L'île verte : Chants 11 & 12
Sébastien Bouffault
11 - Ensemble
Tu restes quelques mois
Sur cet îlot perdu,
Apprends comme il se doit
Cette langue inconnue.
Tu vois qu'elle est timide
Mais lorsqu'il fait bien froid,
Que vos corps sont rigides,
Elle vient contre toi.
Elle te prend la main,
La serre fortement
S'en va dans un chemin
Bien abrité du vent.
Elle est un peu féline,
Elle ne parle pas,
Mais se montre câline,
Te caresse le bras.
Son sourire te fige,
Tu es hypnotisé
Ses grands yeux verts t'obligent
À ne pas résister.
Quand le soleil se meurt
Et embrase le ciel
D'un feu de cent couleurs,
Alors sa peau de miel
À la douceur extrême
Finit de t'emporter.
Tu lui dis que tu l'aimes,
Puis cesse de parler.
Le plaisir est intense,
Il te fait oublier
Tes malheurs, tes absences,
M^me les cocotiers
De cette jolie île
Ne sont plus rien pour toi.
Tout semble bien futile
Dans ces grands moments là.
Tu n'as plus de questions
Qui t'effrayent, te tourmentent.
C'est la libération
Et enfin la détente.
C'est un autre univers
Où tu crois tout possible.
Où ton corps est fait d'air
Et devient invisible.
Mais le rêve prend fin,
Doucement, tu t'éveilles.
C'est déjà le matin
Mais tu as grand sommeil.
12 - La recherche.
Comme chaque matin,
Tu t'en vas sur la plage
Prends de l'eau dans tes mains
Et la porte au visage.
Où est donc ton amie ?
Tu l'appelles, en vain.
Tu vas manger des fruits,
Elle reviendra bien.
Ainsi passent les heures
Elle ne revient pas.
Puis soudain, tu prends peur.
Tu cherches alors les pas
De ses pieds nus si fins
Enfoncés dans le sable.
Il ne reste plus rien.
Tous ces grains bien instables
Balayés par le vent
N'ont conservé de trace.
Tu marches alors rêvant,
Cette absence t'agace.
Est-elle magicienne
Pour avoir disparu
Un matin dans la plaine
De cette île perdue ?
Tu ne peux effacer
De tes yeux son visage.
Tu ne peux te lasser
D'admirer ce mirage.
Elle est venue à toi
Comme elle est repartie.
Dans ces profonds sous-bois,
Dans ce lieu si maudit.
Tu fais le tour de l'île,
Mais ne trouve personne.
Tes espoirs sont fébriles,
Tombent comme en automne
Ces feuilles desséchées.
L'océan est très calme.
Tu te mets à pêcher
Mais cette jolie femme
Ce fantôme gracieux
Vient hanter ton esprit.
Tu regardes les cieux.
Là-haut, Dieu a décrit
Dans ces épais nuages
Le souvenir d'un soir,
Son délicieux visage,
Et la fin d'une histoire.