Miracle

Christian Lemoine

Qui déciderait d'un tel miracle ? Aussi improbable qu'une averse sous le dais éclatant d'un ciel entièrement bleu. D'une conscience ouverte sur des profondeurs ouatées, cherchant dans des remuements luisants aux limites des lueurs, la piste étonnée des sirènes. Aussi improbable que le tapis étincelant d'une neige sur un atoll de paradis. Aussi froid et brûlant. Les contraires renversant les certitudes pour mieux découvrir des estrans de coraux frileux, pris dans le paradoxe des courants bouillonnants avant d'être laissés, offerts au soleil de tropiques de cartes postales. Comment saisir ces flamboyances, tant elles se déploient dans des langages sans locuteurs ? Comme une brûlure sur la peau, loin de toute source de chaleur ; le fracas d'un esprit bouleversé, tandis qu'il se tient replié dans son ermitage écarté des sentiers et des rencontres ; comme le chant qui persiste et persifle, oreilles bouchées à la cire, à l'étoupe hermétique, et malgré tout les mélodies s'insinuent et psalmodient encore ces vains et trompeurs chants d'espoir. Et s'en réjouir pour ne pas succomber à la déchirure d'un myocarde fracturé d'abandons. Aussi improbable qu'une aspiration d'air pur, que la survie de l'aérobie enfoncé loin en terre, dans ce caveau scellé où l'unique état de la matière est la paralysie minérale. L'asphyxie et le souffle jouant au même poumon. Le miracle ou la malédiction. Et le regard perdu et transi, de ne savoir auquel il faudra se soumettre.

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