Lyel

redisblacklove

Quand Philae tomba nez à nez avec Lyel, elle cru d'abord à un signe de la vie lui disant qu'elle arriverait à passer à autre chose. Mais plus la jeune femme apprenait à la connaître, plus elle songeait à une mauvaise blague.

Lyel, seulement âgée de 14 ans avait la maturité d'une jeune qui avait une vingtaine d'années, c'était pour cette raison qu'on lui donnait rarement moins de 18 ans, l'âge de Philae. L'écart n'était pas si grand, mais dans le contexte de l'adolescence personne ne songeait à une relation amicale ou amoureuse avec une personne ayant quatre années de plus.

Sans grande surprise, les deux jeunes bravèrent les idées reçues et se trouvèrent rapidement de nombreux points communs. Lyel voyait en Philae un modèle de sagesse et de responsabilités qu'elle n'avait pas encore pu acquérir. Mais malgré cette complicité naissante, la doyenne qui s'était éprise d'un amour grandissant de jour en jour pour la cadette tentait de le dissimuler. Elle voyait en elle la Zélie qui autrefois, s'était plantée en plein dans son cœur. Elle entamait une lente descente périlleuse dans les souvenirs et les sentiments naissants.

Malgré tout cela, il y avait un grand nombre de choses qui séparaient les deux adolescentes d'une belle histoire d'amour. La différence d'âge serrait prise pour un abus de Philae envers Lyel. L'ignorance de la cadette sur les sentiments pourrait être maladroitement utilisée. L'acharnement à vouloir aider sa belle qui, telle que le feu, pouvait rapidement se propager et tout détruire sur son passage, dont et surtout la benjamine. Tant de caractéristiques qui nuiraient à leur relation et à leurs deux êtres.

Mais Philae rêvait de cette amour, de plus en plus et à un tel point qu'elle envisageait de disparaître. L'idée d'être seule dans un monde parallèle avec sa Zélie-bis la rendait ivre de joie et la faisais fantasmer. Son état second se propageait dans toute son âme la rendant davantage accro. 


-


Un matin printanier, seulement trois mois après leur rencontre, Lyel qui venait de se réveiller alluma son téléphone portable. Une quinzaine d'appels manqués de son amie inondaient l'écran, ainsi qu'un message qu'elle s'empressa d'ouvrir, morte d'inquiétude qui lui serrait arrivé quelque chose.
Il n'y avait rien marqué d'autre qu'une adresse et une heure. Elle s'imagina le pire : le lieu d'un envisageable suicide, une fugue, en passant par l'hypothèse d'un kidnapping ou même d'une pulsion meurtrière qui aurait pu subvenir suite à une de ses crises de paranoïa. Le corps de la jeune tout entier était devenu neutre et incapable de faire quoi que ce soit pendant une bonne dizaine de minutes.

"23h29 : Sur notre premier banc."

   -


Philae attendait depuis bientôt deux heures sur ce banc qui était perdu au milieu de nul part et dissimulé entre des sapins, accompagnée de son sac à dos qui semblait vouloir dégurgiter ce qu'il avait pu avaler précédemment. C'était à cet endroit précisément qu'elles avaient échangé leur vrai première discussion. Plus d'une heure de pur plaisir pour la plus âgée qui dévorait les paroles de Lyel, se livrant sur sa vie.

Une silhouette au loin s'approcha d'elle. Il faisait déjà trop sombre malgré les deux lampadaires qui faisaient office de lumière pour être capable d'identifier la personne. Philae savait que c'était elle qui arrivait. La plus jeune s'avança, perplexe et pleine d'interrogation.
C'est sans dire un mot que Philae qui cachait un couteau fermement maintenu dans sa main gauche, le sorti. Elle s'étonna que l'objet de ses désirs ne veuille faire demi tour. Lyel qui noyait ses yeux dans le regard de la cadette semblait même plutôt curieuse.
A la grande stupeur de voir son amie lui sourire alors qu'elle possédait une arme blanche à la main, Philae hésita. Après une interminable minute sans autre réaction que ceci, elle lui demanda de fuir avec elle. Elle insista sur le "partir à l'aventure", "découvrir le monde" et surtout, "de s'aimer comme elles n'auraient jamais pu le faire avec quiconque, faire l'amour sous les étoiles et sous la brise de vent qui traversera nos chevelures, seuls habits car nos corps seront nus". Son seul désir était de s'enfuir sur un coup de tête avec la jeune.

Il ne fallu pas cinq secondes pour que Lyel lui brise ses rêves. Elle refusa de partir, d'abandonner ses repères et surtout de tenter de l'aimer plus qu'une amie. La jeune avait le cœur détruit. Son manque de maturité amoureuse avait fait que la seule chose que sa boîte noire retiendrait, serrait le désir de la plus âgée et non ses sentiments. A ses yeux, derrière ce modèle qui l'avait tant inspiré en ces quelques mois, ne se cachait qu'un foutu désir sexuel que Philae souhaitait assouvir en la prenant comme cobaye.

Une folie singulière que la cadette n'avait jamais pu voir s'empara de la benjamine. Cela la rendait tellement plus fragile et attirante, se disait-elle. Elle n'eut le temps de se remettre de ses émotions que la jeune s'empara de son couteau. Elle le regardait comme un trophée ou une des plus belles merveilles du monde. Philae, par expérience, savait que dans une phase de folie, nous pouvions agir sans mesurer les conséquences. Elle commença à trembler de tous ses membres et se pétrifia de peur.

Lyel ricanait nerveusement. Même un psychologue en hôpital psychiatrique hautement surveillé n'aurait pu déjà voir une personne devenir aussi terrifiante en une fraction de seconde, et surtout, sans raison apparente.

Elle s'amusa à tourner sur elle même, toujours sans quitter l'arme des yeux. Philae ne savait plus où regarder. Un coup elle apercevait Lyel, mais en fermant et rouvrant ses yeux, voyait Zélie se déhancher.

L'église sonna minuit. Déjà une demie heure de le cirque avait démarré et la cadette ne savait toujours pas sur quel pied danser avec elle. 

Au dernier retentissement de cloche, la plus jeune s'effondra au sol.

Philae ne comprenait plus rien, jusqu'à ce que ses yeux puisse s'habituer à la nuit après tant de mouvements. Lyel, inconsciente, baignait dans une marre de sang. Elle avait profité du détournement d'attention de l'église pour s'insérer le couteau dans la tempe.

La plus âgée pensait avoir tout perdu, jusqu'à ce qu'elle reconnu Zélie inconsciente au sol.

"Elle est revenue." pensa Philae. "Elle est revenue à travers la jeune et innocente Lyel et tout cela pour me montrer qu'elle serrait dans ma vie à jamais. C'était pour cette raison que j'ai aimé cette fille au premier regard, il ne s'agissait pas d'une jeune de quatorze printemps, mais de ma bien aimée Zélie qui portait son apparence. C'est une évidence. Toi mon seul et unique amour, tu es à présent devant moi en Zéyel. Une personne aussi pure que Lyel n'aurait pu perdre la tête comme tu l'as fais sans qu'il y ait de raison. Maintenant je le sais, Zéyel, c'est toi que j'aime et que je désire aimer jusqu'à mon dernier souffle."

Elle s'allongea à côté du corps de son amour inanimé et prit l'arme. Elle s'assura de déposer un baiser sur les lèvres de la jeune. "Qui pourrait s'imaginer un premier baiser semblable à celui-ci", pensa-t-elle d'un air ironique et désespéré. Philae prit soin de prendre la main de Zéyel avant de s'administrer la pointe du couteau en plein cœur en appuyant de toute ses forces.

                                                       -


Le lendemain matin, tout le monde ne parlait que du présumé double meurtre de deux jeunes femmes retrouvée allongées dans un terrain vague. Manquant de preuves, il y avait néanmoins une troisième trace ADN sur l'arme blanche du crime. Elle appartenait à une jeune fille disparue depuis dix années se prénommant Zélie.

L'affaire sera classée au bout de seulement 3 mois comme simple suicides.

Le temps identique à celui que Philae et Lyel auront appris à se connaître.

Le temps que Zélie avait mis à revenir comme Zéyel. 

Signaler ce texte