L'île verte : Chants 5 & 6
Sébastien Bouffault
5 - Le départ
Te voici sur la route
Des flots imprévisibles.
Tu vas sans aucun doute
Les rendre plus paisibles.
Ton radeau de fortune,
Vraie coquille de noix,
Dévale sous la lune
Des montagnes, des toits.
Tu t'accroches à la barre,
Pour toi, pas de répit,
A peine le départ,
Que dans le port sévit
Une grosse tempête.
Tu ne peux revenir,
Ne baisse pas la tête,
Continue de t'enfuir !
La coque toute entière
De ton embarcation
Craque, quelle misère !
Et quelle déception !
Mais c'est ça l'aventure,
Un risque permanent,
Perdu dans la nature,
Égaré au tournent,
Tout n'est plus qu'inconnu,
Le destin, incertain.
Tu te retrouves nu
Et ton monde serein
Est remis en question.
Si demain n'était pas ?
Ton imagination
Fait les quatre-cents pas.
Tous ont dit de cueillir
La rose de la vie
Sans penser à vieillir
Et à tous nos soucis.
Une vie, c'est un jour
Où le soir on se meurt,
Et l'on renaît d'amour
Le matin tel une fleur.
L'oiseau de feu, c'est toi !
Tes milliers d'existences
Font de toi l'oiseau roi.
Aie de cela conscience.
Jette toi dans le vide
Et maîtrise ta peur.
Garde ton air placide
Mais mets y plus de cœur.
6 - Le calme
La tempête est terrible
Tu prends de l'assurance.
L'exercice pénible
Devient ta préférence.
Sur ton embarcation,
Au milieu de ces flots,
Nouvelles sensations :
Tu te sens matelot.
Tu aperçois le monde,
Du sommet de ces vagues.
Et à chaque seconde,
Ton bel esprit divague.
Tu crois devenir fou,
Dans une liesse folle,
Tu crois maîtriser tout,
Pour toi ton radeau vole !
Sous une voûte grise,
Un petit peu de bleu
Fait fondre la banquise,
Le soleil généreux
Repousse les nuages
À très grande vitesse,
Les flots deviennent sages
Et montrent leur tendresse
Et c'est une mer d'huile.
Le radeau glisse alors,
Sur cette onde tranquille
Où de doux reflets d'or
T'ouvrent une voie royale.
Tu es là, subjugué.
De la nature le bal
Te fait tout oublier.
De petits dauphins jouent
Sortent leurs nez de l'eau
Vont taquiner ta proue,
Font tanguer ton bateau.
Tu ne regrettes rien,
Pour une telle scène
Dis-toi qu'il fallait bien
Quitter tes bords de Seine.
Que le bonheur parfois,
Se joue à peu de choses,
Qu'à quelques pas de soi,
Tout es un peu plus rose,
Qu'après une tempête,
Vient la joie du beau temps,
Qu'au dessus de ta tête,
Le ciel bleu est constant.