L'Hyppopotamus.
effect
La naissance d'Hyppopotamus.
Je rends souvent visite à l'Hyppopotamus de mon quartier, non pas pour sa viande mais pour sa Brigitte qui sent bon les fleurs. Brigitte tient la caisse et fermement son personnel. Quand Nadège met une tranche de pain en plus dans la panière, elle se fait rappeler à l'ordre par Brigitte.
- Nadège !
- Quoi ?
- Ils sont combien à la 17 ?
- 6, pourquoi ?
- Compte-moi voir combien t'as de tranches dans ta panière !
- 7 !
- Alors ? S'ils sont 6, pourquoi t'en mets 7 ! Quand tu vas chez Jennyfer pour t'acheter une robe à clous, la vendeuse elle t'en refile un gratos ?
- Non !
- Bon ben alors ! Sors-moi c'te tranche en trop, elle a rien à foutre dans la panière ! Ils mangent déjà assez de nos frites à volonté, c'est pas la peine de leur mettre une tranche de pain en plus ! Réfléchis un peu ! On fait une moyenne de 70 tables sur les 2 services... si tu commences à rajouter une tranche de pain par table... ça fait en fin de journée 70 tranches de pain perdues... et 70 tranches de perdues ça représente 10 pains entier... et 10 pains entier c'est le prix d'un paquet d'clopes ! On voit bien qu'tu fumes pas !
Brigitte sait que les petites économies faites sur son entreprise, permettent d'enrichir son petit patrimoine personnel, ses petites passions. Pour Brigitte, l'une d'elles c'est les paquets de clopes. Depuis qu'ils ont des images à caractère médical imprimés sur les paquets, elle les collectionne afin d'accélérer ses compétences en chirurgie. Brigitte rêvait de devenir chirurgienne en cancérologie pour pouvoir bidouiller dans la bidoche le trépas de chez les gens. Dans sa jeunesse, elle avait regardé son tripier de père faire les boudins et les riz de veaux à l'estragon, rien qu'avec des abats et sur toujours le même mode opératoire.
Après l'école, Brigitte tenait déjà la caisse de la triperie familiale pour aider son petit papa qui venait de perdre sa femme après avoir tenté d'accrocher un jambon pour le faire sécher par la cage d'escalier de leur petit appartement Parisien du cinquième sans ascenseur.
- Un beau jambon vendéen de 20 kilos par l'escalier ! 800 tranches en l'air ! avait précisé son père, et de rajouter: Tu vois, c'est pas un métier pour toi ma fille... avec tes beaux nichons, tu devrais plutôt t'orienter dans les métiers du luxe !
Cette petite idée du luxe avait fini par faire son chemin lorsque Brigitte s'aperçut un jour que la chirurgie mammaire ça pouvait rapporter du fric, qu'à la mère d'une de ses meilleures copine ça lui avait coûté un bras et que pour continuer à payer ce bras il lui fallait faire entrer la nuit, des hommes par la porte de service de son immeuble pour pas que jase le voisinage.
- Ce sont ses heures supplémentaires, qu'elle dit !
- Et ton père il voit rien ?
- Ben non, il dort ! Quand tu dors, tu vois rien !
Les années de jeunesse de Brigitte se passèrent dans les eaux plates. Bonne élève elle ne manquait de rien et son père avait refait sa vie avec une femme plus forte. Diplômée de ses études secondaires et impatiente de voir la vie active, Brigitte se précipita sur les fiches métiers Onisep de la bibliothèque de son quartier.
- Quoi ? Pour chirurgienne c'est 11 années d'études ? J'viens déjà d'en passer une quinzaine pour ce foutu Bac ! Autant faire charcutière ou traiteuse !
La chance de Brigitte, c'est d'avoir rencontré Max. Max vendait des crânes d'hippopotames sur le marché.
- Ça sert à quoi ? lui avait demandé Brigitte le jour de ses 18 ans.
- A rien ! A faire joli, de la déco comme toi !
Elle faillit lui mettre une gifle comme on le lui avait appris à l'école en cours d'éducation civique puis dans un moment de lucidité, se rendit compte que finalement c'était le premier homme qui venait de la prendre pour ce qu'elle était et non pas pour ce qu'elle serait. Brigitte était belle et 11 années d'études auraient considérablement gâché sa jeunesse.
Les premiers temps avec Max furent pourtant difficiles. Il la prenait plus pour sa femme de ménage et sa cantinière que pour Sharon Stone ou Sophie Marceau. Elle lui essuyait ses crânes et lui préparait ses tripes avant de le laisser filer au marché pour sans doute aller draguer d'autres minettes. En évidant la panse et en épluchant les légumes, elle pensait à son petit papa qui avait travaillé tous les matins de sa vie pour pouvoir la gagner. Ne voulant pas finir comme sa mère avec un jambon sur la tronche, elle tapa du poing sur la table.
- Ça suffit ! J'en ai marre de faire ta bonniche, j'veux des restaurants, des salariés et des dividendes !
Voilà cher lecteur, le début de la vraie histoire de la restauration franchisée Hippopotamus.
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Les petits ruisseaux font les grandes rivières....
· Il y a plus de 3 ans ·mariec