Non, ce n'est que pour quelques billets verts

david-b

Quand on t'a demandé pourquoi tu aimais la vie, tu n'as pas voulu répondre tout de suite. Tu n'étais pas sûre que l'on soit prêt à entendre ta réponse. Dans l'incertitude, tu préférais ne rien dire. Puis tu t'es souvenue de ce film, ce film qui parlait de l'avenir, de cette envie irrésistible qui nous tire tous vers l'avenir, et tu t'es finalement décidée à répondre.

Un jour, dans ta plus tendre enfance, tu as fait ce rêve, où tu étais projetée dans le futur. En fait, ce n'était pas un rêve : tu as vraiment voyagé dans le temps. Quelque chose comme soixante ans plus tard. Tu ressemblais à ce que tu as pu être lorsque tu avais la vingtaine. Tu étais belle. Et, autour de toi, tout était si moderne, tout correspondait exactement au moindre de tes besoins. Tu étais comblée.

Au début, tu ne comprenais pas cet interlude que tu avais passé dans l'avenir, en guise d'introduction à la vie que tu allais mener. Ce n'est que plus tard, en devenant adulte, que peu à peu, tu as réalisé que ce que tu avais vu, ce que tu avais vécu dans ce rêve, était ce pourquoi tu vivais, ce pourquoi il fallait que tu achèves cette existence, car au bout, il y avait ce rêve, cette promesse du bonheur, la vie éternelle, la modernité dans toute sa splendeur, car non seulement ton existence serait achevée en son sens temporel, mais aussi la modernité serait aboutie, et le monde pourrait aller ce vers quoi il s'était toujours dirigé, la perfection.

Alors, on a commencé à te prendre pour une folle. Puis on t'a tuée, et on a vendu tes organes pour quelques billets verts.

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