Bleu citron

Rosanne Mathot

Correspondance depuis Naples.


Naples, tu sais ce que c'est ? Une odeur de café, une mobylette qui pétarade, deux chats avançant à pas hésitants entre les détritus du trottoir.

Un cri au balcon d'à côté :  "Mariaaa, minchia ! Ma !!! Che cazzo sta facendo ?!"

L'accent bombé, comme des joues pleines de vent.

Le bus blindé, bondé, aux horaires aléatoires, pareil à une expédition dans la savane. "Oh, il peut venir dans une heure, ou bien demain. On ne sait jamais". Rires. 

Et puis...

Ça gueule. Ça invective.

Et puis...

Des rongeurs. Des  savates. De l'ocre. Sur les murs. Hauts ! Hauts ! Hauts !

Du rose. Des Vespas. Sans casque. Des voitures. Sans ceinture.

Une liberté effrontée, la gueule grande ouverte dans l'haleine du Vésuve. 

Un resto comme tiré d'un roman mafieux : entrer dans un souterrain, un parking ? Grand. Énorme. Et des lanternes rouges en papier qui surplombent un escalier de marbre. "Ma ! signorina, dové il tuo marito ?! E Como ? Perché no che l'ai, il marito ?! Ma che peccato ... per lui !"  

La bretelle de ma robe qui lâche.  Une sérénade polychrome de Klaxons.

Et moi, qui te lècherais bien, comme une glace au citron. Comme une glace. À tous les parfums du monde. 

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