Manifeste Parisien

jacques-sullivan

Quand dira-t-on qu'il y a le clairon qui sonne ? Je le dis, je le proclame bas et fort pour que les ténèbres et les sous-terrains où vous vous terrez l'entendent aussi. Ce que j'en dis, c'est qu'il a sonné et qu'il est temps de passer aux choses sérieuses. Il est temps de sortir de ces abîmes, de se mettre à jour, de se découvrir, de découvrir. Plus besoin de se cacher, nous pouvons sortir en pleine lumière sans risquer de se faire briser les ailes. Volez, volez, planez, planez, autant que vous voulez, nul ne viendra vous arrêter. Soyez discret tout de même, il y a des enfants qui regardent.


Après des années et des années à entendre cette rengaine selon laquelle "Paris est mort", "Paris, c'est plus ce que c'était", j'entends enfin une réponse. Nous pouvons tous l'entendre, il faut juste écouter, quand on se concentre, on l'entend bien. C'est comme le violoncelle sur le morceau de l'autre, il faut tendre l'oreille pour le distinguer. Je peux vous la tirer si vous voulez et vous mettre le nez dedans aussi, mais c'est moins agréable. Apprendre par soi-même est toujours plus enorgueillissant. Bon allez, je suis sympa, je vous la communique : "Paris renaît, alors taisez donc ces 'C'était mieux avant'".
Le clairon a sonné la fin d'une bataille, et le début d'une victoire. Nous nous ré-approprions l'espace de la capitale en commençant par ces quais que vous connaissez, et si vous ne les connaissez pas, vous n'avez pas l'oreille qui traîne. Grand mal vous en fasse. Il est bon d'être impoli de temps à autre.

Toujours est-il que l'heure est aux week-end chargés. Sans accalmie, sans pause, sans trêve, sans répit, sans relâche, sans cessation, la guerre est déclarée contre l'ennuie et le peuple est au front, debout sur les barricades, cocktails à la main, cigarettes au bec, le front contre la muraille de son. Une guerre contre l'ennuie qui pourtant m'ennuie.

Certes, l'esprit de fête, de bacchanale, est bien là. Mais après ? Ca ne suit pas. La fête ne devrait-elle pas être une concentration d'esprits, d'énergies rassemblés pour créer quelque chose de nouveau ? Tous ces week-ends, qu'est-ce qui les différencie ? Arrivez-vous à faire la différence entre tous ces week-ends passés sous l'égérie de la légèreté et du manque de raison ? Certes, cela libère l'esprit. Mais si nous le libérons c'est pour en faire quelque chose ? Le vider pour mieux le remplir. C'est comme votre ménage de Printemps : vous jetez toutes les saloperies que vous avez accumulé cet hiver et qui, vous le clamiez alors, "vous servira plus tard". Au final, vous bazardez tout pour mieux pouvoir le remplir de nouveaux objets indispensablement accessoires. Mais au moins vous l'avez rempli, vous allez même certainement garder une ou deux pièces de votre collection de détritus, de débris, de rebuts éternels. Faites en un concentré et vous obtenez un filtrat, l'essentiel. Passez toutes ces soirées à l'alambic, qu'obtenez-vous ? Je suis peut-être d'humeur sinistre, mais je ne trouve rien.

Je ne dis pas que tout ça soit peine perdue, que tout ce temps passé sur ces pavés et dans ces usines désaffectées soit gâché. Non, après tant d'années d'inerties, il est normal que les choses prennent du temps à se remettre en place. Mais il ne faut pas s'embourber dans cet activisme futile qui ne voit pas plus loin que le bout de son gramme. Nous étions au point mort, nous avons passé la première, il faut embrayer la seconde. Paris était mort, nous l'avons vu renaître. C'est une enfant aujourd'hui, il faut l'accompagner dans sa croissance. L'éduquer, la nourrir, l'élever. Ne nous facilitons pas la tâche, prenons-nous la tête. Ne la faisons pas garder, ne soyons pas des parents absents. Accompagnons Paris, prenons-la par la main, et faisons la grandir. Alors, demain, Paris sera à nouveau adulte.

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