Mise à nue

Mise à nue. Il a entre ma tête et mon corps, une confusion. Nous ne savons pas mettre de barrières. Ma peau infiltre mon âme et mes songes mes gestes. Mes regards ne viennent pas de moi, ils viennent d’une force céleste qui est plus grande que mon corps. Cet emprunt temporaire qu’on m’a offert pour permettre à mes pensées de vivre et de s’alimenter indépendamment du corporelle qui forge ma propre existence.

Mon visage n’est pas le mien. Mes cheveux sont ceux d’une étrangère. Mes yeux brillent plus qu’à l’intérieure ils le font. Ma voix est trop douce pour les pensées qu’elle côtoie à l’intérieur de moi. Mon rire est hypocrite à ma douleur, ma sagesse est menteuse de mon mal-être.

Je vis depuis maintenant 19 ans dans un corps meurtri par des forces amplement supérieures aux miennes. Ces forces me transforment, de bébé à fillette, de fillette à fille et de fille à femme. Mon corps cri ma jeunesse, ma puérilité. Elle s’étend partout sur mon visage, dans mon odeur, sur mes lèvres prêtes à être embrassées, sur mon corps en manque de cajolerie. À l’intérieur c’est le bordel. Ça fuit de partout. Mes tuyaux coulent sans jamais affecter mon malaise. L’extérieur est soigné, empreint d’ordinaire, voire même d’invisibilité. Mes tuyaux s’échappent nuit et jour, un liquide noir et malodorant en sort et me brûle comme des ulcères. Ce poison m’empoisonne l’existence, il trouble mes moindres virgules et mes simples sourires. J’attends qu’il s’échappe, qu’un jour la triste réalité soit digérée pour ensuite être expulsée de mon être si pur, si enfantin. De mon corps trop simpliste. De mes étouffements trop fréquents, qui coincent dans ma gorge et qui me laisse seule à rêvasser d’un crachat qui criera toute la vérité qui gèle mon sang et mon droit au bonheur.