L'étoile d'Abraham

L'étoile jaune bien brodée, Abraham a des doutes

Quelle est sa destinée, cette peur qui s'ajoute 

En voyant cette foule sur le quai de la gare

Tous ces gens n'exprimant plus rien de leurs regards

Son sixième sens lui dit de s'enfuir au plus vite

Oui mais c'est sans compter tous ces chiens qui s'agitent

Dieu que c'est angoissant, Dieu, il y croit encore

Ce qu'il sait de son sort, c'est l'étoile qu'il arbore

Il profite du soleil, encore quelques secondes

Car la porte se referme droit vers un autre monde

Sa conviction sur l'Homme sera réduite à mal

Preuve en est ce wagon pour transport animal

Abraham implorant de tout son cœur Moïse

Prie pour que ce voyage soit pour la Terre Promise

Il a soif, il suffoque, ne compte plus les corps

Qui s'écroulent à ses pieds, voilà les premiers morts

Fatigué, assourdi par les pleurs et les cris

Les prières à voix hautes, les essieux et leurs bruits

Les heures passent et enfin, il revoit le soleil

Ses rayons sont les mêmes, mais plus rien n'est pareil

Mais quel est donc ce camp sous allure de village

Délimité seulement par de l'épais grillage ?

Et quelle est cette odeur qui s'étend dans la nuit ?

On lui montre l'entrée, mais où est la sortie ?

Abraham est sommé de quitter ses vêtements

Et il voit ce qu'on fait aux désobéissants

Alors il s'exécute tant pis pour sa pudeur

La pire humiliation, et toujours cette odeur

Il tient encore à croire en l'histoire de la douche

Pourquoi se prendrait-elle sous des airs si farouches ?

Il n'a pas de réponse, ni l'imagination

Mais va suivre sans douter des réelles raisons

Abraham s'endormant, a tout à coup compris

L'étoile jaune, les odeurs,  ce terrible mépris

Oui mais il est trop tard ils ont eu la main mise

Sur l'histoire d'Abraham et sur sa Terre Promise