Luberon Rouge Sang...Suite et Fin

Christian

Pour toutes celles et ceux qui m'ont suivi dans cette longue séquence ADN sur les pistes du Luberon. Merci de vous lire les épisodes précédents pour mieux comprendre cette suite et...Fin.

Battue aux sangliers.

Aveuglés par les projecteurs braqués sur l'hélico personne ne voit une forme sombre ramper du lac vers la berge. Elle s'enfonce et disparait dans les fourrés.

Six heures du matin, les chasseurs se sont regroupés pour une battue dans les vallons du Luberon.

Les voitures avec les caisses des chiens se sont garées sur le parking de la Forêt de cèdres.

Le petit groupe de cinq chasseurs s'ébranle en direction du Portalas.

Arrivé dessous les crêtes, René donne ses directives à ses camarades de chasse.


— Jean et Louis vous prenez sur la droite du Portalas, José, Gilbert vous venez avec moi, on va descendre un peu sur la gauche. Vous pensez bien à vos sifflets.

Un coup long, si vous apercevez une bête qui vient vers vous et deux brefs si la bête vient vers nous et vice versa bien sur.


— Allez vite,  chacun à son poste, reprend Louis, on entend les chiens que Joseph vient de lâcher plus bas dans la vallée, ils vont faire remonter les bestiaux vers nous.


L'aube commence à pointer, une brume bleu plane sur les vallons en contre-bas de l'arche du Portalas, les aboiements des chiens leur parviennent comme étouffés par la fraicheur du brouillard.

René contemple le sommet des Alpilles rosissantes à l'horizon. Il a déjà vu maintes et maintes foi ce flamboiement de création du monde, jamais il ne se lasse de ce spectacle divin.

Soudain, le hurlement des chiens excités se rapprochent plus vite qu'il ne le pensait.

Il arme son fusil, engageant de fait les balles de 7,64 de taille à terrasser un gros mâle lancé au galop.

Deux coups de sifflets brefs, c'est pour lui et son groupe, René fait signe au deux autres de se tenir prêts.

La brume, avec l'arrivée du soleil redescend, sur les flans du vallon.

Une boule noire, suivie par la meute de chiens grimpe à toute vitesse la caillasse qui remonte vers le Portalas.

La bête arrive sur la crête à moins de 100 mètres de leur fusil. Soudain elle s'arrête et fait face aux chiens. Réné et ses collègues voient alors deux chiens voler dans les airs, propulsés par cette bête noire dressée sur ses deux pattes.

Complètement subjugués, les chasseurs en oublient de viser ce monstre.

Retombant sur ses quatres pattes, la bête se dirige vers l'autre groupe.

René prenant conscience du danger pour ses amis, il crie à l'adresse de son groupe.


— Feu à volonté, il faut le stopper immédiatement.


René et ses amis sont de fines gâchettes,  leurs coups ne ratent pas la cible, mais la bête continue de courir.

Jean et Louis s'apprêtent, eux aussi à faire feu sur la bête criblée de balles qui malgré tout fonce vers eux.

A leur grande surprise elle arrête sa course et se redresse à nouveau sur ses deux jambes laissant deviner une forme humaine mais à tête visiblement porcine.

Les chasseurs n'ont pas le temps de détailler la bestiole, un déluge de feu s'abat sur le torse du monstre au bord de la falaise. Son corps bascule dans le vide et disparait dans les crevasses du Portalas, 30 mètres plus bas.

Les chasseurs se précipitent à l'emplacement où la bête vient de tomber.

Les taillis et la végétation dissimulent le corps à leurs yeux rivés à la recherche du monstre.


— Punaise vous avez vu les gars, je n'ai jamais vu ça de ma vie, s'exclame Gilbert.

— J'ai bien cru ma dernière heure venue quand il s'est dressé, avant qu'on ne lui tire tous dessus, reprend Jean.

— Je me demande si on n'a pas tué le fameux monstre qui a dévoré les randonneurs ici même, on devrait en parler aux gendarmes, s'inquiète José.

— On sait bien tous ce que l'on a vu, maintenant je n'en parlerai à personne, constate fermement René. Tout d'abord là où la bestiole est tombée et avec ce qu'elle à pris dans le buffet, elle ne doit pas être trop reconnaissable. De plus toutes ces crevasses sont inaccessibles. A mon avis laissons les gendarmes tranquilles, toute cette affaire n'a pas fait une bonne presse pour la région. Les restaurateurs se plaignent déjà d'une chute de chiffre d'affaires de 50%, si en plus on vient en ajouter une couche, mon beauf, à Bonnieux il n'aura plus qu'à mettre le clef sous la porte.

— Je crois que tu as raison, répond Louis. 


Ils opinent tous du chef et commencent de retourner sans un mot vers le parking les fusils cassés sur les bras. Ils savent, de toute façon, qu'il leur sera difficile de conter leur aventure, les gens la prendrait pour une galéjade


Epilogue.


Franck s'est décidé à rendre visite à Laetitia, elle l'a invité à voir son son garçon nouvellement né.

Après toutes ces drames horribles dont elle a été la première victime,  Laetitia a décidé de conserver son bébé estimant que c'était pour elle la seule chance de retrouver une vie normale. Par la suite, les deux mamans, la sienne et celle de Quentin s'étaient réconciliées autour de son projet de vie. 

La grossesse de Laetitia n'a pourtant pas été de tout repos, rapidement l'échographie a fait apparaitre deux foetus bien séparés, un apparemment normal et un autre complètement difforme. Tout le monde s'est accordé, Joseph son oncle en premier, pour penser que ce ne pouvait  être que le résultat du viol par le monstre, Laetitia en était aussi persuadé suite à ce que lui avait confirmé le sieur Gianelli, propos dont elle n'avait parlé à personne de peur qu'on ne la croit folle. Il lui fut retiré pour permettre un développement normal à l'autre.


Pour Franck l'affaire est désormais classée bien que nul corps n'ai été retrouvé au fond de l'Etang de la Bonde.

Il peut désormais archiver la photo de Giovani Gianelli. Aurait-il pu imaginer en voyant cet homme à la chevelure et barbe brune, avec un regard bleu azur, qu'il deviendrait un monstre assoiffé de sang ?  Franck ne peut s'empêcher de penser à l'adage :  "l'habit ne fait pas le moine".


Il se rend chez la mère de Quentin, à Robion. Elle a proposé à Laetitia de l'héberger avec son bébé dans sa villa qui dispose de plusieurs chambres.

Franck est accueilli comme si il était un membre de la famille. Toutes les épreuves traversées ont créé un lien fort. Il n'est nulle besoin aux un et aux autres de se rappeler un drame dont ils ont été les acteurs ou les victimes.


— Entrez Franck ! Si vous saviez comme votre visite nous fait plaisir à toutes. La mère de Quentin l'embrasse sur les deux joues.


— Comment se porte Laetitia, j'ai appris par Joseph son oncle, que l'accouchement s'est finalement très bien passé.


— Ah, oui quel soulagement, mais venez, Laetitia vous expliquera elle même.


Franck est conduit au salon ou Laetitia, à sa grande surprise allaite son garçon.


— Bonjour Laetitia, montrez-moi ce beau bébé, tout le monde m'en parle, comme la 8ème merveille du Monde.


— Franck, c'est vraiment gentil de passer, cela fait si longtemps et tout est passé si vite ! Valentino à l'air d'être bien rassasié je vais l'enlever du sein sinon il va s'endormir et vous ne verrez pas ses yeux.


Laetitia, doucement, installe Valentino au creux de ses bras et lui dépose un baiser sur le front. Il soulève ses paupières un peu lourde et d'un coup regarde Franck d'un regard bleu azur affirmé, très étonnant pour un bébé de quelques jours.

Surpris Franck se recule. Ce regard,  il vient de le croiser ce matin même en rangeant son bureau ! Un sentiment étrange l'envahit, il l'a déjà connu ! Son monde bascule à nouveau, sa raison est mise à mal. Il cherche une chaise pour s'assoir.


— Tout va bien Franck  ? Demande la mère de Quentin.


— ça va, ce doit être le surmenage, cette enquête m'a certainement fatigué plus que je veux me l'avouer.


Il donne le change, mais Franck a pu se forger, malheureusement, un culture approfondie sur la génétique. Il sait que ce regard ne peut être du au hasard. Il sait aussi qu'il n'a pas le droit de détruire, par ses doutes, le nouveau bonheur de Laetitia et de sa famille.


Laetitia vient le tirer de ses sombres pensées.


— Franck je voulais vous demander quelque chose.


— Je ne peux rien vous refuser Laetitia, vous le savez bien !


— C'est parfait ! Franck accepteriez-vous d'être le parrain de Valentino ? Qui d'autre que vous pourrait un jour répondre à ses futures questions sur ses origines.


Franck n'y avait pas réfléchi, mais c'est finalement la bonne réponse  au dilemme qui vient l'habiter à l'instant.


— Oui, Laetitia, avec plaisir, mais vous avez raison je n'ai pas le choix, seul vous et moi seront en mesure d'éclairer, peut-être, un jour ses origines et de l'en protéger.


Laetitia ne pouvait comprendre toute la portée de la dernière phrase de Franck, du moins l'espérait-il.

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