MAISON CLOSE : 69 Boulevard des dames.

Catherine Marie France Lavandier

A celles et ceux qui, contraints, ont du se plier à toutes les volontés ...Un marque-page au chapitre "Émotions de mes plus belles années " , dédicace à mes amants et maitresses du temps jadis.

Un ruban rose se délasse sous mes loupes de vieux médecin fatigué par ces années de labeur ; un regard se pose sur cette photo jaunie par le temps , brossée à l'encre de mon passé de jeune militaire , pendant les années de guerre où la souffrance était bien la seule à être heureuse car enfin elle possédait l'homme des nuits durant jusqu'à l'aube incertaine , maitresse victorieuse des champs de batailles aux cadavres mutilés , suintant sang et sueur , matonne aux yeux de vairs glapissante dans les couloirs de la mort au crépuscule  dans l'anarchie la plus totale ; les Gorgones infernales sont là , affamées , déchainées , hurlantes , dévorant la pitance du jour dans une orgie diabolique qui dévoile salle des banquets en fleurs, dévergondées pavées de diamants roses , esprits démoniaques nus , possédés en chemises , mignons aux cols blanchis , les héros du jour pendus à une verge rutilante , màt de jouissance , sanctuaire de l'homme et de son destin .


Mon rasoir est posé sur la table de nuit car je n'ai pas eu le temps , ni l'envie .

Il me reste toi , petite rose fanée , petite compagne de toutes ses années vécues dans cette chambre , au mobilier usé , mes chaussures détrempées sur le tapis. Que dirait ma mère si elle voyait un tel spectacle : mon rôle de jeune premier prend fin  avec l'aube naissante . Le clocher sonne cinq heures , les godillots des ouvriers cognent  le pavé ; mon heure préférée où j'aimais embrasser tendrement , avec  passion ,  ma femme avant de descendre , acheter nos croissants fraichement sortis du fournil d'en face pour partager ensemble en amoureux , ce premier repas de la journée !La tendresse envahissait nos mains , nos bras pour ne former qu'un , élan d'amour , plein de désirs , noyant rires et sourires dans notre café noir.


Et ce ruban , long et soyeux que tu portais la première fois ; ce moment unique où je t'ai tenu dans mes bras pour ma vie entière , pour toujours , pour ne plus jamais être seul .. Sans toi...Mes vieux souvenir d'un amour aujourd'hui disparu , se baladent devant moi , sans parures , me parodiant dans un décor de théâtre ; la dernière scène pour tirer ma révérence à la vie ...


En ce jour de fête ,

célébrant Saint Valentin ,

le sein se veut galant ,

amoureux ,

tendre ,

complice ,

caressant ,

nu ,

sans retenues ,

dans toute sa beauté ,

perfection d'un age ,

où l'enfance se confond

avec la mère ,

féconde ;

giron de la paresse ,

mes reins emballés ,

dans un ardent plaisir ,

étincelles d'amour ,

feu sensuel ,

embrassement délicat.


N'est_il pas en ce jour de fête galante , un endroit où je trouverai ma bien-aimée du jour , une femme charmante qui correspond en tous points à ce plaisir , inespéré pour ce vieillard que je suis ? Un endroit appelé Paradis des sens où je saurais conquérir , une dernière fois , celle qui m'attend en cette dernière heure ; la mort , complice des derniers instants et qui sous ce visage admirable de princesse égyptienne ,se présente à moi , comme la plus vertueuse , la plus désirable des compagnes .


A cette adresse ,

dont je vous parle ,

Mesdames , Messieurs ,

Vous trouverez ,

amantes ,

merveilles d'Orient ,

ou d'Occident ,

 parées des parfums ,

les plus rares :

la Myrrhe

pour nos

dévotions ,

nos diableries ,

libertines ,

 le Jasmin,

pour sa chevelure ,

cascade d'ébène et de soies ,

fluides ,

la Rose,

pour ce corps parfait

tel une idole ,

sculpture ,

éblouissante

de beauté ,

astre unique

d'un Maitre ,

Païen.


Excès de confidences ,

dans l' alcôve ,

revivant,

mon passé ,

sans concessions ,


Vous trouverez goulues ,

ou misères ,

suivant portefeuilles ,

ou enchères.


Quel homme refuserait la plus belle de toutes ,  une de ces dames de cœur alliée de ces instants complices , comblant humeurs et envies , réglant sens et harmonie , désireux satisfaire des plaisirs dont mon avidité ne saurait connaitre les noms... Ma connaissance du verbe se sent perdue dans cet immense brouillard  , dépourvu de raisons... seul dans un océan d'incertitudes , ma vue s'épuise dans ce silence de ténèbres qui approchent à grand pas , mes yeux se ferment , douloureux , sous cette lumière vive ,  multicolore avec ce parfum entêtant de paille et soufre , qui me met en mémoire , comme dernière image de ma vie passée mon vieux couvre-chef , ramené d'Orient , un endroit où habitait ma mère autrefois...


Le soleil pale ,

ne parvient pas ,

à éclairer ,

les murs sombres ,

du nid ,

mauvais présage ,

ou

superstition

d'un empereur déchu ;

complice

de la Belle Lorraine

de ma jeunesse , 

vertueuse pécheresse ,

j'ai vécu, sans le sou ,

galoches aux pieds ,

me promenant de régions en capitales ,

pour conquérir

richesses et fortunes ,

sans état d'âmes,

pour les faubourgs.


Ma Bêcheuse

est venue sauvée mon âme,

dans ce paradis de Défroqués ,

de souffleurs de soufre , 

hurlant

sous la lune

terreurs ,

et souffrances

d'êtres éthérés ,

sans Éden :

Cette histoire

du Monde

aux nuages de pourpre ,

 la Révolution

des sans-dents

aux vents sans limites,

déchainant

éléments ,

terres ,

forets ,

pour devenir

lagunes sableuses

aux fonds rocheux.


Seul l'horizon laisse paraitre l'homme construisant , bâtissant . 


Celle que tu deviens ,

sous le joug ,

restera la fille ,

de vertus ,

grandissant ,

dans le silence ,

d'une

pauvre novice ,

de maison close ,

sans vies ,

sans bonheurs ,

sans joies ,

riant de tes rêves

déchirés,

par un parvenu ,

sans âme,

de tes robes ,

fripées ,

délacées ,

par les mains ,

du hasard ,

qui gantées ,

nouent liens et destins , pour t'éblouir d'un diamant , d'une pierre qui sauront te ravir.


Mon fantôme disparait dans les brumes , vagues de l'âme écumant mon histoire , ma vie , mes rires , mes souvenirs , mes pensées les plus intimes , su l'Art d'aimer la plus belle de toute ...Cette faucheuse , inconsciente ,sauvage qui me tourmente , me domine , me ridiculise par son savoir  unique d'une Pénélope aux enfers , savourant les blessures de guerre d'un être décharné , sans sexe , ni age.Quelle raison ai-je de l'aimer si ce n'est mourir , heureux , sans regrets !L'attente fut si longue pour te trouver ; j'étais si misérable sans toi qu'enfin je peux de le dire .

Je t'aime à la folie , passionnément , pour toujours car tu es l'Être  créé pour me combler.

A nous tous les plaisirs , ceux d'ici , ceux d'ailleurs car ils seront sans fin , pour l'Éternité , pour toujours  , pour toi , mon âme sans laquelle je ne saurai vivre heureux....Ce pacte diabolique nous unit depuis tant d'années...et les siècles , millénaires à venir.

Un seul regret en te contemplant ; l'enfant qui aurait pu naitre d'une faucheuse et d'une main baladeuse , coquine , complice de tes badineries  ... N'aurait-il pas eu l'esprit de son père , ma chérie , mon cher ange ?


à mon homme que j'aime pour toujours ...Cathy

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