L'hypnose au service de la vérité?
divina-bonitas
Ce matin j'entends à la TV parler du rôle possible de l'hypnose dans le cadre d'affaires judiciaires, l'hypnose comme solution pour se remémorer des souvenirs enfouis, ou peut-être bien "enfuis". Le spécialiste interrogé ne semble pas certain du résultat.
Je décide de parler de mon expérience. J'ai eu consulté des praticiens en hypnose médicale, en fait plusieurs avant d'en trouver un qui me permit d'emblée de comprendre la différence de pratique et de résultat avec ses confrères ou plutôt consœurs. Je ne sais pas si c'est une question de talent, de pratique, d'intuitu personæ, de feeling, de relation de confiance entre soignant et soigné, de température de la salle ou de son éclairage, de la capacité du patient à lâcher prise, mais entre les premières et le dernier il n'y a pas photo. J'ai perdu beaucoup de temps dans le premier cas en ayant la sensation vague d'errer à la frontière du présent, de faire des efforts conscients pour me souvenir, récupéré des mémoires enfouies dans le second cas avec facilité et en me sentant rassurée.
Et quand une séance de ce type se déroule bien, sans résistance du patient, je ne crois pas qu'il soit possible de tricher ou d'inventer quoi que ce soit. La voix change, une voix qu'on ne peut pas avoir hors hypnose, le corps se manifeste différemment. Les mots et la gestuelle sont ceux qui correspondent à l'espace temps des souvenirs sans aucun doute possible. N'importe quelle caméra pourrait en témoigner. Les images qui viennent sous hypnose sont différentes de celles dont on voudrait bien se souvenir. En fait elles sont extrêmement nettes et neuves, jaillissent de manière évidente, sans filtres.
La clef me semble rester comme entre n'importe quel patient et soignant, une confiance réciproque qui permet de recouvrer des souvenirs parfois douloureux en ne se sentant ni jugé ni soumis ni scruté et encore moins contraint ou manipulé. Ce doit avant tout être un espace de liberté. Et une bonne séance permet de se souvenir ensuite consciemment sans honte ni culpabilité, sans reproches ni regrets, parce que la séance doit inclure un moment réparateur, parfois un temps de pardon à soi-même absolument indispensable. Je ne crois pas qu'il puisse y avoir de séances de ce type sans conscience élevée du praticien, sans spiritualité partagée, toute question de religion mise à part. Pour se rappeler il faut se connecter d'abord à soi, à sa partie la plus élevée et parfois la plus secrète mais aussi la plus vraie, sans risquer quoi que ce soit d'invasif ou nocif de la part du praticien.
Je reste persuadée que ce peut être une solution pour ceux qui le désirent, mais pour que la vérité émerge, il est sans doute indispensable qu'ensemble, soignant et patient soient sur la même longueur d'ondes et chacun à sa place. Si certaines pratiques médicales incluent parfois des échanges déséquilibrés, le médecin sachant adoptant une posture didactique vis à vis d'un patient soumis et peu ou prou dépendant, je ne pense pas que ce soit possible ni souhaitable dans le cadre de l'hypnose car pour que cela fonctionne correctement, chacun doit être respecté dans son égalité d'être humain. Accepter de pratiquer ce type d'introspection demande énormément de courage, courage qui se trouve vite en berne si le patient se sent jugé et critiqué, d'humilité aussi de part et d'autre, de compassion pour le patient, d'amour inconditionnel pour soi et autrui pour chacun des acteurs.
Alors l'hypnose oui mais à condition que patient et soigné se fassent confiance. C'est peut-être ce qui peut coincer dans le cadre d'un exercice à visées judiciaires, qui va choisir le praticien ad hoc sur quels critères? Est-ce que le ressenti du patient vis à vis d'un praticien expert choisi par des tiers peut fonctionner? En quelque sorte, comme c'est le chiot qui choisit son maitre au chenil, c'est le patient seul à mon sens qui devrait rester décideur de son praticien.
Freud a le réel mérite d'avoir lancé la recherche, les recherches. De nos jours, oui, l'arsenal médicamenteux est redoutable. Pour une molécule "efficace", combien sont sournoisement destructrices ? L'hypnose ? Je crois à son efficacité humaine. Mais difficile d'avoir à chercher (parfois longtemps) le thérapeute avec qui passera le contact salvateur...
· Il y a plus de 6 ans ·En Afrique, où j'ai pas mal vécu, les psychiatres blancs n'hésitent pas à travailler avec les guérisseurs des petits villages, dont les rituels et méthodes guérissent, calment, redonnent au patient équilibre et conscience.
astrov
Bel exemple que cette entraide psy/guérisseurs.
· Il y a plus de 6 ans ·divina-bonitas
A la Salpêtrière, sous le contrôle de Charcot, Freud utilisa l’Hypnose pour repérer les souvenirs traumatisants des patientes, appelées improprement hystériques, à l’époque. Mais il abandonna le procédé, car si le trauma était identifié, il n’était d’aucun secours cathartique. Les symptômes persévéraient.
· Il y a plus de 6 ans ·Hervé Lénervé
Comme beaucoup de traitements, ce qui fonctionne pour les uns peut s'avérer inefficace pour les autres. Il ne suffit jamais à mon sens de découvrir la source d'un traumatisme pour le guérir. Beaucoup de gens savent qu'ils ne vont pas bien, leur trauma est identifié, ce qui ne leur permet pas pour autant de se sentir guéri. Savoir d'où vient le mal est une chose mais la guérison est un processus à mon sens complexe et propre à chacun. Les méthodes thérapeutiques ont bien évolué depuis Freud qui reste néanmoins un précurseur.
· Il y a plus de 6 ans ·divina-bonitas
Les méthodes sur la cure analytiques ne manquent pas, à chaque thérapeute la sienne. Mais l’ambition de Freud n’était pas seulement de soulager les névrosés de leurs symptômes, il était aussi de comprendre comment fonctionnait l’homme sain à l’observation clinique de l’homme malade. Oui ! Il était très ambitieux ! Il n’empêche que même si sa fiction du psychisme se révèle un jour inadaptée à l’aulne des nouvelles découvertes en neurophysiologie, pour l’instant même les psychiatres ont remis du concept psychanalytique dans leur DSM 4 ou 5. Sans la psychanalyse les symptômes observés n’ont aucun sens et un diagnostic n’établit qu’une thérapeutique médicamenteuse. Menteuse, la conception freudienne l’est certainement, pourtant elle reste aujourd’hui encore d’actualité. :o))
· Il y a plus de 6 ans ·Hervé Lénervé
Je suis d'accord et c'est une discussion que j'ai eu il y a peu avec ma meilleure amie qui est psy. Nous nous faisions la réflexion qu'on était passé trop brutalement de l'analyse sur divan aux thérapies comportementalistes ou autres méthodes censées être plus efficaces et rapides vs moins introspectives - EMDR par ex. Et oui aussi sur le fait que sans approche psychanalytique, on arrive à des aberrations thérapeutiques. Souvent aucun diagnostic n'est posé, tout étant attribué au grand fourre-tout de la dépression quand on ne sait pas faute d'avoir cherché, au burn-out chez l'homme et les cadres sup, et à la bipolarité chez les ménagères, au défaut d'éducation chez les ados,...et dans les cas posant vraiment question, on entend vite des diagnostics se succédant de maniaco-dépression suivi de bipolarité, puis de schizophrénie avant de dire que le malade est juste un enquiquineur manipulateur...ou que c'est un cas inédit et désespéré dont on ne sait pas quoi faire, qui ne rentre dans aucune nomenclature psy. Un certain nombre de ceux-ci atterrissent dans mon cabinet...Beaucoup trop de gens sont soignés par des chimies lourdes et désastreuses du fait de diagnostic posés à la hâte et sans approche psychanalytique, sans humanisme non plus. Je ne pense pas que la conception freudienne soit menteuse mais juste qu'elle doit être complétée par d'autres approches ou intégrée au sein d'autres protocoles, exploitée peut-être différemment, pas forcément dans le cadre médical strict d'ailleurs. Je crois qu'on a beaucoup à gagner à tenter de soigner les personnes en souffrance en croisant différentes approches thérapeutiques de façon à soigner de façon holistique.
· Il y a plus de 6 ans ·divina-bonitas