Ne m'aime plus, little love

little-wing

Ne m’aime plus. Ça fait trop mal.

 

Je t’ai balancé des insultes à la gueule, des assiettes, mes poings, ma douleur, ma rancœur et j’en passe. Rien n’y a fait. T’es resté, tu m’as pardonné. 

 

J’ai changé de tactique. Je t’ai ignoré, j’ai joué l’indifférente. La communication ne passait plus, sauf pour s’engueuler. Cela n’a fait que te rendre plus blasé. Mais t’es resté. 

 

Ma violence se trouvait chaque jour de nouvelles limites, en n’en plus finir. J’ai commencé à ramener des hommes à la maison, juste son ton nez, frôlant à chaque fois la rupture. J’ai cru à ce moment-là atteindre le point de non retour, je ne me sentais pas capable de faire plus. T’as fini par craquer, t’es parti en claquant la porte derrière toi. Le bruit a résonné dans un silence qui a duré six mois. Six long moi où je me suis oublié. Puis tu es revenu. 

 

Tu m’as retrouvé dans la déchéance totale. Six mois et j’ai trouvé un moyen de me foutre plus en l’air : l’alcool. C’était si facile de se laisser bercer dans la demi-conscience, de plonger son regard dans le liquide ambré sans penser à rien, de se laisser mourir en faite. T’es revenu mais moi, j’étais parti vers un ailleurs insondable. 

 

Puis cela a recommencé. Je t’ai insulté. Je t’ai frappé. J’ai découché. Je t’ai trompé. J’ai bu. Je t’ai ignoré, emmerdeur que tu es. Qu’est-ce que tu voulais de moi, à la fin ? Je me posais la question mais je ne voulais pas en savoir la réponse. Je préférais m’enfermer dans des certitudes qui ne me faisaient pas peur. Des certitudes fausses construites de toute pièce. J’ai écumé des bars, j’ai fais la bringue, j’ai perdu mon job, j’avais la gueule de bois, j’avais une colère sourde au fond des entrailles, je gueulais plus que je ne faisais et toi, t’étais toujours là. J’me demandais c’que tu foutais encore là, à m’attendre même à six heures du mat’, à m’arrêter quand j’allais trop loin, à foutre dehors les squatteurs que j’appelais amis, à vouloir me ramener à la raison. Raison que j’ai perdu depuis des années. 

 

Comment toi, little love, tu pouvais encore vouloir m’aimer ? Qu’ai-je fais pour que tu m’aimes comme ça ? Alors que je nous ai lancé dans une infernale tornade de misère. Je le sais que je ne suis plus digne d’un quelconque amour, détestable salope que je suis. 

 

Alors ne m’aime plus, little love, ou ma culpabilité, mes fautes, mes erreurs, ma maladresse, moi toute entière, nous tueront à petit feu. Parce que, au fond, je cherche à te protéger, à t’aimer aussi mais… je suis trop faible pour cette trop grande chose appeler amour. 

 

Ne m’aime plus, little love. Vas vivre une vie, une vraie, avec une de ces greluches fades et sans saveur qui saurait comment t’aimer. T’aurais un beau mariage, une journée d’été. T’aurais des gosses, deux garçons et une fille, blond tous les trois. J’aime bien les blonds. Ta femme aussi sera blonde. Vous aurez une belle baraque dans une banlieue où les autres familles de votre genre s’côtoient. Tu ferais des barbecues. J’aime bien l’odeur du barbecue aussi, ça me rappelle mon enfance. 

 

J’aurais voulu te donner cette vie, une vie que tu mérites. Mais j’suis pas une fille à ça, moi. Quand tu as commencé à m’aimer, j’étais déjà aux portes de l’Enfer. T’aurais pas dû aimer une fille comme moi. On n’aurait pas dû s’aimer, little love. 

 

Mais on a connu des moments beaux, tous les deux. C’était bref mais ça en valait le coup. On a vécu passionnément, hein, little love ? On avait pas peur de s’aimer à fond, de prendre des risques, on ne prenait même pas le temps d’être pudique. Mais voilà, j’suis pas faite non plus pour le long terme. Avant même que ça commence, j’savais déjà comment cela allait finir. 

 

T’as bien vu de toute façon. Je suis violente, en colère, immature, irresponsable, chieuse, salope et profondément pas faite pour vivre avec quelqu’un 24/24h. 

 

Ne m’aime plus. Pour toi et pour moi. Ne m’aime plus, tu verras, t’iras mieux après. Tu m’oublieras avec le temps. Ne m’aime plus, little love, mon cœur y succomberait. Ne m’aime plus et sors-toi de cette chaîne sans fin de destruction.

 

Ne m’aime plus parce que toi, tu en es capable. Moi, je suis condamné à t’aimer jusqu’à ma mort. Alors ne m’aime plus et vas-t’en.

  • J'aime beaucoup! Simple, incisif, réaliste, dur... Pourtant, j'ai comme un relent de "courage, fuyons" quand je lis tout ça. C'est tellement plus facile de dire qu'on est pas fait pour ça, pour l'amour avec un grand A, que de faire l'effort d'y arriver, de se battre pour aimer... L'amour, même avec le plus grand A qui soit, n'est pas une petite balade de santé qui te fait traverser la vie sans sourciller... c'est une lutte quotidienne pour lui montrer que tu l'aimes, vaincre ses peurs mains dans la mains, construire ensemble le lendemain. Personne n'est vraiment fait pour ça... A toi de te battre, ou pas...

    · Il y a plus de 11 ans ·
    Vhrwx7 t 400x400

    Alinoë

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