Les enquêtes d’Hercule Foireaux (15)

Hervé Lénervé

Aux funérailles d’Hercule toute la profession était là, la, la, la… (Guitare, moustaches, pipe, polo Damar, collection antifrime !)

Deux anciens confrères perdus de vue, une consœur perdue de cul et sa secrétaire, la belle Eva, à qui il devait six mois de salaire impayé et dû de surcroit, plus bien d'autres choses encore, mais cela n'est pas de notre ressort. Plus, au loin, un égaré qui croyait qu'on enterrait un certain Arthur qu'il avait vaguement connu et qui était encore vaguement vivant, d'après sa femme, du moins, paraissait-il ?

La belle Eva devait lire un texte rédigé de la main propre, quoique quelque peu maculée, d'Hercule, quand elle bougeait encore, la main, bien entendu, pas la maculée conception. Elle éclaircit sa voix, Eva, pas la vierge miraculée, bien entendu salut, en faisant des vocalises entre les rangs des tombes alignées au cordeau dans lesquelles de sages squelettes alignés au Garde à vos os ! Siestaient paisiblement dans leur résidence privée, sans émettre le moindre ronflement. Balaise, les morts ! Puis, elle, Eva, bien entendu, salut la compagnie, se lança en se retenant de verser dans un océan humide de pleurs mouillés.

« Moi, Hercule Foireaux saint de corps et d'esprit-saint, aussi, je vous laisse mes amis, car je m'en vais ! Merci d'être venus si nombreux pour me rendre le dernier hommage.

J'ai consacré ma vie entière à lutter contre le Crime et Dieu sait ou ne sait pas d'ailleurs, je lui demanderai tout à l'heure, que je n'ai pas rechigné à l'ouvrage ! Pourtant, je quitte cette Terre avec un dernier regret, celui de n'avoir pu résoudre l'énigme des meurtres aux tournesols… »

Fondu au noir… Flash-back, premier.

Hercule fut contacté pour aider la police municipale sur une triple affaires de trois belles jeunes femmes* sauvagement assassinées et « légèrement vêtues *» précisait la presse.

Les corps avaient été retrouvés dans trois clairières différentes. « Les corps », si l'on peut dire, car ils leur manquaient la tête, saperlipopette ! Alors, peut-on textuellement dire, qu'un corps sans tête, s'appelle toujours un corps, oui et non, cela dépend du vent, mais on s'en fout, car il n'y en avait pas un souffle. A la place des trois têtes décapitées on retrouva une fleur de tournesol, mais tournée vers le soleil… (C'est, quand même, curieux autant qu'étrange, que l'on appelle une fleur qui se fait bronzer à longueur de temps : tournesol, non ? Enfin, moi, ce que j'en dis.)… un tournesol par corps, donc trois tournesols au total, pour être plus exactement arithmétiquement précis. Les corps purent être identifiés rapidement, malheureusement on ne retrouva jamais les têtes, même lentement, d'ailleurs. Adonc, on entera sans chichi, ces pauvres victimes avec leurs tournesols en lieu et place de leurs vulgaires têtes manquantes, c'était plus présentable, plus digne pour les familles et puis les fleurs, ça fait toujours plaisir aux morts, non ? D'ailleurs, certains spectateurs s'écrièrent : « c'est une bonne idée, ces fleurs en guise de têtes, c'est plus gai ! »

Fondu au noir… Retour au présent.

La belle Eva essuie ses lunettes noires qui pleurent abondamment et reprend sa lecture, des trémolos dans sa belle voix sensuelle de femme fatale, qui connaît fort bien la force de sa fatalité.

« Où en étais-je déjà ? Ah, oui les tournesols ! … Je pars donc avec cette interrogation pour seule compagne, Qui a tué ? Qui a décapité ? Qui a tournesolé ? Est-ce une seule et même personne ou sont-ce-t-elles plusieurs à avoir commis ces ignominies sans nom, ni oui, ni tête, nom d'une braguette ? J'aimerais… »

Foutu au noir… hache-black, deuxième.

(Il y en aura 2356 au total, dans la version épurée… Non, j'déconne ! Restez !)

Deux fois, Hercule fut à deux doigts d'attraper le meurtrier, mais l'ombre lui fila entre les deux mains et couru à perdre haleine, la perdit et pris froid. Mais on s'en fout, bien fait pour lui ! En bref, l'assassin fut insaisissable.

Fondue aux noix… Retour au printemps.

Eva aux longs cheveux baies, sauvages dans la Camargue, continue la lecture de son texte qui tremble d'émoi entre ses belles mains aux longs doigts de pianistes des dimanches et jours fériés, elle, qui ne joue que de la flûte aux pompiers du quartier. « … pour le repos de mes nuits froides, que l'assassin, s'il est présent en ce lieu et je sais qu'il l'est ! Ici,  où toutes fourberies s'effondrent, où la lâcheté perd de sa tonicité. Là, où l'honnêteté envers soi -même, prime autant qu'envers les autres, et cela même en prose. Il est temps de soulager sa conscience… de se décharger de ses lestes… à minima… de se délester de ses charges… et de murmurer à l'oreille de mon écoute d'outre-tombe, sur mes restes encore tièdes et toujours glamours, son nom, son adresse, son numéro de Sécu et facultativement, ses hobbies. Pour que je puisse enfin partir soulagé et apaisé et heureux et merde, un peu de sincérité face à un mort, espèce de face de rat, immondice, infecte pestilence nauséabonde de remugles de chez Chanel ! Je m'emporte… Eva, ma chérie, ne lisez pas ça… Oups, trop tard ! C'est parti ! Messieurs, mesdames, je vous demanderai de ne pas avoir entendu cette phrase. De faire comme…

-         Arthur ! C'est toi ? T'es là ?

-         Monsieur, S'il vous plait, on rend hommage à Monsieur Hercule Foireaux, le fameux détective Bègue.

-         Oui ! C'est ça ! Hercule ! Pas Arthur ! J'n'ai jamais réussi à retenir son nom, à l'autre con ! C'est moi, Arthur, enfin machin, c'est moi, l'assassin que tu as recherché en vain toute ta vie vainement et que tu as maladroitement laissé filer entre tes mains de gaucher. Eh l'autre, le fameux limier de mes deux ! J'ai gagné du con, tu ne m'auras plus jamais, jamais, jama…

-         Faux !

Coup de théâtre !

Tap ! Tap ! Tap !

Mais non, bande d'abrutis d'accessoiristes, on n'a pas dit, les trois coups.

-         Faux ! Crie le cercueil ! Je suis ressuscité de parmi les morts vers les non-encore-morts, par la seule volonté de faire triompher la justice partout et par terre sur cette Terre où les scélérats de ton espèce pullulent scélératement.

Devant la foule restreinte, mais néanmoins médusée, la capsule de la bière s'ouvre pour laisser apparaître, superbe, notre Hercule Foireaux en chair et en graisse. Il n'était donc, point mort, le bougre !

 (Remarquez, moi, je m'en doutais un peu, car je ne vais pas tuer un mec qui me rapporte 5000€ par texte débile ! Faudrait être sacrément con ou sacrément riche, or riche, je ne le suis point, c'est un fait et con, seule ma femme le prétend seulement, pour l'instant ! Conséquemment, je ne tue pas la poule aux œufs d'or !)

Hercule se lève de sa stèle, sort de son vaisseau fantôme et apparaît en toute simplicité naturelle et naturiste, il faisait une chaleur d'enfer dans ce four, la quéquette à l'air, désignant dans sa turgescence spectrale le coupable pétrifié par l'apparition du mort ressuscité, son ennemi juré.

-         C'était donc, toi, le scélérat, le faux-meilleur-ami de toujours qui était l'assassinant, finalement, menteur patenté, tout ce temps tu auras trahi mon amitié ! Gardes, emparez-vous de cet homme, c'est le nôtre ! Il est à nous ! Je vous le donne !

Les gardiens du cimetière s'emparent du triste individu et le remettent à la  garde du GIGN qui faisait une ronde de routine, dans les parages, pour contrôler que toutes les tombes avaient bien une vignette de stationnement, valide. Hercule reprit de sa voix de Stentor Imperator.

-         Avoue, voyou ! Où as-tu dissimulé les têtes, pickpocket et pourquoi les tournesols ? Mongol !

-         Ha, ha ! Jamais tu ne sauras, Arthur…

-        Pas Arthur, ordure ! Mais Hercule, comme Hercule le chat, dans Pif le chien, obédience cocos, tendance bobos.

-    Ou Hercule, ce demi-dieu grecque, mi-homme, mi-d'pain qui s'abîma les mains dans tous ses travaux domestiques, car il n'en avait pas… de domestiques ?

-     Connais pas et m'en fous ! Garde ton secret pour les cafards, les blattes, les scolopendres, les punaises et les agrafes qui seront ta seule compagnie pour le reste de ta triste vie dans une geôle sinistre à la bouffe dégueulasse. Tu moisiras en cellule, car étêter des têtes, c'est perpette! Viens Eva, ma chérie, travail accompli, rentrons à la base, à l'agence, au lit !

C'est ainsi qu'Arthur, pardon Hercule, s'en partit avec la belle Eva à son bras, enfin, plus exactement, elle, le bras sur les épaules d'Arthur-Hercule et lui, le sien sur les hanches d'Eva, la grande. En effet, Eva était très grande et Hercule très gros. Il partit assurément l'esprit tranquille et serein pour avoir, une fois de plus, fait triompher la lumière claire sur les ténèbres obscures de la criminalité en zone urbaine tempérée.

-         Qu'est-ce qu'on mange, ce soir, ma choupinette ?

-       Tête de veau, au menu ! Non, je plaisante, je pensais que vous m'inviteriez au restaurant pour fêter l'évènement, mon tendre ami !

-      Tu as raison, soyons fous ! C'est toi qui payes, je suis fauché comme Crésus.

-         Vous me devez encore six mois de salaire, vous en souvenez-vous, très cher ? Ça commence à faire !

-         Certes, certes ! Mais…

-       Mais remettez quand même vos effets de deuil, cela ferait mauvais effet chez Maxim's !  

Bon, laissons Hercule, le privé, vaquer à sa vie privée. Il l'a bien mérité notre facteur, non, notre farceur, voulais-je dire !

FIN des flashs routiers et du temps des cadeaux.

*Avez-vous remarqué que ce sont toujours les belles jeunes femmes séduisantes et légèrement vêtues qui se font trucider dans mes histoires comme dans la vie, parfois, heu non, toujours ? Mais cela ne serait être que pures coïncidences, bien évidemment ! Assurément !

  • Le musicien hésite entre le tournesol et le tournedos.

    · Il y a plus de 5 ans ·
    30ansagathe orig

    yl5

    • C’est très compliqué la théorie musicale. Il y a de quoi se tromper. « Mais tournela, abruti ! » disait mon navigateur satellitaire ascendant cancer. :o))

      · Il y a plus de 5 ans ·
      Photo rv livre

      Hervé Lénervé

  • En tous les cas, notre très célébrissime Hercule Poireaux n'a jamais eu cette folle mais brillante idée. Un instant, un instant seulement, je l'imagine sortant du cercueil, nu comme Adam au premier jour, avec pour seul vêtement, sa moustache et son chapeau...

    · Il y a plus de 5 ans ·
    Louve blanche

    Louve

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