J’avais proscrit le sexe. Pour moi, il était la cause de nombreuses défaites, c’était une faiblesse, je l’avais banni dès le commencement. Ce posait donc la question de nos générations futures. Je l’avais résolue assez simplement. Périodiquement, mes hommes enlevaient des enfants de Marcia : fils de roi, fils de paysans, fils de marchands. Je voulais de tout.

J’avais toutefois une préférence pour les habitants de l’Empire de Caterly, Empire situé sur l’hémisphère Nord, entre un océan et une mer, territoire grand comme le Brésil, près du détroit de Hoterly, à cinq journées à cheval de l’Empire du Mal. La Reine Cate DiLoren gouvernait avec efficacité et était l’une de mes plus redoutables adversaires. Ce fut pour cette raison que, lorsque j’appris qu’elle attendait une petite fille, je concentrai tous mes efforts pour récupérer la petite princesse juste après sa naissance.

Aujourd’hui, je me rends compte de tout ce qui découla de cette décision, mais à l’époque, j’étais plus que déterminé.

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