L'île verte : Chants 13 & 14

Sébastien Bouffault

13 - Le nouveau départ

  

Tu ne peux oublier

Sa silhouette si belle

Qui lors d'une soirée

Contre sa peau de miel

 

Est venue te chercher.

Tu l'as perdue, hélàs !

Tu ne fais que pleurer

Tout ce malheur te lasse,

 

Tu te dis « à quoi bon,

Je ne suis pas coupable,

L'expérience a du bon

Bien que très regrettable. »

 

Tu te mets à attendre

En regardant la mer,

Tu te laisses surprendre

Par le vol éphémère

 

De quelques gros moustiques.

Ton paradis soudain

Te paraît diabolique.

Adieu monde serein.

 

Pris de crises d'angoisse

Sur le sens de ta vie,

De virtuelles menaces

Et de la peur d'Autrui,

 

Tu bascules en un monde

Inconnu et terrible.

Dans ta tête, tout gronde

En un fracas horrible.

 

Tu perds tous tes repères,

Tes souvenirs se mêlent,

Tu deviens solitaire

Et la vie n'est plus belle.

 

Tu vas dans la forêt

En te tenant le crâne.

Tu veux un couperet

Ou bien te pendre aux lianes.

 

Tu te tords les chevilles,

Tu butes sur des souches.

Le cri des volatiles

Et des bêtes farouches

 

T'effraient et tu prends peur.

Tu veux rentrer chez toi,

Tu tombes dans un leurre

Profond, obscur et froid.

 

Au bout de quelque temps,

Tu entrouves les yeux

Et vois un mur tout blanc :

Un bien étrange lieu.

 

14 - La Galerie

 

Dans ta course démente,

Tu tombes dans un piège

Achevant la tourmente

Qui depuis peu t'assiège.

 

Devant toi un couloir

Dont les murs peints en blancs

S'engouffrent dans le noir.

Tu les suis prudemment.

 

La galerie descend.

Tu sens sur ton visage

Courir un petit vent.

Très vite le paysage

 

Vire à l'obscurité.

Ce couloir est sans fin ?

Tu vas, traînant les pieds

Sur ce curieux chemin.

 

Tu devines à tâtons

Que ces parois de pierre

Ont d'étranges inscriptions

Gravées, là, sous la terre.

 

Soudain, tu tends l'oreille.

Des bruits sourds te parviennent

Comme un essaim d'abeilles,

Bourdonnent : tu deviens blême.

 

Ils te sont familiers,

Tous ces bruits entendus :

Cris de joie, pleurs, bébés,

Tous ces êtres perdus,

 

Ces êtres du passé

Sont revenus à toi !

Continuant d'avancer

Bientôt tu aperçois

 

Une très grande salle

Constituée de colonnes.

Une lueur très pâle

Alors que tu tâtonnes

 

Te montre le chemin.

Alors, tu vas vers elle.

Un petit parchemin

Et quelques aquarelles

 

Sont accrochés aux murets.

Tu t'approches vers elles

Et vois que ces portraits

Sont ceux d'amis fidèles.

 

Tout ce que ta mémoire

N'a pas pu retenir

Est gravé dans le noir,

Temple du souvenir.

 

 

 

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