MAISON CLOSE : 69 Boulevard des dames.
Laurène J.Carol
Un ruban rose se délasse sous mes loupes de vieux médecin fatigué par ces années de labeur ; un regard se pose sur cette photo jaunie par le temps , brossée à l'encre de mon passé de jeune militaire , pendant les années de guerre où la souffrance était bien la seule à être heureuse car enfin elle possédait l'homme des nuits durant jusqu'à l'aube incertaine , maitresse victorieuse des champs de batailles aux cadavres mutilés , suintant sang et sueur , matonne aux yeux de vairs glapissante dans les couloirs de la mort au crépuscule dans l'anarchie la plus totale ; les Gorgones infernales sont là , affamées , déchainées , hurlantes , dévorant la pitance du jour dans une orgie diabolique qui dévoile salle des banquets en fleurs, dévergondées pavées de diamants roses , esprits démoniaques nus , possédés en chemises , mignons aux cols blanchis , les héros du jour pendus à une verge rutilante , màt de jouissance , sanctuaire de l'homme et de son destin .
Mon rasoir est posé sur la table de nuit car je n'ai pas eu le temps , ni l'envie .
Il me reste toi , petite rose fanée , petite compagne de toutes ses années vécues dans cette chambre , au mobilier usé , mes chaussures détrempées sur le tapis. Que dirait ma mère si elle voyait un tel spectacle : mon rôle de jeune premier prend fin avec l'aube naissante . Le clocher sonne cinq heures , les godillots des ouvriers cognent le pavé ; mon heure préférée où j'aimais embrasser tendrement , avec passion , ma femme avant de descendre , acheter nos croissants fraichement sortis du fournil d'en face pour partager ensemble en amoureux , ce premier repas de la journée !La tendresse envahissait nos mains , nos bras pour ne former qu'un , élan d'amour , plein de désirs , noyant rires et sourires dans notre café noir.
Et ce ruban , long et soyeux que tu portais la première fois ; ce moment unique où je t'ai tenu dans mes bras pour ma vie entière , pour toujours , pour ne plus jamais être seul .. Sans toi...Mes vieux souvenir d'un amour aujourd'hui disparu , se baladent devant moi , sans parures , me parodiant dans un décor de théâtre ; la dernière scène pour tirer ma révérence à la vie ...
En ce jour de fête ,
célébrant Saint Valentin ,
le sein se veut galant ,
amoureux ,
tendre ,
complice ,
caressant ,
nu ,
sans retenues ,
dans toute sa beauté ,
perfection d'un age ,
où l'enfance se confond
avec la mère ,
féconde ;
giron de la paresse ,
mes reins emballés ,
dans un ardent plaisir ,
étincelles d'amour ,
feu sensuel ,
embrassement délicat.
N'est_il pas en ce jour de fête galante , un endroit où je trouverai ma bien-aimée du jour , une femme charmante qui correspond en tous points à ce plaisir , inespéré pour ce vieillard que je suis ? Un endroit appelé Paradis des sens où je saurais conquérir , une dernière fois , celle qui m'attend en cette dernière heure ; la mort , complice des derniers instants et qui sous ce visage admirable de princesse égyptienne ,se présente à moi , comme la plus vertueuse , la plus désirable des compagnes .
A cette adresse ,
dont je vous parle ,
Mesdames , Messieurs ,
Vous trouverez ,
amantes ,
merveilles d'Orient ,
ou d'Occident ,
parées des parfums ,
les plus rares :
la Myrrhe
pour nos
dévotions ,
nos diableries ,
libertines ,
le Jasmin,
pour sa chevelure ,
cascade d'ébène et de soies ,
fluides ,
la Rose,
pour ce corps parfait
tel une idole ,
sculpture ,
éblouissante
de beauté ,
astre unique
d'un Maitre ,
Païen.
Excès de confidences ,
dans l' alcôve ,
revivant,
mon passé ,
sans concessions ,
où
Vous trouverez goulues ,
ou misères ,
suivant portefeuilles ,
ou enchères.
Quel homme refuserait la plus belle de toutes , une de ces dames de cœur alliée de ces instants complices , comblant humeurs et envies , réglant sens et harmonie , désireux satisfaire des plaisirs dont mon avidité ne saurait connaitre les noms... Ma connaissance du verbe se sent perdue dans cet immense brouillard , dépourvu de raisons... seul dans un océan d'incertitudes , ma vue s'épuise dans ce silence de ténèbres qui approchent à grand pas , mes yeux se ferment , douloureux , sous cette lumière vive , multicolore avec ce parfum entêtant de paille et soufre , qui me met en mémoire , comme dernière image de ma vie passée mon vieux couvre-chef , ramené d'Orient , un endroit où habitait ma mère autrefois...
Le soleil pale ,
ne parvient pas ,
à éclairer ,
les murs sombres ,
du nid ,
mauvais présage ,
ou
superstition
d'un empereur déchu ;
complice
de la Belle Lorraine
de ma jeunesse ,
vertueuse pécheresse ,
j'ai vécu, sans le sou ,
galoches aux pieds ,
me promenant de régions en capitales ,
pour conquérir
richesses et fortunes ,
sans état d'âmes,
pour les faubourgs.
Ma Bêcheuse
est venue sauvée mon âme,
dans ce paradis de Défroqués ,
de souffleurs de soufre ,
hurlant
sous la lune
terreurs ,
et souffrances
d'êtres éthérés ,
sans Éden :
Cette histoire
du Monde
aux nuages de pourpre ,
la Révolution
des sans-dents
aux vents sans limites,
déchainant
éléments ,
terres ,
forets ,
pour devenir
lagunes sableuses
aux fonds rocheux.
Seul l'horizon laisse paraitre l'homme construisant , bâtissant .
Celle que tu deviens ,
sous le joug ,
restera la fille ,
de vertus ,
grandissant ,
dans le silence ,
d'une
pauvre novice ,
de maison close ,
sans vies ,
sans bonheurs ,
sans joies ,
riant de tes rêves
déchirés,
par un parvenu ,
sans âme,
de tes robes ,
fripées ,
délacées ,
par les mains ,
du hasard ,
qui gantées ,
nouent liens et destins , pour t'éblouir d'un diamant , d'une pierre qui sauront te ravir.
Mon fantôme disparait dans les brumes , vagues de l'âme écumant mon histoire , ma vie , mes rires , mes souvenirs , mes pensées les plus intimes , su l'Art d'aimer la plus belle de toute ...Cette faucheuse , inconsciente ,sauvage qui me tourmente , me domine , me ridiculise par son savoir unique d'une Pénélope aux enfers , savourant les blessures de guerre d'un être décharné , sans sexe , ni age.Quelle raison ai-je de l'aimer si ce n'est mourir , heureux , sans regrets !L'attente fut si longue pour te trouver ; j'étais si misérable sans toi qu'enfin je peux de le dire .
Je t'aime à la folie , passionnément , pour toujours car tu es l'Être créé pour me combler.
Très beau
· Il y a plus de 8 ans ·menestrel75
Merci.
· Il y a plus de 8 ans ·Laurène J.Carol