Mononeurone

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C'est quand même ennuyant qu'il soit aussi beau. Il pourrait faire un effort. Et être moche, par exemple. Ça permettrait de mettre mon reptilien en sourdine et ça nous donnerait l'occasion d'enfin avoir une conversation digne de ce nom. On a bien essayé, mais c'est comme si on avait un quota (très) limité de mots. Y a juste "bonjour" qu'on maîtrise. Enfin, je ne peux pas me prononcer à sa place. Déjà que je ne peux pas me prononcer à ma place...
Quand je parle ou que j'essaie de parler avec un individu mâle qui me plait, alors que c'est là que j'aimerais briller, qu'il faudrait que je fasse preuve de répartie, tout ce qui sort de ma bouche est d'une platitude affligeante, en mode pom-pom girl sous acide qui fait des phrases sans fin: t'as vu comme il fait beau cet anticyclone des açores qui nous amène le beau temps, c'est super chouette, tu sais que le nom "anticyclone" vient du grec ancien? (véridique). C'est d'autant plus gênant quand il y a d'autres personnes autour, avec lesquelles je peux parler normalement, être moi-même, brillante, intelligente et tellement fun. Carrément schizophrénique. Dans ces cas-là, je finis par ne plus parler à l'objet de mon désir, et à faire l'iceberg (voir plus bas).

Le pire, c'est que je m'entends débiter ces conneries, faire des gaffes: ouais comment ça qu'est ce que je veux? dans le vie ou là tout de suite? nan parce qu'on vous connait hein vous les mecs... même si bon, te fais pas d'idée, j'en ai pas eu tant que ça euh si quand même mais sucer ça compte pas ahahah euh oui en fait je vais prendre un express véridique. Plus je m'entends, plus je panique, plus je raconte n'importe quoi.

J'ai aussi développé la technique dite de l'icerberg, afin d'éviter toutes les conversations honteuses. Du coup, j'évite toutes les conversations, je ne salue même pas, pas un regard, rien, walou, et l'individu en question ne me calcule pas, alors que dans ma tête, c'est hyper compliqué à cause de lui, donc ça me vexe un peu, donc je boude, mais il n'est même pas au courant et après je romps.

C'est affligeant. Mais ça fait marrer tout le monde.