Lettre à ma grand-mère

Stéphan Mary

Elles sont décédées jeunes, beaucoup trop jeunes mais sans elles nous ne serions pas là... L'entre deux guerres comme une fête ? Non, pas pour tout le monde !

A vous mesdames qu'hélas nous ne connaissons pas

Vous qui n'avez pas eu le temps de nous ouvrir vos bras

J'ai voulu savoir qui vous étiez je vous ai cherchées partout

Vous nées en ville ou à la campagne sans savoir réellement où

 

Parce que vos pères sont morts sous les bombes de l'ennemi Allemand

Et vos mères souvent décédées dans les tranchées de l'accouchement

Celles qui sans trémolo dans la voix furent enfants adoptées par la nation

Envoyées à la campagne creusant sur vos vies sans âge les premiers sillons

 

Pendant que les soldats se battaient les femmes nourrissaient la terre

Aidaient les citadines qui partaient en campagne contre l'adversaire

Vous vous êtes battues les habits en lambeaux et le cœur en haillons

Continuant à faire vivre un pays permettant de nourrir sa population

 

14-18 l'armistice Les hommes sont revenus mourant de faim et démolis

Vous les avez soignés leur offrant nourritures boissons jusqu'à votre lit

Une génération est née malade chétive si loin au fin fond des campagnes

La tuberculose les faisait se rencontrer au sanatorium l'amour pour la gagne

 

Dans cette jeunesse née après-guerre en 1920 il y a eu Toi. Toi l'orpheline qui vécu dans les monts d'auvergne, la gosse de la ville à la campagne qui bien que malade, réussis à faire notre fierté en devenant institutrice. Toi ! Celle-la même qui a manqué à la grande histoire familiale alors que tu avais survécu à l'Histoire de la guerre

 

Toi 

 

Celle qui fut à 10 ans reconnue pupille de la nation

Celle que l'on envoya à la campagne quittant Paris

Celle qui a humé l'essence des grands volcans en fusion

Celle qui en serrant des dents se fit violer par la maladie
Celle qui lutta en sana en dedans comme en dehors mais dehors c'était la mort

Celle qui à 20 ans épousa le père de ses trois enfants charmeur passionné
Celle qui fit trembler la mince paroi d'une route longeant le précipice du corps

Celle qui vécut très peu dans le mince sillage d'un champ jamais labouré

Celle qui n'a pas eu le temps de vivre parce que la mort lui a tranché la vie

Celle qui nous a laissé une béance d'affection

Celle qui mourut à trente ans sans concession

Celle à qui nous ne dirons jamais assez merci
Toi qui a été et qui seras quoiqu'il arrive

Celle sans qui nous ne serions pas en vie

 

Sache que tous les jours qui passent tu manques à ma mère

Sois sûre que nous t'aimons tu es notre vraie grand-mère


Merci à vous toutes femmes et mères à qui je dédie ce poème

Merci à Toi à qui nous aurions tellement voulu dire "je t'aime"

 

Pour toi née le 2 octobre 1920 à Paris

Partie bien trop tôt Le 6 septembre 1951 à Clermont Ferrand


Photo de Laèf Lafée 
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