L'immondice

plumedesang

Petite nouvelle, inspirée par un commentaire reçu sur un autre texte.

Je me suis toujours demandé ce que je foutais avec une fille comme Lucie. Nous étions, pour ainsi dire, diamétralement opposés. Tandis que j'étais un homme aimant les plaisirs de la vie, ma compagne affectionnait tout ce qui avait trait au morbide. Véritable gothique dans l'âme, Lucie ne jurait que par le noir, n'aimait que le noir et broyait du noir. Même mes amis, qui s'étaient pourtant montrés patients avec mes ex, et dieu sait que j'en ai eu des timbrées, avaient placés les paris sur la date à laquelle j'allais la larguer. Honnêtement, même moi, je ne savais pas ce qui m'était passé par la tête le jour où j'avais accepté de sortir avec elle, ni même ce qui passait dans la sienne, d'ailleurs. Ces questions existentielles, cependant, n'avaient atteint leur paroxysme qu'aujourd'hui.


Lucie attendait un colis. Une personne normale n'en aurait rien à carrer d'un détail pareil, mais Lucie était tout sauf normale. C'est ainsi, qu'à une heure moins le quart, le facteur sonna. Lucie s'empressa d'aller ouvrir pour récupérer le paquet. Lorsqu'elle l'ouvrit et le brandit sous mes yeux, les mots me restaient en travers de la gorge, ainsi que mon repas de midi. Ma compagne exhibait fièrement une immondice sans nom, à mi-chemin entre une poupée qui aurait pu appartenir à un membre de la famille Addams et Chucky. L'horreur avait une tête d'où suintait un liquide noir des plus répugnants, des yeux rouges globuleux, ainsi qu'un corps noir couvert de moumoute bon marché censé imiter des poils. Malgré mes suppliques pour que l'objet parte illico-presto à la poubelle, Lucie l'exposa bien en vue, pour mon plus grand désarroi, dans notre chambre à coucher.

Je décidai de lui faire la gueule pour le reste de la journée...


...Et je continuai au moment de nous mettre au lit. Je dormais profondément lorsque je fus tiré des bras de Morphée par une caresse insistante sur ma cuisse. Ainsi, Lucie voulait faire la paix. Je ronchonnais, la caresse se fit plus insistante encore. Cédant finalement à ses avances – l'une des raisons pour laquelle je ne l'avais pas encore quittée était que Lucie était un très bon coup – je laissai glisser ma main entre ses jambes. Elle était déjà mouillée à l'idée de ce qui allait suivre. Cela m'excita. De ma main libre, j'empoignais fermement sa chevelure afin de l'embrasser. Là aussi, je rencontrais un liquide poisseux et visqueux. Je me relevai brusquement et allumai la lumière, décidé à élucider le mystère de cette étrange substance...


...Et vis Lucie, les yeux révulsés, les entrailles à l'air libre, pissant le sang par tous les orifices de son corps. Je hurlai à m'en vriller les tympans. La caresse sur ma cuisse se fit de nouveau sentir, me rappelant que si Lucie était morte, alors je n'étais pas seul. Je tournai lentement la tête...

…Et l'horrible poupée, avant que je n'ai le temps de crier à nouveau, me trancha la gorge.

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