Ligne Coupée

eaurelie

Je veux vivre dans un phare, plus tard, Papi. Je veux vivre au milieu de nulle part et surtout, ne pas avoir le téléphone. Seulement de l'eau. De l'eau à perte de vue et à jamais...

J'aime pas les gens. J'aime pas les gens qui ont pas de volonté. J'aime pas les gens qui savent pas couper les ponts. J'aime pas les gens qui reviennent sur leur décision. J'aime pas les gens qui pleurent des mois. J'aime pas les gens qui pleurent parce qu'ils ont mal d'une situation et qui remettent la tête dedans en sachant parfaitement qu'ils en ressortiront en miettes. Et j'aime pas, et ce, par dessus tout, les gens qui jouent les étonnés quand ils souffrent encore plus et qui ouvrent grand les portes à Dame Détresse et Sir Suicide. 

J'aime pas les gens qui réalisent rien. J'aime pas les gens comme çà. Les gens qui, du bas de leur déchéance, vont quand même réussir à se hisser à ton niveau et juste quelques millimètres de plus pour pouvoir te regarder de haut quand tu leur annonces, blasée et à la limite de l'écœurement, un Je te l'avais bien dit pas piqué des hannetons mais surement piqué de mépris. 

Et vous pensez quoi des gens français qui parlent en anglais à d'autres gens français? Moi, çà m'épuise. Déjà parce que j'y comprends rien et après parce que, bordel, assumons nos nationalités! 

J'aime pas ce genre de personnes. Elles se complaisent dans une piscine d'eau fétide et viciée en agitant grand les bras quand il en arrive d'autres camions citernes. Noie moi dans mon malheur, noie moi dans mon désastre, noie moi dans mon incapacité crasse à me relever, noie moi! qu'elles crient. Et moi, je peux pas. 

J'ai pleuré pendant des mois et ce, pendant des heures. Je vivais en pleurant. Un filet de morve et de larmes mêlées suivait tous mes pas dans mon appart. Je vivais avec des lunettes de soleil dans la rue. Les murs de mon appartement tintent encore de mes hurlements de douleur et de mort. J'ai mis 6 mois à me remettre de mon Premier Amour. J'ai mis 8 mois pour arrêter de claquer un fric fou en mouchoirs (et directement passer aux rouleaux de papier à tout faire), de porter des lunettes de soleil ridicules en plein hiver grisâtre, et de penser à ce gars dans les bras de sa nouvelle copine. Dans 25 jours, çà fera 1 an pile qu'on ne s'est plus adressé la parole. Et je m'en suis remise. La douleur m'a presque persuadée de me dépecer. J'avais tellement mal que je voulais sortir de ce corps. M'extraire de ces amas de chairs brûlants et hurlant de souffrance. Chaque fibre me faisait souffrir, chaque mouvement. Le pire était les pensées. Incapables à contrôler, incapables à combattre, elles m'envahissaient tout le cortex pour me forcer à remettre la tête dedans. Allez, regarde. Allez, imagine les au lit. Allez, imagine les, main dans la main, dans la rue. Allez, imagine ses affaires mélangées aux siennes dans la machine du dimanche. ALLEZ! Les plus infimes détails d'une vie quotidienne impossible à partager avec lui ont été les plus terribles à surmonter. Pas les souvenirs, non. Eux ont été les premiers à être classés dans des dossiers Photos. Mais les images, les suggestions, les hypothèses, les vérités, les fausses rumeurs, les vraies déclarations, les partages, les complicités, les déménagements, les enfants en route, les cris de jouissance, les hurlements de bonheur. Eux ont été les pires. Les pires; Parce que je les savais vrais. Tous. Toutes ces images, les unes après les autres, m'ont éclaté la tête. J'en ai supplié tous les dieux de la création de me faire grâce de l'oubli. D'un Alzheimer précoce qui me ferait annihiler toute trace de ces merdes mentales. 

Mais je suis là, un 2 Mai 2014, vivante et bien droite dans mes ballerines. Je suis là et j'ai la Cuirasse. Je suis seule, avec une fugace et volatile envie de réveiller mon corps à la vision d'un nouvel Amour. L'occasion viendra, ou ne viendra pas. J'ai décidé de vivre. 

Alors, pour avoir souffert mille morts, comme disent les Anciens, je dis haut et fort que je déteste les faibles. Les faibles qui se laissent mourir sur le bas-côté. Je les déteste. Parce qu'on est tous capables de se relever, que je les aide, que je perds mon temps à les aider alors qu'ils veulent juste rester dans leur merde. Alors je vous le dis : je vous déteste quand vous faites vos victimes sans volonté. Je vous déteste. 

Mettez vous un coup de pied au cul et choisissez : mourir ou vivre. Et mettez à exécution. Histoire qu'on en finisse. 

  • C'est incroyable comme vous décrivez avec justesse ce qu'il se passe (en général) quand on vit ce deuil amoureux et comme vous mettez en lumière l'absurdité folle de nos réactions.J'aime beaucoup votre texte,il est criant de vérité!

    · Il y a presque 10 ans ·
    942463 10201421314515736 1298825630 n

    stonemarten

Signaler ce texte