Moi, Facebook, lendemain de soirée

david-b

Ce matin, lorsque je me réveille, je ne sais plus qui je suis. Autour de moi, tout est noir, je ne sens que les draps sur mon corps, puis comme un réflexe, je me tourne et saisis mon smartphone, me connecte sur Facebook, et je découvre à nouveau qui je suis.

Sur mon profil, c'est une photo de moi entouré de jolies filles. J'ai l'air heureux. J'ai surtout l'air défoncé. Je ne me souviens pas avoir posté cette photo. Je regarde l'heure : elle date d'hier soir.

Mes statuts me narrent alors la vérité de ce qui s'est passé la veille : Je vous aime tous, Je veux que cette soirée ne s'arrête jamais, J'ai trompé Charlotte, J'aime le sexe. Je suppose qu'un des mes amis s'est introduit dans mon profil pour écrire tout ça.

En haut de la page, une petite bulle rouge apparaît, j'ai reçu un message. C'est un message de Charlotte. Elle me dit qu'elle a vu les photos, mes statuts, qu'elle en a marre d'être avec quelqu'un d'aussi volatile que moi, alors elle me dit que c'est fini, elle me quitte, ce n'est pas la peine de la rappeler.

Je regarde les photos. Je suis dans un lit avec Agathe, on est allongés tous les deux, puis il y a aussi d'autres gens autour de nous, la bouteille à la main.

Je me lève, j'ouvre les volets, ma fenêtre, puis je me prépare un café. Le sirotant en fixant l'immeuble d'en face, je me dis qu'il faudrait que je trouve un moyen de bloquer mon compte Facebook lorsque je me rends à une soirée. Parce qu'à chaque fois, je commence à boire, et à chaque fois, soit je commence à y raconter n'importe quoi, soit quelqu'un parvient à s'emparer de mon smartphone, et y écrit ce que je fais en toute impudeur.

Je supprime toutes ces photos prises à la dérobée, ces statuts à la provenance inconnue, et je réponds à Charlotte, je lui dis que je suis désolé, que je l'aime.

Et à chaque fois, je me demande si ma vraie vie, c'est ce qui se passe sur ma page Facebook, ce que je dois supprimer à chaque fois que je me laisse aller, ou bien si c'est ce que je tente de faire, l'apparence que je tente de me donner... Qu'est-ce qui est vrai de moi ? Ce que ma page Facebook me raconte, ou bien ce que je tente de dire, lorsque j'écris à ma copine pour lui dire de ne pas croire ce qui apparaît sur mon Facebook ?

Et dans ces moments-là, je doute, je doute beaucoup, car depuis que les réseaux sociaux existent, et que je peux ainsi faire étalage de ma vie, ma vie, au lieu de se révéler, est devenue encore plus ambiguë, encore plus contradictoire.

Alors, pour me retrouver, j'essaie d'écrire, loin des autres, loin d'Internet, des textes plus ou moins personnels, et dans l'écriture, je finis par me perdre un peu plus, je finis par me confondre avec cette image que je me donne de moi.

  • Merci de participer à FTV. Vous introduisez les réseaux sociaux dans votre narration, c’est pertinent vu le sujet, mais vous aussi, vous êtes hors sujet. Nous ne vous demandions pas de vous décrire en tant que personne mais en tant qu’auteur. Si vous vous perdez dans l’écriture, tachez tout de même de trouver le lecteur. Une réflexion pertinente par contre sur la "vitrification" du moi dans les réseaux sociaux.

    · Il y a presque 14 ans ·
    10717 1223136733533 1082428138 699165 1338660 n orig

    abeline

  • La shyzophrénie numérique qui nous est racontée sans ambage. Emouvant texte. Bon courage à vous, à toi et à celui de Facebook !

    · Il y a presque 14 ans ·
     14i3722 orig

    leo

Signaler ce texte