L’un perd et manque

Aloysius Isidore Dambert D'eaucloret

Le verbe aimer est un des plus difficile à conjuguer : son passé n’est pas simple, son présent n’est qu’indicatif et son futur est toujours conditionnel. (Jean Cocteau)
JE T'ABIME


S'aimer si vite et se le dire, puis, plus rien ; se quitter et te maudire. 
Se sentir abandonné et si sûrement rejeté par la femme de ses rêves, 
Il n'y a rien, me semble-t-il, de pire douleur lancinante pour le cœur. 
Je ne peux rien y faire, tout est encore bien là, trop réel, je pense à toi. 
Les premiers pas de l'amour étaient rapides, passionnés, si sublimes, 
Tout se range à leur puissance, toutes les difficultés alors se tassent, 
Toutes les dissensions se paralysent, tout marche enfin à son bon gré. 
Mais quand l'amour s'éteint, toute la crudité de la vie concrète renaît, 
Les trous se creusent comme ravins et le gravier grandit comme piton. 
Quand l'amour devient triste, toutes les autres affections se calment, 
Je n'arrive pas à m'expliquer ce qui peut se passer alors dans une âme 
Ce qu'y se gagne par le bonheur est soudain perdu dans le rude drame. 
Celui qui n'a pas connu cette douleur d'être trahi par l'être qu'il aime, 
De ce qu'il aime avec passion, de toutes ses forces, de tout son cœur, 
N'a qu'une très faible idée des peines qu'on peut éprouver dans la vie. 
Si tu savais à quel point l'idée même de ne plus te voir est déplaisante, 
Et de ne plus entendre le son de ta voix à mon oreille me laisse vide. 
Cette pensée me fait plus de mal que le mal qui m'emporte si loin de toi. 
Nos rêves n'étaient que leurres, les paroles d'hier sont mortes à jamais. 
Le bonheur espéré fuit mon âme éperdue, comme un sourire négligé. 
Ton ptit cœur libre, vif et léger n'était surement pas fait pour le mien. 
L'amour pour toi, c'est une distraction ; pour moi, sérieux, c'est la vie. 
Belle au-dessus de toutes les femmes, comment celui qui a pu t'aimer 
Peut-il te rendre si revêche, sauvage, hautaine et méchante à ce point ? 
Misère est l'amour pour celui qui vit dans la passion, et boit son poison. 
Quand l'amour au loin s'envole, heureuse celle qui si vite s'en console ! 
Il est des cœurs tendres et émus, qui déchirés, saignent trop longtemps. 
Des torts méconnus tuent l'amour immédiatement et irréparablement, 
Devant ces torts cruels, un cœur fier et délicat cesse aussitôt de battre. 
L'amour, source de ravissements, d'extases, de si charmantes illusions, 
N'est souvent qu'une souffrance, une torture et une amère déception.

 

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